l'instrument

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l'instrument

c'était comme un petit moineau

perdu à travers un bric-à-brac insensé

des gigantesques alambics côtoyaient des souris en peluche

petits pains chauds verres de vin

certains vides certains pleins d'autres qui hésitaient

une balance sur un bloc de marbre et des guirlandes

éparpillées

il y avait même une main

desséchée on l'aurait cru sortie d'un roman

justement des polars bleu sombre étaient ouverts

autour d'un palmier et d'un déshabillé

personne ne l'aurait aperçu

c'était comme un petit moineau un jour d'hiver

qui n'avait ici rien à faire

l'instrument avait un bec un corps

des pieds qui bougeaient parfois

si l'on respirait trop fort

et l'on entendait un vieux bruit de casserole oublié

et le chant de l'alcool à travers les feuilles

un parfum de verveine et de sucre

éparpillé

parmi les ombres qui se croisaient

l'instrument ne volait pas sans plume

il se laissait saisir avec douceur

quand on le touchait on croyait caresser un cœur

qui aussitôt se mettait à vibrer

avec fragilité

comme un petit moineau

on avait l'impression qu'il tremblait

mais ce n'était pas de la peur

il tremblait du court mouvement qu'on avait lancé

comme si un ouragan l'avait emporté

et qu'il était trop tard

et qu'il s'était envolé

alors de crainte de le briser effrayé

c'était comme un petit moineau

on le reposait

parmi tout le bric-à-brac en mouvement

l'instrument s'immobilisait

un silence se propageait le court mouvement

qu'on avait lancé

se propageait

et c'était comme un orchestre qui se mit à rugir

chaque objet chaque ombre d'objet s'éveillait

éparpillé

on se serait cru envahi un jour de rêve

ou comme dans une poésie où les objets se parlent

boivent un verre et finissent par chanter

et danser

debout sur une table grande comme une île

avec son palmier et son déshabillé

et comme un petit moineau se pose

en plume

sur la feuille immense et observe

patiemment

l'instrument

à travers le bric-à-brac en musique

orchestre symphonie accordée désaccordé

regardait

d'un long silence qu'on croyait imaginer

Le 19 décembre © 2010 by LABROSSE Yannick

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