A bout d'amour

sugar

- Vas t’en, j’ai pas besoin de toi.

- Léna..

- Casse toi j’t’ai dis !

Je vibre, j’veux qu’il s’en aille. J’peux me débrouiller. J’suis plus une gamine. Il m’énerve. Et puis son foutu regard si doux, qu’est-ce qu’il peut m’agacer ! J’ai toujours aimer ses yeux, j’m’y perds souvent, dans leur vert bouteille, j’suis comme un message a la dérive.

- Et puis qu’est-ce que t’as a me regarder comme ça Etan !

Il s’assoit par terre et relève la tête doucement, il me regarde, encore, encore. J’en peux plus, il le voit mais il fait rien.

- J’attend. Murmure-t-il calmement.

- T’attends quoi au juste? Tu crois que j’suis folle, je le sais.

Un éclair traverse ses yeux, j’vais le faire craquer, il va s’énerver, avec un peu de chance.

- Je suis fou de toi. Là est la différence.

Je lève les yeux au ciel, loupé. Il sourit, il me tape sur les nerfs. Je continue a m’affairer, je vais faire comme si il était pas là, j’ai pas besoin de lui. J’suis pas folle. Il grogne.

- Il commence a être tard, tu n’as pas faim?

Je le regarde interloquée.

- Manger? Tu vois pas que je suis occupée ?! Ou tu viens juste pour faire chier ! Quel futilité ! Il faut que tout sois fini, il le faut.

- Pourquoi Lena? Pourquoi il le faut?

J’aime pas ses questions. Elles me gênent. Je sais où il veut en venir et moi j’veux pas y aller.

- C’est comme ça que ça doit être. C’est tout. Tu m’emmerdes avec tes questions.

- Mais c’est pas comme ça que c’est. Tu le sais. Souffle-t-il.

Je sens mes doigts se resserrer sur le pinceau, je vois mes jointures devenir blanche, je suffoque, ma respiration m’échappe, je veux pas qu’il le voit. Je m’affaire sur mon petit coin de mur comme si de rien n’étais, je ne dois rien laisser paraitre. Je me redresse.

- Si tu as faim, tu n’as cas faire réchauffer quelques chose. Je mangerais plus tard.

J’ai réussis a contrôler ma voix, je suis fière de moi, je m’améliore. Bientôt il ne verra plus. Il me laissera tranquille. J’ai beau me concentrer sur mon pinceau je sens son regards me bruler la nuque, j’attends, je sais qu’il cherche ses mots, il a peur. Cinq bonne minutes passent, j’en oublie presque sa présence. Comme d’habitude. Enfin presque.

Il se lève brusquement.

- Putain tu me fais chier ! Vas y crie ! Hurle ! Pleure ! Griffe moi ! Fais quelques choses Léna ! Te laisse pas sombrer comme ça ! Me fais pas ça, pas a moi, t’as pas le droit, pas âpres tout ça. Ca va faire cinq mois maintenant, tu entends? Cinq mois ! Je t’ai vu te casser la gueule, te recroqueviller et j’ai rien pus faire, des fois t’es comme une coquille vide et j’veux la remplir de vie cette coquille comme avant mais j’peux pas, tu me laisse pas t’approcher, te parler, et tu t’enfermes des heures dans cette pièce, a repeindre encore et encore, tu attends je ne sais quoi, qui n’arriveras pas et moi j’suis là comme un con a te regarder et je cherches des saloperies de mots qui viennent pas, ceux qui te feront me regarder, qui t’ouvriront a moi, qui dévoileront ce sourire que j’aime tant, j’ai l’impression que ton rire a disparut, ils me manquent, ton corps me manque, tu me manques j’ai comme un couteau planté dans le cœur et j’arrive pas a l’enlever, mais je trouve pas ces mots et je suis tout seul. Même quand t’es là j’suis tout seul. Moi aussi j’ai mal. Et j’ai mal tellement je t’aime que je m’étouffe !

