Tes lèvres pointent au nord

Tes lèvres pointent au nord.

Elles s'enlisent et je les perds dans le silence. S'esquintent contre l'âpre souvenir de nos contacts.

Nues, elles gercent. Se bouchent.

Elles gondolent les jours d'averses : tes chairs en carton.

Exsudent, humides, quand tu te presses sous les cotons.

Tu t'émiettes chérie, derrière les baumes. Masques tes défaites le soir dans un livre, timide. Quand tu abandonnes ta salive aux coussins, tes aphtes à d'autres mains.

Vieux, nos amours poussière nous grattent entre les draps. Se répandent, cendres. Fuyant les pores de nos cœurs en poudre.

Miettes d'un passé tassé, déjà passé pour toi.

Dans le molleton de ma couche, je rêve à-demi. De nos hiers. Du goût de ta langue, et des alcools, nos premiers soirs de bars : tes lèvres exsangues et la picole. Tes lueurs de fard, nos premières pintes qui tanguent et tes doigts sur mon col. Défait de ses sangles, ton pied-nu caresse mes plis, frôle la crasse.

Tu m'embrasses, torve.   

Aujourd'hui, tes pas poltrons aux pieds du lit. Et mes fantasmes morts à-peine nés. Tu détruis tout, sans le savoir : ton chlore crache à la benne des paquets de fleurs fanées.

C'en est fini, oui, de nos folklores. Du fiel comme du venin sur nos souffles courts et nos crises d'asthme.

En vain, la rose des vents s'ébroue.

Je finirais fou peut-être, couillon dans le décor. Pour retrouver un jour, le goût chaud de ta bouche, les mois d'août et les préludes.

De ceux qui soleilleront mes cachots, et rappelleront nos corps.

Vers le sud.