Rédemption

Je suis enfin libre, en paix. 
Il est l'heure de réanimer le silence.
J'ai exhumé, pour l'occasion, les plus purs souvenirs de ma mémoire,
Je me suis attelé à raviver minutieusement la couleur des visages estompés,
Retraçant leurs contours, illuminant leurs sourires.
J'ai tamisé les plaies enfouies dans la terre et le sable pour en extraire l'or en particules de soleil,
Et puis j'ai ressaisi, sans les briser,
Toutes ces mains tendues, paumes vers le ciel.
J'ai connu, à vos côtés, la beauté éthérée, la grâce immédiate et la douleur abyssale.
J'ai dû, pour survivre, refabriquer l'intérieur de ma propre planète,
J'y ai creusé les gouffres et les cratères qui devaient me conduire en enfer,
Mais c'est le paradis que j'ai trouvé dans ses failles,
Et me voilà irradiant, spectral parmi les anges,
Vous êtes tous là, avec moi, ancrés, scellés, dans les moindres recoins,
Vous me perforez et vous me transpercez, de votre voix, de votre amour.
Une minute de votre présence aura suffit à rendre supportable le calvaire infini de vivre.
Vous, que j'aime par-delà les indicibles barrières de ma peau mutilée, 
Je veux vous dire merci.
Et, vous autres qui m'avez connu vaincu et couché,
Qui avez pleuré contre moi,
Qui êtes hélas partis,
Je veux vous dire pardon.
Car, même si je me rêvais étoile dilapidée en supernova,
Je ne fus qu'une boule de feu toxique et asphyxiante,
Avalant la lumière de se savoir mourante.
Et parce qu'il n'est pas encore assez que de s'éteindre,
Il faut aussi vous oublier, vous abandonner,
De crainte de vous emporter avec moi, dans ce tourbillon de l'agonie,
Vous, les astres que j'ai aimés par-delà l'espace et le temps.