Villégiature bucolique
Hervé Lénervé
Je suis un avocat renommé sur la ville de Paris, pourtant rien dans mon itinéraire ne me destinait à cette réussite sociale. En effet, je suis issu du monde rural, j'ai passé mon enfance à « Pernesieau », un hameau famélique de quelques fermes éparses, habitées par des bouseux de dix générations pour le moins, perdus dans un no man's land agricole alcoolisé.
Quand je fus élu bâtonnier par mes pairs, une résurgence de mon passé me donna envie de revenir à mes sources. J'entrepris un pèlerinage sur les terres de mon enfance.
Le petit village n'avait pas bougé d'une pierre, le temps ne semblait pas avoir de prises sur lui, du moins sur le décor, car la population avait bien vieilli, elle ! Je ne reconnus personne des visages qui me dévisageaient en montant la rue du bled, au volant de mon coupé Mercedes-Benz CLA 250 sport de 250 chevaux, ce qui ramène le cheval à 300 € l'unité, quand même.
Je m'arrêtais à la ferme des Baudier, j'avais connus mes premiers amours romantiques dans cette ferme avec une jeune fille fraiche et belle comme la campagne. C'est elle qui m'accueillit sans me reconnaître, sans nous reconnaître. Sa fraicheur était partie, je ne serais dire où ? Elle était vêtue de ces blouses-robes qui rendent interchangeables toutes les autochtones femelles de ces contrées reculées, juste après la quarantaine. Le rose de ses joues n'était plus que la couperose de son visage. Sa taille fine comme un jonc était devenu tronc, sa silhouette élancée s'était ramassé en un Ruby's Cube informe.
Je me présentais et réussi à lui tirer une flammèche de surprise dans son regard placide de bovidés.
- Mildiou, Vévette qué surprise !
Oui ! Elle m'appelait Vévette, jadis, diminutif champêtre d'Hervé. Elle, s'appelait Marguerite. Oui ! Comme la fleur ou bien la vache. Elle fut fleur, elle devint vache, prénom prédestiné. Les filles sont des papillons qui vivent leur métamorphose à l'envers et se réveillent imago, en chenille.
Elle m'invita à entrer, chose qui ne se fait que si on est totalement accepté par les indigènes. Au sol, il n'y avait ni tapis, ni carrelage, mais de la terre battue recouverte de paille. Je demandais ironique.
- J'enlève mes chaussures ? (Weston richelieu, 1650€)
- Fait donc ! Met donc les sabots invités, ma Vévette.
- Non ! C'est bon, je plaisantais.
Je n'avais aucune envie de mettre mes pieds dans ses sabots recouverts de toiles d'araignée avec certainement toutes les dentelières à l'intérieur.
- Siète-toi, donc, là ! J'vas t'servir un canon, ma Vévette !
Je virais la poule de la chaise sans difficulté avant qu'elle n'y ponde sa progéniture, mais j'eus plus de mal avec ses fientes. Mon pantalon (Armani 550€) était bon pour être refilé à des Syriens.
Elle posa, jeta plutôt, sur la toile cirée aux motifs bibliothèque rose, deux gros verres indémodables, déjà là, à l'ère paléolithique. Elle les remplit d'un liquide du cru, fait maison, un vin noir où surnageait encore quelques grappes par-ci, pardon. Mon cœur se souleva, mon estomac se tassa et ma bouche se ferma tant que je crains de ne jamais pouvoir la rouvrir sur aucun aliment.
- Non ! Merci, il est un peu tôt pour moi.
- Pas de chichi, ma Vévette, il est sept heures
- Oui ! mais Ante Meridian, ironisé-je.
- Hein ?
Elle avait déjà avalé son verre, enfin que le contenu, quand même, qu'il était déjà rempli derechef.
- Vas-y, ma Vévette, ça ne manque pas par chez nous, Diou et c'est du bon ! Tu te souviens quand je t'emmenais sur la meule de foin ou dans les ballots de paille. Putain, c'est y pas, qu'on était jeune, à c'te'heure !
- Certes, certes ! Mais le temps passe. L'orage menace. Il va être temps que je te laisse à tes occupations, n'est-ce pas ? Je ne voudrais pas abuser plus longtemps.
Dis-je en regardant ma Bell & Ross de collection à 5600€, car je n'avais aucune confiance dans la comtoise asthmatique, dont le balancier ivre oubliait le temps un coup sur trois.
- Tudieu, non ! Tu restes manger là et J'vas t'préparer une bonne gamelle, ma Vévette, pi ensuite on s'fera une p'tite sieste, le vieux ne rentre qu'à la nuit et tellement bourré, j'pourras avoir la Garde Républicaine entre mes cuisses qu'il n'y vois goutte.
- Sans les sabres et les chevaux, peut-être ? Ironisé-je.
Je vous épargne la suite de cette catastrophique journée et croyez-moi, vous pouvez m'en être reconnaissant. Ne serait-ce que de l'évoquer, la nausée et la honte me submerge.
Le passé est le passé, il n'est jamais bon de voyager dans le temps. Restons présent dans le présent, la nostalgie de l'enfance n'est qu'une illusion poétique d'un retour tardif de jeunesse à 16 650€.
Avec un peu de mayo, tous les avocats sont bons :)
· Il y a plus de 6 ans ·Mario Pippo
C’est vrai ! Même les baveux corrompus jusqu’au noyau. :o))
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé
Dans quelle galère t'as été t'fourrer, mon pauv' Hervé...si j'ose m'exprimer ainsi !
· Il y a plus de 6 ans ·Louve
Ose ! Mais ose, donc ! Je ne suis pas du bois dont on fait les enclumes. Louve… Hou…Hou…Hou ! :o))
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé
Un grand rire !!
· Il y a plus de 6 ans ·Louve
:o))
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé
Une Merco CLA 250 dans le désert... ça doit boire ! :)
· Il y a plus de 6 ans ·effect
Certes, mais pas de l'eau ! :o))
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé
L'avocat n'est pas un fruit de nos campagnes.
· Il y a plus de 6 ans ·yl5
Bé non ! :o))
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé
Réjouissant, comme Gabriel, la suite la suite !
· Il y a plus de 6 ans ·arthur-roubignolle
Je n’ai pas envie de me faire bannir du site sous peine de nuisance aux bonnes mœurs. :o))
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé
la suite, la suite TATATA, la suite-la suite TATATA...
· Il y a plus de 6 ans ·Gabriel Meunier
Oh non, non ! Il ne vaut mieux pas… :o))
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé