#9. ce que disent les silences.
ellis
Il voulait voir l'océan. Jeter son corps dans quelque chose d'immense et d'immuable. Se confronter à la force généreuse et sauvage de ce qui a toujours été là. Se sentir ivre, petit et grand à la fois. Il voulait voir l'océan mais toujours quelque chose l'en empêchait. Un amour, un travail, un départ, une fuite. L'océan reculait. Il voulait voir l'océan et cette nuit-là ce fut la mer. Imprévue. Hypnotique. Cette main qu'il avait tenue longtemps dans la sienne. Ce sentiment de reconnaissance qui l'avait saisi pleine poitrine, comme revenu d'entre les morts. Combien de vies peut-on passer endormi sans le savoir ?
L'espace d'un instant, il aurait pu la dévorer, fondre en elle, tout jeter au feu pour le feu de son corps. Il aurait pu s'abandonner et il s'abandonnait. Quelque chose d'inouï le prenait tout entier, faisait tourbillonner son sang dans une danse d'indien, des mots dans les oreilles qu'on connaît depuis mille ans sans en comprendre rien. Ils dansent dans nos veines et nous disent l'amour, le don, la dissolution. Le tremblement sans fin, comme un cri qu'on voudrait rire et pleurer à la fois. L'espace d'un instant, il aurait pu l'emporter loin loin et brûler avec elle.
Mais alors, il lut dans ses yeux de rivière que l'incendie n'aurait pas lieu cette nuit. Il lut que déjà il était allé brûler trop loin et il sentit venu de nulle part un désir poignant de la protéger, elle. Il lut qu'il fallait seulement la couvrir, lui donner de la chaleur, et ne pas l'entraîner plus loin. Il lut que son front portait le désespoir de ceux qui sont juste au bord d'un choix terrifiant. Et qu'il n'allait pas y creuser en plus un sillon qu'on n'effacerait jamais.
Cette nuit, la reconnaissance fut si grande que, penché au-dessus d'elle, reprenant son souffle entre deux baiser-volcans, il caressa son visage, plongea dans le mystère de ses grands yeux rivières, y trouva une confiance miracle qui attendrit tout en lui. Il embrassa ses lèvres. Ses paupières. Calma sa respiration brûlante avant de rouler doucement près d'elle. Elle n'opposa pas la moindre résistance, elle le suivait, dans chacun de ses cheminements. Du regard, du corps, elle le suivait. Elle savait ce qui était en train de se produire. Quelque chose en elle comprenait sans comprendre. Elle enfouit alors son visage contre sa poitrine, le laissant la serrer, la serrer, et leurs peaux se parlaient encore cette danse d'indien qui raconte la vie sous l'écorce, l'immensité de la nuit et la bienveillance qui étend sa main tendre sur nos corps sans rien dire.
"Combien de vies peut-on passer endormi sans le savoir ?" oui, fort, et juste, ou tout en faisant mine de ne pas savoir, c'est bien de bout en bout, cette réserve aussi, bien vue, ça laisse les choses grandir doucement, ça laisse prendre la mesure de ce qu'il y a dans leur tête, ils sont attachants, les deux, dire qu'il ne me reste plus qu'un bout...
· Il y a plus de 9 ans ·hel
du top, comme toujours!
· Il y a plus de 9 ans ·dreamcatcher
merci toi !
· Il y a plus de 9 ans ·ellis
j"en connais une qui maîtrise aussi la technique narrative. Et pas que sur un seul texte en plus... ;-)
· Il y a plus de 9 ans ·bravo.
wic
;) merci msieur. il continue de s'écrire celui-là, et c'est comme une parenthèse au milieu des autres, j'ai eu un doute sur le rythme et l'emploi du passé, mais bon, il s'est écrit comme ça, alors...
· Il y a plus de 9 ans ·ellis
waoh tu cartonnes c'est superbe bravo !
· Il y a plus de 9 ans ·Christophe Paris
merci beaucoup !
· Il y a plus de 9 ans ·ellis
Tellement, mais tellement beau...
· Il y a plus de 9 ans ·ella
merci beaucoup...
· Il y a plus de 9 ans ·ellis
Magnifique, comme toujours...
· Il y a plus de 9 ans ·benkei
merci...
· Il y a plus de 9 ans ·ellis
C'est splendide, tout simplement splendide. Merci.
· Il y a plus de 9 ans ·Joshua D.
merci à vous (vais commencer à rougir moi)
· Il y a plus de 9 ans ·ellis