Nos voiles seront blanches

hel

Nos voiles seront blanches.

Et grandes si grandes comme on imagine même pas,  ballottées, dressées, éployées à fouetter tous les vents.

Nos mouchoirs de coton dansent sur la ligne d'horizon et quand tu lui souris mon amour, de la suie s'ébat de tes paupières.

Puisque bientôt enfin nous partons, il nous faudra encore gommer ces rides et ces sillons, toutes nos nuits grises de trop de silence.

Nos jours inertes ne seront  plus qu'un souvenir lointain semés sous les pavés de la rue des moulins. Et belles et fortes les pierres qui déjà sous nos pieds, en écho, résonnent familières.

Comme tout se perd si on ne fait pas attention, la faute des mêmes lundis.

Comme on a faillis à force de trébucher sur plus rien et ses habitudes, se casser la gueule pour de bon, la faute des mêmes autres jours.

Mais dans les cartons : des terres d'aventures, quelques bleus légers pour se rappeler nos grands plongeons, et des verts tendres par milliers enrubannés dans leur robe d'enfance. Le vieux cliché d'un cerisier à la balançoire accrochée et toutes les ritournelles apprises sur ses planches.

Aux poubelles : les gris familiers et nos costumes d'habitudes, les tickets de trop de trajets refaits. Les ratés, les gros os restés coincés serrés en plein dans la trachée, poubelle, poubelle, chantent les hirondelles.

Et on peut leur faire confiance, elles qui vous refont tous les printemps, quand même !

 Parce que sinon à collectionner les inventaires de nos ratés, on ne s'en sort plus. Triées nos vies archivées sur papiers formels, triées puis balayées puisque nos voiles seront blanches. Vierges.  Et même vierges majuscules.

Grain à grain, on imagine boussole à la main, ceux qui nous attendent là-bas, homme bûcheron, femme fleur de sel, homme lyre et encore femme caravelle, de celles que j'aime plus que les autres, et qui ont les mains sur les hanches, et des fleurs partout qui poussent les rondeurs. On dessine et on plante  grand soleil sur mer battante, pour s'y laver nos cernes de presque mille ans au feu et au sel. Et puis si y'a rien de tout ça, si on se plante jusqu'à la moelle et même au-delà...

Tant pis.

Nos voiles seront quand même blanches, et grandes si grandes, qu'on s'y nichera dessous, si c'est pas là, alors ailleurs encore, on est lancé à plus s'arrêter, et même si ça nous a pris le temps, maintenant je nous sais capable de dessiner plus grand et plus loin. Je nous sais capables et géants, mains à empiler les grains les plus fins.

Nos mouchoirs de coton dansent sur la ligne d'horizon et quand tu me souris mon amour,  je bois la suie à la source de tes paupières.

Fermées mais légères.

Tes voiles sont blanches,

blanches comme tes ailes.

 Et tes châteaux rêvés sont devenus des déserts.







  • On pourrait presque le lire en chantant, tellement c'est léger et doux ! ;)

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Ananas

    carouille

    • Ah se serait chouette, merci Carouille ;)

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Avat

      hel

  • Y a suffisamment de vent dans ces mots pour les gonfler longtemps les voiles. C'est libre oui. C'est bon. Merci.

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Vie1

    thib

    • Merci à toi c'est sympa de passer par ici dire.

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Avat

      hel

  • On dirait bien que ces voiles vont apporter un vent de renouveau ... Et cela c'est plutôt bien ... Vive le vent du grand large .. Splendide comme toujours MamZ'Hel !!

    · Il y a plus de 7 ans ·
    W

    marielesmots

    • Surtout du grand large ! Merci Marie :)

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Avat

      hel

  • comme une dentelle fine, tissée d'infinie liberté...

    · Il y a plus de 7 ans ·
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    ellis

    • Oh c'est joliment dit, merci :)

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Avat

      hel

  • Infiniment joli ! A lire et relire plusieurs fois !

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Louve blanche

    Louve

    • Merci Louve, contente que cela vous ait plu.

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Avat

      hel

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