Un peu de peinture dans le monde

Camille prit son pinceau et appliqua un peu de rouge sur son tableau. La peinture, c'était sa vie. Ce qui la rendait heureuse. Elle aimait l'odeur de la peinture fraiche, elle aimait le contact de ses outils sur ses doigts, elle aimait laisser vagabonder ses pensées.

Elle detestait le monde réel. Trop gris. Pas assez de couleurs, de gaieté.

Trop de souffrance.

Elle aimerait prendre son pinceau et colorer les immeubles en rose, les fontaines en bleu, les magasins en jaune, le ciel orageux en vert et même les pigeons en violet! Elle aimerait rajouter des arc-en-ciel dans le coeur des gens!

Mais elle était trop timide. Elle restait cachée dans son hangar, près du quai, un hangar abandonné qu'elle avait trouvé et remit en goût du jour. Elle s'y cachait souvent, pour échapper à ses camarades de classe qui ne l'aimaient pas, pour échapper aux disputes incessantes de ses parents, pour échapper à la tyrannie de sa soeur ainée, pour échapper au monde tout simplement.

Elle avait mal dans sa poitrine, comme si on lui brulait les poumons. Elle se sentait seule, et la peinture arrivait à combler ce vide qu'elle ressentait tout le temps.

Elle secoua la tête et se concentra sur son tableau. C'était un portrait de Marilyn Monroe, son idole. Ses yeux scrutaient Camille comme si elle essayait de lui faire des reproches.

-Sympa le tableau!

Elle sursauta en se retournant. Un garçon de son âge se tenait devant elle, un sourire espiègle sur son visage halé. Elle ne l'avait jamais vu à vrai dire. Ses cheveux noirs pas coiffé, son nez en trompette, sa petite bouche, son graind e beauté sous l'oeil droit, non, elle ne l'avait jamais vu. Un inconnu qui venait d'entrer dans son hangar.

-Qu'est ce que tu fais là? Qui es tu?

-Je m'appelle Léo, mon père bosse par ici, sur les quais. J'ai entendu du bruit alors je suis venu voir! Tu devrais faire attention, la porte était ouverte.

Camille essaya de bafouiller quelque chose, mais n'y parvint pas. Elle n'était pas vraiment douée avec les garçons, et ne savait jamais quoi leur dire. Elle préféra continuer à peindre, tranquillement, sans se soucier de lui.

-Tu dessines bien!

-M...Merci...

-Et t'es plutot mignonne.

Elle rougit violemment, ses joues virant au cramoisi. Elle n'arrivait plus à se concentrer sur les couleurs.

-Je peux rester pour te regarder?

-S...Si tu veux...