Façons de vivre l'amour

thelma


Au détour d'une vallée, sous un soleil éblouissant, s'étend à perte
de vue  un long fleuve, symbole du coeur de la vie, la cité des
richesses intérieures, fragments de toutes les destinées.
Où les hommes et les femmes profitent de la lueur du jour pour
emprunter les chemins de traverse, les rives abruptes, ou
embarquer à bord de navires arrimés pour un long voyage.

Loin de l'embarcadère, lorsqu'on s'enfonce au sein des denses
fourrages, on peut trouver de petites criques oubliées et anonymes
où se confinent les passionnés. A nager, insouciants, dans une
eau où l'on devine par endroit le sillon de tourbillons menaçants et
dangereux. Ses rameurs du quotidien unis par leur fougue
jamais désaltérée, boivent la tasse quand l'abandon les entraîne
dans les tréfonds pour ensuite reprendre leur souffle le temps
d'aimer encore et encore. Prêts à tout pour l'être aimé, à souffrir
avec générosité et rivaliser avec la houle troublante qui compose
leur essence, ils restent adeptes des sensations extrêmes où rien ne
sera jamais plus beau que de flirter avec la mort pour rester en vie.

Quand on quitte ces amoureux éternels, le long des larges rives,
on y voit de petits navigants qui par manque d'impétuosité ou après
une trop longue dérive finissent par embarquer sur les bateaux mis à leur disposition.
Et jusqu'à leur ultime destination, ils se laissent glisser dans les
méandres de l'existence avec la certitude qu'aucun remous ne
viendra jalonner leur route désormais balisée. Que l'on se trouve
en amont ou en aval, les yeux clos dans les transats et repus, ils se laissent porter vers les confluents de la fatalité...

Et puis, il y a ceux qui quittent l'eau pour rejoindre
l'appontement par trop de désillusions déçues; démission de
toutes les promesses par trop de noyades évitées de justesse.
A force de défaites, au gré des ruines laissées derrière eux, ils
déambulent à contre-coeur s'ajoutant à la longue file sinueuse
allant jusqu'au fleuve trop tranquille.

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