Des méandres de caravelles

Bras ballants et ballottant,

S'en vont marins et caravelles,

Voiles gonflées, le coeur au vent,

Disent au revoir à leurs belles ;

Belle de jour reviendras-tu,

Quand d'or alors je serai repu ?

Dans cet imagier de vagues,

Les caravelles bringuebalantes,

Luttent au milieu du naufrage,

Proue en avant, et voix criantes ;

Belle de nuit te reverrai-je, 

Si les sirènes ne m'ensorcellent ?

Belle Héloïse attendra

Que la houle calme et indolente,

Vienne sur ses larmes poser,

Des tropiques les cendres ardentes ;

Belle de jour je te perdrai,

Dans des sursauts de flots mirifiques ;

De loin alors, colons diront,

Comment c'était, ici et là,

Les longs voyages et les rivages,

Enflammés de ces belles plages ;

Belle de nuit, je t'ai perdue,

Au milieu des eaux éprouvées ;

Et dans sa nuit européenne,

La Belle pleure son amant,

Elle s'invente mille poèmes,

En contemplant le ciel d'argent ;

Belle de jour, Belle de nuit,

Porte l'épitaphe à ton coeur épris ;

J'essaierai dans mes souvenirs,

D'entendre alors tous tes soupirs,

Les belles paroles, paroles vaines,

L'odeur du temps et des semaines ;

Ma Belle à moi, ma douce, ma mie,

Je t'aimerai même dans la mort ;

Des profondeurs abyssales,

La Belle n'entendra plus la voix,

La voix cruelle de l'océan,

Qui lui a repris son amant ;

Depuis la mer mon aurore,

Je t'envoie l'unique trésor...

Belle Héloïse garde en toi, 

L'écho des blanches caravelles,

Dans les abîmes échouées,

Où meurent les marins exilés.

...La seule promesse qui vaille,

L'amour qui jamais ne défaille.