Quel cinéma !
floriane
Il est vingt heures trente-huit.
À peine la porte refermée derrière-nous, Nicolas m'attrape la main.
-Viens vite !
Il m'entraîne fissa là où il veut aller.
Sur le canapé du salon.
Nous descendons à la volée les marches de l'escalier en bois. Je manque de m'écrouler quand ma chaussette dérape sur la dernière marche.
-Doucement ! dis-je en ne pouvant retenir un éclat de rire.
-Certainement pas ! J'ai trop envie de toi !
Il me plaque contre le mur du salon, sans plus de douceur malgré ma réclamation.
J'enfonce mes doigts dans ses cheveux bruns, coiffés à la brosse. Il attrape ma lèvre inférieure avec ses dents, férocement, avant de prendre ma bouche comme un assoiffé se jette sur un verre d'eau après une intense activité sportive. Haletant, Nico joue de sa langue afin de se rassasier.
Je place une jambe autour de sa hanche. Il soupire d'impatience. Il passe un bras sous mon tee-shirt informe et d'un geste presque parfait, détache mon soutien-gorge. Il continue ses arabesques linguales dans ma bouche humide. Un truc désagréable m'érafle le dos.
Nous sommes comme deux adolescents qui se retrouvent après une longue semaine de séparation, avides l'un de l'autre, chauds comme la braise. Comme au cinéma, nous nous collons comme deux aimants réunis par la force de la passion ! Ardents corps qui de ne demandent qu'à être apaisés. Putain de bordel de merde ! C'est ma culotte qui est humide comme ça ? La vache, il semblerait que je n'ai pas fait l'amour depuis des jours et des jours !
Alors que Nico se frotte à moi dans un déhanché qui n'a rien de chaste, je remarque que le plafonnier du salon s'allume, puis s'éteint, puis se rallume, dans un effet de stroboscopes de boite de nuit. Ah mais c'est ça qui m'emmerdait depuis tout à l'heure !
-J'ai l'interrupteur qui me rentre dans la peau ! j'arrive à prononcer entre deux baisers.
Seul un grognement s'échappe des lèvres de Nico. Ni une ni deux, il me soulève et me porte jusqu'au canapé.
-Aïe, putain !
Un Légo rouge au sol. Il grimace.
-Allonge-toi ! je lui enjoins, d'une voix autoritaire.
J'ai bien l'intention que d'ici quelques minutes, il grimace de plaisir entre mes doigts et non plus de douleur. Je m'installe sur le bout du canapé et prends son pied dans mes mains. Je prendrais le mien après, mon pied, chaque chose en son temps ! Je dépose de doux baisers sur son orteil, rougi par le jouet, en lui caressant la cheville.
Nico se redresse, déjà lassé par mon massage sur sa voute plantaire. Il me place sur son ventre et fait passer mon tee-shirt par-dessus ma tête (je ne devrais pas le dire mais le tee-shirt est un de mes vêtements d'ado que j'ai malheureusement gardé, floqué d'une Mariah Carey belle à damner, un décolleté à se faire exploser les yeux). Ne faut pas s'étonner qu'il l'enlève si vite ! Comment rivaliser avec cette bombe qui pavane, immobile, devant ses yeux brillants d'excitation ? Avec mes bourrelets, mes vergetures, et mon soutif (plus banal, tu meurs), il est certain que la balance penche du côté de la diva. Garce !
Pour l'heure, Nico fait valser mon protège-mamelons dans un coin du salon. Il atterrit malencontreusement sur Chacha qui, comme son nom l'indique, est notre chat. Il se débat en remuant des quatre pattes pour s'en débarrasser. Malheureux minou ! Contrairement à l'espèce humaine, il n'a pas l'air d'apprécier de jouer avec ce bout de tissu. Une fois délibéré, il disparaît dans la cuisine, les poils hérissés jusqu'à l'extrémité de sa queue.
Je me penche vers Nico, un sourire aux lèvres. Torse nu, au-dessus de lui, je me sens reine. J'ai tellement envie de lui que je ferai bien l'impasse sur les préliminaires. Du bout de mes doigts, je dessine la forme de son visage, du front en passant par les tempes pour finir sur ses lèvres rougies par nos baisers. Je balance mes hanches de gauche à droite dans un frotti-frotta coquin. Il se redresse d'un iota pour enlever son tee-shirt. Alors que je défais le bouton de son jean, regard langoureux à l'appui, le téléphone se met à sonner.
-Mais c'est pas vrai ! ronchonne-t-il, agacé.
-Laisse sonner. C'est pour des moments comme ça que le répondeur a été inventé !
