Ecce homo

Un jour, un soir, je deshabillerais ma vie

Je couperais cauchemars, habitudes, certitudes et égo

Je laisserais tomber à mes pieds, drapeaux, illusions, combats perdus d'avance et d'après

J'arracherais de ma tête: photos sépias, photos couleurs, photos noir et blanc, souvenirs frelatés, traits arrangés, masques et maquillages

Je me laverais encore et puis encore

De mon corps tomberont des chansons à boire, de mes yeux des larmes, de mes mains des armes

Mon ventre, mon corps se videront de mes maux

Ma tête se videra de ses mots, des rimes, du beau, du laid, pour un espace vide sans extrémités ni frontières

Le vide s'emparera de moi, je deviendrais aveugle et sourd. Et viendra la musique, elle m'emplira, pénètrera par les oreilles, le bout des doigts, les yeux, la peau et même l'anus

Elle se coulera en moi, ne laissera nul espace où pourrait s'implanter une idée, un mot...

Je ne mourrais plus, on me mettra sous cloche, au musée, au cirque, dans les salles de concert, on  écoutera religieusement

De tout mon être ne s'écouleront que la quiétude et la beauté. On croira enfin trouver la fin des guerres, un jour, un mois, un an.

Et puis les bombes siffleront de nouveau, l'homme préfère les guerres. L'on ne m'entendra plus, sauf les corps brisés et les veuves attendant leur paix intérieure.

Alors ma bouche se taiera, j'irais au bord du monde, et je pisserais la marseillaise.