A la recherche du taon perdu

antoine-lefranc

Quand Antoine débuta l’écriture, nombreux étaient ceux qui pensaient qu’il décrocherait le Goncourt, apparaîtrait régulièrement sur les plateaux télés et porterait des chemises déboutonnées comme BHL. Au final, ces gens avaient raison uniquement sur les chemises.

Pourtant, tout n’avait pas si mal commencé : pris de passion pour l’écriture un soir où sa Game Boy refusait de s’allumer, Antoine entreprit aussitôt d’écrire une suite à Guerre et Paix, intitulée Sel et Poivre. Il abandonna au bout du deuxième paragraphe, et s’attela à la conception de nouvelles désopilantes sur le thème des voyages ferroviaires (Chroniques du train-train quotidien, éditions LEP, novembre 2013).

Désireux de se se voir apposé le qualificatif d’auteur éclectique (Il ignore toujours le sens exact de ce mot, mais il trouve la sonorité de ce dernier décidément très drôle), Antoine, entre des hautes études bassement commerciales et des expériences d'un homme douche ("one man shower" en anglais), écrivit une histoire de pirates à destination des 9-13 ans (Le Trésor de Sombrecoeur, Bayard Presse, 2013).


« Antoine, tu as de l’or entre les doigts », lui avait un jour dit son épicier, son unique ami et lecteur. Hélas, il ne parlait pas de la qualité de sa plume, mais de la truffe blanche qu’Antoine tenait dans sa main droite. Désireux de se faire de nouveaux lecteurs plus attirés par les bons mots que par les beaux champignons, Antoine se frotta au web 2.0 sur WeLoveWords. Il fut parmi les heureux lauréats de deux concours (Recueil « Peurs sur la ville », Storylab, octobre 2013, Storylab », (Vrai meurtre pour fausses notes », Neowood, septembre 2013).

Hélas, tous ces petits succès lui montèrent à la tête. Il ne sombra pas dans la drogue, ni l’alcool, ni la lecture du Figaro littéraire, mais il développa une assurance qui lui fut fatale. Un jour qu’il participait à un concours de biographie sur Welovewords, il eut la folie de déclarer que lire Proust, c’était comme manger un gâteau au Nutella recouvert de chantilly et fourré à la guimauve : une phrase suffisait à frôler l’indigestion littéraire. Dès lors, les éditeurs, horrifiés par sa conduite, lui fermèrent leurs portes, son dévoué épicier refusa de le servir et jamais il ne connut le plaisir de se faire démonter par le Masque et la Plume le temps d'une émission. Depuis Antoine a abandonné la littérature pour  l’entomologie, ou science des insectes : il est à la recherche du taon perdu.   

NB : cette biographie est une pure fiction : je n’ai jamais tenu de truffe en main.  

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