Ses mots déferlent sur moi, je le regarde hébétée, comme si je le voyais pour la première fois depuis des mois, il est essoufflé comme si il lui avait fallut toute sa force pour me sortir ses quelques mots, je ressens sa rage, et ses yeux, ses yeux sont fiévreux de douleurs, ils me brulent, me transperce de part en part, ils me tétanisent de leur souffrance, je ne l’avais pas vue.

Le pinceau s’écrase par terre, il m’éclabousse comme ses mots. Il aurait pas dut les dires, ou alors il aurait dut les dires y a longtemps. Je sais plus, je me brise. Je sens chaque partie de moi, chaque membres, je sens tout, je m’effrite. Je supplie du regards, j’ouvre la bouche mais rien ne sors, j’essai de lui dire que ça fait mal mais je crois qu’il le voit dans mes yeux. Je brule, je m’enflamme de douleurs, ça part de mon ventre pour se refugier dans tout mes recoins, ça brule tout. Je me casse. Je m’affaisse. Je suffoque, m’étouffe, je trouve plus l’air, je trouve plus le chemin. Je panique. Je tremble, mes jambes se dérobent sous moi, j’arrive plus a me contrôler, je sens les larmes me bruler la peau et a travers je le vois qui accourt, je sens sa peur, sa douleur, elles me contaminent. Mon ventre se tords. Mon ventre. Je pleure. Et j’ai mal putain j’ai mal, comme si on m’avait arraché tout espoirs comme si il ne restait rien.

Mais il est là lui. Je sens son corps se serrer au miens. Il me glisse dans son étreinte, m’encercle de ses bras, et me sers, fort, comme jamais. Il me porte, a bout de bras, a bout de souffle, a bout d’amour et il souffre. Je me débats. Je hurle. J’essai de le mordre. De lui faire mal comme j’ai mal. Et là dans mon univers tout noir je l’entends, il chante. Sa voix commence faiblement puis s’affirme comme je me calme, elle s’élève dans cette pièce, cette pièce. Mes tremblements se calme, j’ai l’impression d’être vidée de mes forces, je sens son souffle dans mon cou, j’ai froid maintenant. Je regarde béatement le mur et j’écoute, il me berce. Il aurait été un bon père.

La chanson est fini, on est recroquevillé l’un sur l’autre. Je fouille en moi pour trouver la force de parler. Je cherche les bon mots, cette fois c’est mon tours.

- Il me manque.

C’est tout ce que j’ai trouvée. Il ressert son étreinte. Il faut que je lui dise.

- J’crois que c’est de ma faute, je sais que c’est pas vrai au fond mais c’est ce que je ressens. J’ai l’impression de pas lui avoir donné assez de force pour qu’il vive plus de 5 heures ou d‘avoir fait quelque chose de mal. C’était les plus horriblement belle heures de ma vie tu sais. J’aurais voulu que ça dure toute ma vie. Toute notre vie. Mais tu sais des fois j’me dis qu’on lui aura donner tellement d’amour en 5 heures que même si son petit cœur n’avait pas lâché il aurait fait une overdose. C’est con. Il avait tes yeux. J’m’y perdais tout pareil que toi. Il était comme mon océan, infini. Mais je sais plus comment on fait pour vivre Etan, j’ai oubliée. J’essai mais j’y arrive pas. J’suis toute endolori de partout. Ca m’fait mal de vivre. Sauf là. J’ai pas mal. C’est peut être tes bras. Ou ta voix. Ou tout simplement toi.

Il me mordille de baisers. Ca faisais longtemps, avant je les sentais pas, je ressentait rien, sauf aujourd'hui, j'ai ressentis. Et on reste assis, recroqueviller pendant des heures a parler. On parle beaucoup de lui. Mais aussi de nous. Et je souris, enfin.

Signaler ce texte