Retour en Bretagne

sophie-copinne

( pas inédit, déjà posté sur un autre site)

C' est la première année qu'elle est venue seule. Depuis la perte de Stéphane, il y a trois ans dans cet accident, elle ne voulait plus entendre parler de cette maison qui avait été le témoin de leur bonheur.

Elle s'est arrêtée face à l'océan, deux rues avant celle où sa demeure l'attend. Elle est bloquée depuis plus d'une heure dans sa voiture, incapable de faire les derniers mètres pour ouvrir les volets et poser ses affaires.

Pour se donner la force, elle décide de prendre un grand bol d'air en marchant le long de la plage. Au bout de sa promenade, elle arrive à la pointe de Pen Bron. Elle s'arrête, se couche sur le sable fin, ferme les yeux, écoute le bruit des vagues, sent la chaleur du soleil effleurer son corps.

La fatigue du voyage se fait sentir, elle sent le sommeil et se laisse aller.... La voilà, sur la plage, avec sa famille, comme tous les étés. Elle met le parasol en place, pour protéger la glacière, installe les serviettes pour que les enfants s'y installent quand ils sortiront de l'eau.

Comme tous les matins, Stéphane est parti sur le port pour voir les bateaux rentrer de la pêche, chercher celui d'Henri, avec qui il a sympathisé au fil des années, à force de lui acheter le sardines et les maquereaux pour le barbecue du soir. Il aime la mer Stéphane, ça lui rappelle son enfance dans son île de l'Ocean Indien. Bien sûr, le climat de Bretagne n'est pas aussi bienveillant, mais ça sent bon les embruns.

Depuis dix ans qu'ils on acheté cette maison, les étés sont doux, c'est leur petit coin de paradis, les enfants retrouvent leurs amis à l' école de voile, Stéphane ses amis pêcheurs , et elle, ses livres entassés tout au long de l'année avec le rêve de les dévorer. Ça sent bon le bonheur.

Elle entend les enfants chahuter, courant vers elle avec le pari d'arriver le premier. Comme toujours c'est Vincent qui gagne, il meurt de froid,  s'emmitoufle dans sa serviette, il vient se coller à elle pour qu'elle le réchauffe." Plus fort maman , frotte mon dos , elle est trop froide l'eau, mais c' est si bon ! " Juliette arrive, elle aussi grelotante, elle rejoint la tribu, se blottit près de son grand frère qui, à son tour, l' enveloppe de ses bras et de chaleur.

Les voilà tous les trois allongés sur le sable, le soleil brille et réchauffe leurs corps. Ils savent qu' il ne va tarder à les rejoindre avec le pain qu'il aura acheté au passage. Elle aime ce moment, quand, tout doucement, il se love doucement près d'elle sans bruit pour profiter de ce doux moment avant que les enfants ne viennent se jeter sur eux et chahuter.

Ah! Ca y est le voilà! Alors elle ouvre ses yeux pour s'amuser de le voir à ses pieds, en train de la chatouiller. Mais la réalité la rattrape, un petit crabe bien vivant faisant la nique à ses orteils. Elle se lève précipitamment, personne autour d'elle, juste ce goéland qui reprend son envol.

Elle est prête. Il est temps maintenant d'aller ouvrir les volets bleus et de laisser entrer de nouveau la lumière dans cette maison, sans lui, le retour à la vie.

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