Après sept sonneries, la voix de Patricia, ma belle-mère, résonne dans la pièce :
« Oui, c'est moi. Y'a quelqu'un ? Je vais partir de chez ma sœur là. C'était pour vous prévenir que j'allais passer chez vous pour vous donner quelques salades et quelques poireaux du jardin. J'arrive dans dix minutes. À tout de suite ! »
NON !
Dans un bond de folie, les seins à l'air, je quitte le torse chaud de mon mari et saute littéralement sur le téléphone. À bout de souffle, je dis :
-Patricia ! Oui. Non, non... Nico est malade, il est couché depuis qu'il est rentré du travail… oui, passez plutôt demain. Ok. Bisous Patricia. Bonsoir à Michel.
Je raccroche et me tourne vers Nico. Il sourit. Ravie de mon petit mensonge, pas le moins du monde gênée d'avoir menti à la mère de mon mari, je le rejoins. Il y a des moments où les mensonges mériteraient une médaille. Ou un trophée pour la victoire sur tous les emmerdements qui t'empêchent d'aller au bout du plaisir en compagnie de son homme.
-À nous deux, maintenant ! me prévient-il.
Il s'assied sur le canapé pour me permettre de m'immobiliser entre ses jambes écartées. Il pose sa bouche contre mon ventre. Il lèche, agace, taquine mon nombril. Je soupire en laissant aller ma tête vers l'arrière. Hum… quel délice. Continue, continue…
Il fait descendre mon pantalon jusqu'à mes pieds. Il jette un œil rapide à ma culotte (un vieux modèle en coton que j'adore porter après une bonne douche) et la retire prestement. Eh oui, je ne porte malheureusement pas 7 jours sur 7 de la jolie lingerie à plus de 100 € de chez Simone Pérèle comme dans les films et les romans. Non, non, dans la vraie vie qui est la nôtre, on porte ce qui est propre et c'est déjà pas si mal !
Enfin, nous passons aux choses dites sérieuses. Rapidement, j'enlève mes chaussettes pendant que Nico se débarrasse de son jean. Ce n'est ni glamour ni sensuel mais là, l'envie devient pressante et impérieuse. Putain, est-ce que je vais réussir à faire l'amour à mon mari ?
Je chevauche mon homme, pore contre pore, sexe contre sexe. J'oublie tout ce qui n'est pas nous. Oublier le boulot de la journée, oublier la table à débarrasser, oublier le linge à repasser, oublier la gamelle du lendemain à préparer, oublier tout. Tout. Tout sauf les caresses indécentes de Nico sur la moindre parcelle de mon corps, tout sauf ses baisers tantôt doux, tantôt ardents, tout sauf la dureté de son membre dressé pressé contre l'entrée de ma grotte féminine, tout sauf mon cœur qui bat, tout sauf mes sensations exquises qui traversent toute mon intimité, tout sauf le désir qui irradie mes tétons offerts…
-Maman ! J'arrive pas à dormir !
La voix de mon fils, 4 ans, file à travers les nimbes de mon désir de femme pour parvenir enfin à mon cerveau de mère.
-Putain, s'insurge Nico. C'est du cinéma qu'il fait !
-Désolée, chéri. Quand ça veut pas, ça veut pas… J'arrive, mon bébé ! je reprends très vite, à l'adresse de Mathéo, qui piétine en haut de l'escalier. Deux petites secondes…
Je renfile mes vêtements à la vitesse de l'éclair, en sautillant sur place. Ma vieille culotte, mon pantalon et mon tee-shirt informe. Mon soutien-gorge n'est plus en vue. Chacha a dû le finir par le prendre d'affection.
Non, faire l'amour dans la vraie vie, ce n'est pas véritablement comme au cinéma. D'ailleurs, je viens de me souvenir que dans les scènes d'amour sur petit écran, les femmes n'oublient jamais de se raser les jambes et dans la plupart des cas, n'ont pas deux enfants qui sont censés faire de beaux rêves à l'étage…
2014 © Floriane Aubin
Excellent!!!! Bravo, tu mêles tout à la fois, comme exactement tout ce qui se passe dans la "vraie vie" :)
· Il y a presque 10 ans ·dreamcatcher
Merci !
· Il y a presque 10 ans ·floriane
Superbe scène très bien décrite ! Je ne vois qu'une solution: le prochain coup, mettez vos gosses et le chat en garderie chez la belle-mère. Faut ce qu'il faut !
· Il y a presque 10 ans ·astrov
Quelle bonne idée ! :-) Je n'y avais pas pensé !
· Il y a presque 10 ans ·floriane
Vive les belle-mères ! ;-)
· Il y a presque 10 ans ·floriane