Je voudrais en finir

Apolline

C'est comme un poison dans ma tête ! Elle est lourde, si encombrée. J'arrive plus à la supporter. Cette impression de ressembler à une machine à laver, trop chargée, qui n'en finit pas de nettoyer encore ce même linge usé par le temps. Je suis lessivée. Je voudrais en finir.

Le passé d'une longue histoire d'amour revient toujours à la gueule qui grimace, qui grince en larmes, de devoir encore faire face.

Pourtant j'ai très bien retiré le manteau, les couches et les voiles, parfois en les soulevant délicatement, d'autres fois en les déchirant, à fleur de peau, pour faire jaillir la blessure, touchant sans cesse l'inconsolable détresse,

Pourtant j'ai très bien caressé la nudité de mon film de vie, pardonner les silences confus, l'aveuglement, les trahisons, les prémices d'un mal hurlant la formule de séparation,

Pourtant j'ai très bien enterré les hauts le cœur qui ont marqué ma peau collée dans les tissus pour affirmer enfin que je reviens de loin, de très loin.  

Tout est TRÈS BIEN n'est-ce pas ?...

Au demeurant de cette paix indiscutable, le linge du grand amour d'hier se tortille néanmoins en pirouette dans ma machine qui le broie à mille tours. Je voudrais en finir.

En finir de toute cette vidange… de toute cette vie d'ange ? Quelle méprise !

En finir d'un jeu que je maintenais amoureuse docile sous sa force tranquille.  Mais tellement destructrice. Quelle emprise !

Le tambour bat son plein. Je viens d'abattre la dernière carte. Le joker a été éjecté à mes pieds, dans ses guenilles verdâtres dérangées, dans son sourire écartelé trop rouge qui m'a décalquée. J'ai fini par arracher sa main, plaquée là sur ma tête, comme une empreinte qui me tirait toujours par les cheveux. NON ! Plus jamais de manipulations de près comme de loin ! Plus jamais, je ne donnerai mon âme au diable. Le lien est tranché. C'est fini, c'est fini. Je serai sûrement plus belle sans lui maintenant. Plus légère, plus sincère, sans me taire et surtout sans éther.    

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