IL Y A PIRE QUE NE PAS ÊTRE ÉDITÉ…
Cathy Galliègue
Je sais.
Je sais que vous avez envoyé vos pages avec l'interligne, la police, la mise en page, la reliure, la lettre d'introduction, que vous avez fait imprimer tout ça et que ça vous a coûté les deux bras pour répondre aux exigences des services manuscrits des belles maisons.
Autant commencer par le haut du panier, on avisera si les réponses sont négatives.
Elles le seront, vous avez 98% de malchance qu'elles le soient.
Je ne suis pas juste, ce n'est pas toujours de la malchance. Parfois, le refus est justifié. Parfois, on se prend pour un écrivain.
Quoiqu'il en soit, à quelques exceptions près, la réponse sera cordiale, pas assassine, mais ce sera non.
Donc, on descend d'un cran. On rêve plus réaliste. Et ça recommence.
Là, si votre premier bouquin est digne d'intérêt, vous avez des chances.
La question est : La petite maison qui va vous honorer de ce contrat à compte d'éditeur ( je ne parle pas du compte d'auteur, hors concours et à fuir absolument ), a-t-elle les compétences, les ressources, la niaque de porter votre texte ?
Balayez vite l'euphorie, elle risque de ne pas durer. Et réfléchissez bien avant de signer. Renseignez-vous, regardez bien ce que cette maison fait concrètement, posez-vous et posez-lui les bonnes questions.
1- Un éditeur digne de ce nom n'acceptera jamais votre texte brut de décoffrage. Il y aura un gros travail de fond. Plusieurs versions de votre texte initial seront nécessaires, il y aura les corrections, l'élaboration de la couverture, de la 4ème, quelques mois de travail en collaboration collée serrée avec l'éditeur. C'est la base.
2 – L'éditeur doit avoir un distributeur. Tous n'en n'ont pas. Pas de distributeur, pas de librairies. Votre livre sera disponible sur les sites de ventes en ligne. Basta. Si pas de présence en librairie, pas de presse.
3 – Et donc, la presse : Avant la sortie ( en librairies donc ), des SP (Service Presse) sont envoyés aux journalistes par l'attachée de presse de la maison qui les relancera pour espérer, parmi les innombrables sorties, un papier.
4 – Les signatures, les salons : Là encore, c'est la maison d'édition qui se charge de vous organiser les rencontres. Pas vous tout seul sur vos réseaux sociaux.
Si toutes ces conditions ne sont pas réunies, si ça flanche sur un ou deux points, on ne signe pas. Parce que pire que ne pas être édité, être mal édité signe un suicide littéraire dont on revient rarement. Ces petits éditeurs auto-proclamés ( il existe de bons petits éditeurs, je ne généralise pas ) ne vous offriront pas plus de services que l'auto-publication, mais en prime, votre texte ne vous appartiendra plus.
Gardez votre texte au chaud, retravaillez-le, c'est souvent nécessaire. Écrivez un autre livre, votre écriture gagnera en qualité, en confiance, mais ne balancez pas votre livre aux oubliettes pour la simple satisfaction d'avoir votre nom sur la couverture et celle d'une maison dont tout le monde ignore l'existence.
Puisqu'on y est, vous vous demandez sans doute d'où me viennent ces certitudes.
De ma triste expérience, tout simplement.
Je vous raconte ?
J'ai tout fait comme expliqué plus haut. Bien sûr que les refus usent et bien sûr que le premier marchand de rêve venu est le bienvenu. Du coup.
Alors, j'ai signé. Toute joyeuse, tout remplie des belles promesses de « mon éditeur ». J'étais vraiment très fière de pouvoir dire « mon éditeur ». Mais voilà. Lui, son truc, ce qui le faisait vraiment se sentir fier et compétent, c'était de sortir vite. Et pour aller vite, ça, il a su faire. Un mois.
Un mois entre l'envoi de mon texte et la sortie. Sortie qui n'en était pas une puisque tous les points au dessus avaient été mélangés, malaxés à sa sauce, ignorant superbement les règles de base, le tempo à tenir et la rigueur nécessaire.
Nous avons donc eu dans le désordre :
Un super beau bandeau collé sur la couverture avertissant les lecteurs qu'il s'agissait du « Roman de l'été » ( le 25 décembre, ce bandeau flotte toujours fièrement, quelle farce ! )Une illustration fournie par mes soins, et payée par bibi.Pas de relecture en profondeur du texte, pas de correcteur non plus.Un distributeur (il en a un), qui a été briefé 4 mois après la « sortie ». À l'heure actuelle, toujours pas de présence en librairies.Une attachée de presse qui envoie des SP aux journalistes pas tous concernés par la littérature, un peu au petit bonheur la chance. Et comme elle est polie, comme elle veut pas déranger, elle ne les relance pas.Aucune rencontre organisée par l'éditeur ( j'ai eu le bonheur malgré tout d'en avoir une très belle, organisée par un blogueur littéraire bien connu, Denis Arnoud, le plus beau souvenir de ma vie d'auteure.)
Et l'auteur, moi en l'occurrence, qui passe ses nuits et ses jours à ratisser les réseaux sociaux, à récolter des retours formidables de blogueurs littéraires, de lecteurs, tous très étonnés de ne pas entendre plus parler de ce bouquin.
Et l'auteur ( toujours moi ), s'épuise et finit par accepter que son travail de titan est en train de glisser vers les oubliettes, les fameuses que je vous conseille d'éviter, parce que là, au fond, je vous l'assure, c'est pas très vivable.
