Jeter le gant
carouille
« Combat de boxe au sommet
Vos commentaires électrisants au micro
Quarante ans d'une carrière légendaire
Ce soir, c'est la der avant la retraite
Qu'est-ce que ça fait ? »
Gants levés mais jambes flageolantes. Ventre crispé et muscles tétanisés. Le souffle fébrile dans ce monde hostile. Jusqu'à atteindre mon îlot sécurisé. Ces quelques mètres carrés cernés de cordes où je connais les règles, les accepte et les respecte. La rage au ventre et les bras armés pour attaquer puisque c'est la meilleure défense.
Toutes ces années passées à maîtriser et discipliner ce corps où j'habite sans qu'on m'ait laissé le choix. Apprendre par cœur la limite de chaque muscle pour mieux la dépasser. Affronter la douleur physique, la dompter, l'apprivoiser jusqu'à ne plus la laisser déterminer mes choix. Me relever, encore et toujours. Avoir le droit de tomber, mais me relever, toujours, quoi qu'il m'en coûte. Et quelle que soit l'épreuve qui m'attend, l'affronter debout. Aller chercher jusqu'au fond de mes tripes cette force qui me pousse au-delà de moi-même. Et quand je suis vide, que je ne trouve plus rien, m'abstraire de ce corps pour attraper les cris qui résonnent autour de moi et me fouettent les sangs.
Chaque matin, toute mon énergie dirigée vers un seul but. Ce que je mange pour bâtir mon corps. Ces milliers de kilomètres avalés à petites foulées entrecoupées de sprints pour renforcer mon cœur. Ces poids soulevés jour après jour pour devenir plus fort. Et pouvoir frapper de plus en plus sec. Pas l'homme en face de moi, nous ne sommes l'un pour l'autre qu'une image punaisée sur notre cible. La vie. Cette putain de vie qui me rentre dedans, me décroche ses uppercuts sans prévenir, avant de m'envoyer au sol d'une savate vicieuse. Alors taper, cogner, assommer toutes les injustices, les crasses et les horreurs que me fabrique ma vie. Et me gausser de ses coups puisque je peux les contrer ou les encaisser et me relever. Asséner toute la puissance de ce poing qui s'abat, de cette jambe qui fouette et aller au-delà de moi-même pour la maîtriser, au moins un instant. Là sur mon ring, je connais ses coups, ses feintes, ses blessures. Je peux lui faire face et rester debout.
40 ans que je lui résiste entre ces cordes où elle me fait rebondir sans relâche. 40 ans que je danse et virevolte sur son sol bien lisse malgré mes kilos de chair et de muscles. 40 ans que les hurlements qui font grésiller les micros me disent que je gagne. 40 ans que l'arbitre brandit mon poing pour rugir ma victoire. 40 ans que je redescends couvert d'ecchymoses et de contusions mais la tête haute et le pas ferme. Invincible. Invincible parce que même après une défaite je reste debout. Prêt à recommencer quand le sang cesse de couler et que les courbatures s'effacent.
40 ans de boxe et je monte sur mon ring pour la dernière fois. 40 ans d'entraînement et ce match final me trouve aussi flageolant que le tout premier, quand je n'étais qu'un gamin qui ignorait contre quoi il se battait, qui ne comprenait que cette révolte qui rugissait de sortir.
40 ans et aujourd'hui j'ai peur. Pas de ce match, mais de ce qui arrivera après. Comment vais-je affronter les coups que m'assènera la vie quand j'aurai déposé les gants ? Quel arbitre sifflera cet ultime adversaire quand il ne respectera pas les règles ? Où trouverai-je la force de me relever sans l'énergie des cris qui me portent ? Mon cœur sur entraîné pour reprendre son souffle saura-t-il encaisser les montagnes russes de l'existence, ses à-coups mille fois plus dangereux ?
Je grimpe le ventre noué. Et un calme infini descend sur moi. Pour cet instant encore, je maîtrise les éléments. Pour cet instant encore, je connais les règles. Alors je vais lever mes poings, et me battre. Quand l'arbitre sifflera ma victoire, je brandirai haut mes gants. Et après avoir repris mon souffle, je partirai en marchant la tête haute. Empli de cette volonté farouche de gagner, de cette force d'avancer malgré tout, de cette conviction inflexible que je me relèverai quel qu'en soit le prix. Prêt à faire face à mon prochain combat. Vivre. Les poings ouverts.
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Ben_qu'est-ce-qu'elle-a-la-génération-Rocky?Elle-est-plutôt-résistante-et-rythmée-non?
· Il y a presque 8 ans ·fionavanessa
Avec la musique trop la classe. Avec tes mots, on y est...Et toujours cette aisance dans ton écriture.
· Il y a environ 8 ans ·missfree
Jadore cette musique, mais je suis de la génération Rocky, j'ai une excuse ! ^^:)) merci pour l'écriture, avec le rush de la rentrée, c'est un peu compliqué de trouver l'énergie pour écrire !
· Il y a environ 8 ans ·carouille
À qui le dis-tu ! Le tout c'est de ne pas jeter l'éponge ;-) j'adore cette musique aussi et de l'énergie elle en donne!
· Il y a environ 8 ans ·missfree
Oui ! ! :))
· Il y a environ 8 ans ·carouille
Superbe écriture, chaque mot est pesé, soupesé, mis à la place qui lui convient....
· Il y a environ 8 ans ·les combats ne sont jamais terminés... il y a toujours des défis à relever... mais toi tu es un courageux petit lutin... et quand tu tombes, tu te relèves toujours....
bravo encore, je suis bluffée par ton écriture.... et admirative aussi.... bisous doux
Maud Garnier
Rrrrrhhhhoooo, ben ça valait le coup d'attendre ma toute mauve, le petit lutin est tout rougissant avec ses poings...tachés d'encre :))
· Il y a environ 8 ans ·carouille
♥ ♥ ♥ :-))
· Il y a environ 8 ans ·Maud Garnier
Attaque, riposte, couverture, esquive, dur combat mais jamais KO. Superbe texte ma Z Balboa
· Il y a environ 8 ans ·ade
En fait je me demandais un truc. ..yaurait pas plutôt moyen d'éviter le combat ?
· Il y a environ 8 ans ·carouille
Si il doit y avoir moyen. Tu sais quoi ? Je fais réparer ma baguette magique, je remets le tapis volant en état et zouh après les combats ils existeront plus...bisous ma Z
· Il y a environ 8 ans ·ade
oooh ! superbe texte ! j'en ai eu des frissons rien qu'en le lisant
· Il y a environ 8 ans ·chaque mot dégage une telle force
exercice d'empathie relevé haut la main (le gant)
ça me fait trop plaisir, tu as transcendé mes cinq petites lignes :)) bravo!
torpeur
ah vraiment ça me touche :))
· Il y a environ 8 ans ·torpeur
Merci à toi de m'avoir prêté ton idée :) heureuse qu'il te plaise :)
· Il y a environ 8 ans ·carouille
Pas facile de jeter les gants! Tu l'as très bien dit.
· Il y a environ 8 ans ·Natacha Karl
Non, pas facile, mais je connais peu de choses qui soient faciles dans cette vie. merci Natacha
· Il y a environ 8 ans ·carouille
Superbe métaphore !
· Il y a environ 8 ans ·Louve
Merci Louve
· Il y a environ 8 ans ·carouille