Très chère Cendrillon

Très chère Cendrillon,

            L’objet de cette lettre est très simple, fallait que j’te dise que t’es, très sincèrement, une grosse connasse. Détend toi. Je vois déjà tes grands yeux bleus outrés, ta main devant la bouche, le petit « oh » comme si je venais d’insulter ta mère. On se calme ma grande, j’ai des bonnes raisons de t’en vouloir.

            Petite, on m’a raconté que ton enfance était merdique mais qu’un Prince est venu te sauver et que t’as eu des marmots en pagaille. On m’a dit, que moi aussi, on viendrait me chercher… J’y croyais comme on peut croire en Dieu.

 J’étais sûre que c’était écrit, qu’on avait toutes, un Prince, quelque part. Puis j’ai eu 29 ans… Ne t’avise pas de lever les yeux au ciel, genre « 29 ans ? Mais t’as la vie devant toi… », ou je te frappe. Tu t’es mariée à quel âge toi ? 16 ans et demi ??

            Y’a deux solutions : mon enfance n’était pas assez pourrie pour qu’on daigne se déplacer ou t’es une sacrée connasse doublée d’une mythomane. Etant donné que mes jeunes années rivalisent largement avec les tiennes : je réitère, t’es une connasse.

             A cause de toi, plein de filles attendent l’homme idéal même si personne ne l’a jamais vu. Ne me dis pas qu’on est trop difficile, c’est du pipo. On a toutes laissé leurs chances à des crapauds en espérant qu’ils se transformeraient en Prince. Tu veux que j’te dise ? Ils se sont transformés mais en phobique de l’engagement ou en salopard cocufieur adepte de la triple vie. On a toutes donné une partie de nous même, sans hésiter, à remiser, le peu qui nous restait, de confiance et d’amour, et devine quoi ? Zéro marmot mais le cœur en mille morceaux.

            Ma grande blonde aux yeux bleus, je te prie de cesser tes agissements au plus vite, ne vas pas nous pourrir une autre génération. Si j’te surprends encore à diffuser tes mythos, je porte plainte pour diffamation, et te ferai enfermer jusqu’à  ce que mort s’en suive.

            Si je finis par trouver mon petit Prince, celui qui fera chavirer toutes mes certitudes, je lui dirai de casser la gueule du tien. Il t’a soutenu et mérite donc une bonne patate, histoire de lui remettre, les idées à l’endroit. Quand il lui manquera deux dents (parce que mon Prince sera méga fort et mettra des patates du tonnerre), t’auras beaucoup moins envie, de te la raconter. 

         Sur ce, grosse connasse, je te laisse en espérant que tous tes mioches ont fait de ton corps une énorme boule de graisse et de cellulite. 

            Bien Cordialement, 

                                                                                        Sorya Le Goff