Merci de nous faire partager ta précieuse expérience en matière d'écriture et d'édition. Beaucoup vont tomber de haut en lisant ces lignes. Que de rêves brisés, que de larmes versées. Mais que sert-il de nourrir de faux espoirs ? A quoi bon dépenser tant d'énergie et tant d'encre pour finir dans l'oubli, ou plutôt dans l'indifférence. Car pour être oublié il faut d'abord avoir existé. Ce qui n'est pas le cas de la plupart d'entre nous. C'est dur de faire face à la réalité mais c'est sans doute un mal nécessaire. Merci Cathy.
· Il y a plus de 8 ans ·Chris Toffans
un parcours initiatique,,,same player shoot again !
· Il y a plus de 8 ans ·Patrick Gonzalez
C'est un peu ça, oui. À envisager avec beaucoup de patience et d'humour. Sinon, c'est à se flinguer :-)
· Il y a plus de 8 ans ·Cathy Galliègue
Bonjour Cathy, Véridique, tout ce que tu viens d' écrire. Une maison d'édition en ligne a publié il y a quelques mois mon recueil de poèmes. J'étais sur un petit nuage, j'ai même rêvé que j'en vendais par dizaines -je n'ose dire par centaines,mais après tout le ridicule ne tue pas ! Bien sûr, je ne suis même pas encore arrivé à la dizaine de ventes. La famille, un ou deux amis. Certains devaient l'acheter mais ne l'ont pas fait, mais ils m'ont demandé de leur offrir : radinerie peut-être,donc, j'offre , et ils aiment ! En fin de compte, j'apprécie cela et je ne fais plus de "châteaux en Espagne". Je suis simplement ravie d'avoir mon nom sur la couverture d'un bouquin. Et puis, depuis que j'ai rencontré des amis sur Welove. je ne pense plus qu'à lire des textes et à en écrire, le reste m'est bien égal. Le principal, pour moi, c'est d'avoir la joie de m'exprimer, d'être lue ! Bonne journée à toi Cathy !
· Il y a plus de 8 ans ·Louve
Martine, tu t'attaques à ce qu'il y a de plus difficile à "placer", la poésie. Aujourd'hui, il vaut mieux écrire du récit bien trash, même mal écrit...va comprendre.
· Il y a plus de 8 ans ·Cathy Galliègue
C'est vrai que la prose est plus facile à écrire, notre imagination peut voler en toute liberté, sans aucun contrainte, aucun frein
· Il y a plus de 8 ans ·Louve
-Beau retour d'expérience, et très vrai, je connais un peu le système...Le seul souci véritable c'est que beaucoup d'auteurs sont convaincus d'être des génies. Hélas, bien souvent ce n'est pas le cas.90% des manuscrits sont nuls. Et, de l'autre coté, 90% des éditeurs ou soi-disant, sont des clampins qui n'y connaissent rien à la littérature. Démerde-toi avec ça!
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
Totalement d'accord avec toi Arthur. Il faut s'y casser les dents pour comprendre. Et continuer quand même.
· Il y a presque 9 ans ·Cathy Galliègue
Bien sur qu'il faut continuer, et se référer à ses maitres, tiens le mien en ce moment c'est Arto Paasilinna, que je viens de découvrir tardivement, si tu ne connais pas je te recommande vivement sa lecture, elle est inspirante...
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
Il faut lire pour écrire, c'est certain. Je ne connais pas cet auteur, je suis curieuse de le découvrir. Je vais partir quelques jours dans la jungle, tout près du Brésil (je vis en Guyane désormais) si je trouve un de ses bouquins, je l'embarque.
· Il y a presque 9 ans ·Cathy Galliègue
aH AH! Je ris car en Guyane, oui lis cet auteur Finlandais, ça va te faire un contraste remarquable...Lis "Le lièvre de Vatanen" et "Peitis suicides entres amisé. Ses deux livres les plus connus, mais tous ses livres sont bons
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
"Petit suicide entre amis" (faute de frappe)
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
On est dans le thème ;-)
· Il y a presque 9 ans ·Cathy Galliègue
Tu sais, je termine "Dans les forêts de Sibérie", pas mal non plus au niveau du contraste ;-)
· Il y a presque 9 ans ·Cathy Galliègue
J'imagine oui, de qui est ce livre?
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
Sylvain Tesson. Très bon bouquin.
· Il y a presque 9 ans ·Cathy Galliègue
Ok, je note ça, merci
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
Oui, je me souviens, Sylvain Tesson c'est ce gars qui est parti en Sibérie vivre seul dans une cabane...Ok, j'avais entendu une émission sur lui...
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
Exactement. Seul avec des livres. Le récit vaut le détour.
· Il y a presque 9 ans ·Cathy Galliègue
Merci de me rappeler cet auteur-écrivain-aventurier. Je le lirai. Bon, en métropole il est 23 heure, il doit être environ 19 heure en Guyane. Enchanté d'avoir conversé avec toi Cathy. Bon séjour dans la jungle, n’attrape pas la malaria, gare aux moustiques! Et au plaisir de te lire car tu as une vraiment belle écriture, que j'aime. A bientôt peut-être grâce à la magie d'internet...
· Il y a presque 9 ans ·arthur-roubignolle
Merci Arthur, ça m'a fait plaisir aussi :-) Je vais faire attention, promis ;-) À vite, bonne nuit !
· Il y a presque 9 ans ·Cathy Galliègue
Une leçon à retenir ! Et mes encouragements, Cathy !
· Il y a presque 9 ans ·Ana Lisa Sorano
Merci Ana Lisa ! :-)
· Il y a presque 9 ans ·Cathy Galliègue