Ma serial loveuse

Stéphan Mary

La jalousie a inspiré de nombreux auteurs. A votre tour cette fois d'imaginer une histoire autour de ce thème fondateur à l'occasion d'un concours organisé avec Transfuge. Mars 2014

Salut toi. Je t'écris à ce moment précis où le jour tombe. 18h le 5 décembre. L'hiver. Les fenêtres en face de chez moi qui s'allument. Ce soir j'attends super flic qui peut-être ne viendra pas, travail oblige.

Ma super flic officier gradée spécialisée homicides mène ses enquêtesde façon très personnelle à l'instar d'une serial loveuse. Qu'est ce à dire ?

La serial loveuse subit sa jalousie à la va comme je te pousse. Elle surveille tout, rempli le chariot d'indices, de témoignages à charge ou à décharge. Puis  elle revient in love. Ou pas ! Mais notre Othello en jupon finit très vite désabusée et somme toute, assez frustrée d'avoir tant perquisitionné pour ne rien trouver.

La serial loveuse peut également prendre les traits de la snipeuse de la séduction. Toujours en planque aux confins du fantasme, elle est prête à dégainer à l'approche de n'importe quel scénario. Masquée derrière son apparence de ne pas y toucher, la jalouse bondit sur sa proie quand cette dernière ne s'y attend pas.

La serial loveuse ne compte plus ses heures d'investigation et peut largement prétendre au titre de championne olympique du no woman's land. Hyperactive, méthodique dans ses stratégies, elle enchaîne ses enquêtes sans compter ses heures. Parfois à la limite de la perversité, elle tend ses filets le soir et les remonte au petit matin.

Et Superflic ? Un rien tordue par excès discret de jalousie ce qui pour le moment m'amuse mais pourrait bien finir par me fatiguer. Crispant parfois mais aussi très curieux. N'étant pas d'un naturel jaloux (soit je m'en fiche soit je m'en vais), j'ai du mal à anticiper. Superflic ne m'a jamais, fort heureusement, fait une scène mais maintenant je reconnais ses silences. Et quand elle se mure, ça m'énerve. Rien de pire que la jalousie silencieuse. 

La jalousie... Quoiqu'il arrive tu subis. Tu subis d'en souffrir et tu subis la crise. Sentiment ? Sensation ? Etat ? Tu subis ! Le white spirit liquide translucide moule la chaussure de Ferdinand de Saussure ! Tout est structuralisme. Pour la jalousie peu importe les mots, ce sont les signes qui priment. La jalousie... maladie sournoise toujours à l'affût. Elle te mange de l'intérieur, anthropophage incandescente qui grince des dents. Sous un ciel bleu azur Saussure dissèque la compréhension du sens. La jalousie... te tord le visage dans des spasmes répulsifs jusqu'à t'avaler les lèvres dans un cri ultime. Cet amour Oh ciel vas cours vole et me venge synapse hypocondriaque ! La jalousie... crée une ambiance malsaine faite de sous-entendus pervers et maladroits. Le plafond s'abaisse, les murs se resserrent jusqu'à creuser la tombe de la relation. Saussure s'engouffre dans le dit du verbe et le non dit du signe. La jalousie... jette le doute sur tout ce qui bouge et même sur ce qui ne bouge pas. Elle est tapie et guette le moindre mouvement, le moindre regard. Saussure le linguiste avait étudié la succession d'indices qui peuvent devenir incendiaires. La jalousie... pour finir par dire je te quitte mais je ne peux pas vivre sans toi. Sur le clapotis d'une rivière une symphonie à pleine bouche. La jalousie... n'a rien à voir avec je t'aime.

Alors super cop dans tout ça ? Simple et complexe à la fois. Elle plaît, elle le sait, elle en joue. Sur le terrain avec son 357 dans le holster, je ne sais pas ce que cela donne mais sur mon terrain, il n'y a pas à dire, elle assure vraiment. La seule chose que j'ai cachée et qu'elle ne pourra jamais trouver, c'est la boîte de Pandore. Je suis allé l'enterrer dans le cimetière des amours mortes. Ainsi ma serial loveuse n'est-elle pas compartimentée dans l'une des cases ci-dessus et sais tu pourquoi ? Parce qu'elle est amoureuse et tient suffisamment à moi pour ne pas dégainer à la première phéromone lâchée. C'est une serial loveuse jalouse qui se contient. Pas déjantée, pas perverse, elle me tient au creux de sa paume comme je l'étreins au creux de mes bras. Ma serial loveuse est une amoureuse jouisseuse de la vie. Ça tombe bien, moi aussi ! 

  • N'hésitez surtout pas à voter ! Pour le moment il y a un bug !mais que j'essaierais de déplanter lundi avec wlw. Il y a en réalité plus de votes et des notes or donc... votez votez votez, mon moral sera au beau fixe! bon we à tutti

    · Il y a environ 10 ans ·
    La main et la chaussure

    Stéphan Mary

Signaler ce texte