Le déluge et la chimère
luz-and-melancholy
Il pleut dans la rue
Et bien plus sur mon coeur,
Mais mon chagrin, ici ou là
T'importe-t-il ?
Il t'importune ;
J'attends comme les dupes,
Avide et aux aguets,
Le signe annonciateur
De ta venue qui ne vient pas ;
Alors l'averse me rappelle
Nos amours candides
Et nos illusions navrées,
Coulant maintenant vers le Seine
Et plus loin encore vers la mer,
Elles voyagent comme toi,
Elles vont et viennent, comme toi,
Elles sont belles, comme toi
Elles sont frêles, comme moi,
Elles pleurent à travers la fenêtre
Écument leur tristesse derrière les carreaux embués
D'où je les regarde,
Le souffle court,
Et toi, tu cours aussi,
Toi, tu cours toujours.
Il pleuvait
Quand nous nous sommes rencontrés ;
Pas une pluie d'avril, non,
Mais une pluie quand-même ;
Et c'était beau la tempête,
Et c'était beau l'amour,
Il était beau ton regard,
Elle était belle ta silhouette grise
Épousant la grisaille,
Et ça durerait toujours ;
J'allais prendre mon train,
Le même train de toujours,
Toujours le même train ;
Et maintenant que nous avons parcouru
La Terre entière,
Que nous nous sommes aimés
D'un amour extraordinaire,
Comme les gens ordinaires
Parfois aussi le font,
En contemplant le filet qui coule
Des branches du vieux chêne,
Je me dis
Que je préfère mille fois
Reconstruire ton visage
Avec tous ses défauts,
Entendre ta voix me dire
Des fantaisies qui font écho,
Te reprocher en colère
De boire un peu trop,
Ramasser derrière toi
Les habits que tu jettes d'en haut,
Qui tombent un peu partout,
Et voir le firmament
Quand tu défais les miens ;
Je me dis
Que je te préférerais mille fois
Comme on préfère la Lune au Soleil,
Et la destinée aux étoiles,
Les agrumes au sucre d'orge
Et puis le noir au blanc,
L'hiver à l'été,
Et le grand âge à la jeunesse :
Paradoxalement,
Je te préfère à moi-même
Et puis à tout le reste,
En même temps que je te déteste.
Surtout je préfère mille fois
Cette peine lente et douloureuse,
La solitude traversant les nuages
Je préfère ton poignant souvenir
À l'oubli qui surgit du fond des âges ;
Plutôt mourir que d'oublier,
Même si tu m'as fait du mal ;
Peu importe,
Il pleut à Paris, et loin est mon bonheur,
La buée sur les yeux
J'essaye de te survivre,
Comme je peux,
Comme se survivent les âmes en peine ;
À peine perdue,
À peine entière,
À peine.
Et quand l'averse est passée,
Et que le silence revient s'abattre
Sur la ville nimbée de nuit,
Lourd comme un ciel d'orage,
Je refuse qu'on nous dise
À nous
Que l'amour aussi s'apprend,
À quoi bon, dis-moi,
À quoi bon,
Puisqu'il part,
Et qu'il est déjà trop tard
Pour apprendre ;
Voilà qu'il faut apprendre à désaimer.
Tu es parti ce soir et voilà la pluie qui reprend,
Ce n'est pas le printemps,
Non, ce n'est pas le printemps.
Non, je refuse d'apprendre à désaimer ...
· Il y a plus de 10 ans ·Il pleut aussi en ce soir de Mai
akhesa
Oups, c'est très beau, très triste et très beau, très triste très beau,... Apprendre à désaimer.... faut pas... l'amour est toujours au fond de nos âmes et de nos cœurs, sans cela nous ne survivront pas... très beau, très triste...comme la pluie qui tombe sans cesse sur Paris...Kiss
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
Nous ne survivrons pas...oups!
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
"Voilà qu'il faut apprendre à désaimer."... C'est Beau! Des passages vraiment superbes. Merci pour ce texte
· Il y a plus de 10 ans ·Rose Marie Calmet
"Je refuse qu'on nous dise
· Il y a plus de 10 ans ·À nous
Que l'amour aussi s'apprend,
À quoi bon, dis-moi,
À quoi bon,
Puisqu'il part,
Et qu'il est déjà trop tard
Pour apprendre
Voilà qu'il faut apprendre à désaimer."
Ce poème/slam est magnifique. Bravissimo Luz, que de touches de candeurs dans ces grands maux.
mark-olantern
j'adore
· Il y a plus de 10 ans ·Alice Gauguin
Très beau texte.
· Il y a plus de 10 ans ·Marion B