Billet d'humeur - After (no) work - 11

petisaintleu

Cette semaine, j'ai fêté ma première année de chômage. J'aurais bien invité mon conseiller Pôle Emploi, mais je ne l'ai jamais rencontré. C'est donc seul que je me suis descendu mes bouteilles de Champomy et de cidre Loïc Raison à la framboise, plus de 4 degrés quand même. Il ne faut pas exagérer. Je n'ai pas eu le courage de ressortir mon costume. Je craignais que la naphtaline ne me donne des haut-le-cœur. J'ai préféré garder mon survêtement et mes chaussettes blanches avec des bandes bleu et rouge.

Il faut croire que les hoquets permirent de reconnecter mon cerveau à mon cervelet. Oui, c'est bien connu, le chômeur est un écervelé qui passe ses journées vautré dans son canapé, connaissant sur le bout des ongles toutes les répliques d'Un cas pour deux et de Derrick (bien que personnellement, je préfère la musique du générique). Mais, a priori, il reste un animal social et il a besoin de relations humaines. Toutefois, comment en avoir quand la libido est en berne et qu'il n'est plus possible de cirer des pompes ou de brosser son n+1 dans le sens du poil (oui, la mode des hipsters est passée par là) ?

Pourtant, ce ne sont pas les collègues qui manquent. Quand je me promène dans les rues de Paris (après avoir regardé Un cas pour deux, bien évidemment), je les reconnais à cent mètres. Il faut dire que se balader avec une cigarette au bec, loin des Tuileries, du jardin du Luxembourg ou du bois de Vincennes et en jogging, ce n'est pas discret. Pris de compassion pour ces âmes en peine, je pris l'initiative de leur proposer de sortir du bois pour reprendre le chemin de la vraie vie. J'aurais pu organiser un concours de selfies sur Facebook, mais je craignis que les faces blêmes ne soient pas photogéniques. Je me refusai de créer un blog pour dévoiler les meilleures astuces et améliorer sa visibilité sur les réseaux sociaux. Je suis gentil, mais chacun pour soi et Dieu pour tous. Je ne vais tout de même pas étaler les trucs qui me permettent, la preuve, vous me lisez, de faire exploser le nombre de mes contacts et qui me font espérer, Jean-Claude Duss en transition professionnelle, de retrouver la voie vers la machine à café.

Comme vous le savez (je parle là aux quadras et plus), l'explosion des sites de rencontre a mis à mal les discothèques. J'ai donc pu négocier la location pour un mardi soir d'une boite de nuit qui eut son air de gloire à la fin des 70's, le Ringopolys qui, comme son nom l'indique, est tenu par l'ancien mari de Sheila. Pour dix euros, l'entrée était offerte avec un verre d'alcool et un Tranxene. Je n'étais donc pas inquiet d'avoir promis le passage de Bill Gates aux environs de trois heures du matin. Je me dis que tout le monde serait dans un état semi-comateux. J'avais proposé à mon beau-frère, Jean-René, vice-champion de France des sosies, de passer.

J'avais également fait venir des professionnels à la recherche de talents. Le directeur commercial de Tuppeterroir était là, offrant des postes de VRP exclusifs pour écouler son stock de shakers à mayonnaise, non garantis sans parabène. 5e Roue Logistic était également présente. Le responsable fut ému des paroles de Vali, un Roumain, quand il lui déclara être sur le bord de la route depuis cinq ans. Il lui proposa de lui faire voir du chemin, moyennant cinq cent euros par mois. Que demandait le peuple ? Le directeur financier de Pigmonlion ne se présenta pas. Le lendemain, quand je cherchai à le contacter à son bureau, on m'informa qu'il avait disparu dans la nature. Je n'étais au courant de sa fibre écologique.

Fort du succès de cette première sauterie, je pense que je vais pouvoir enfin réaliser mon rêve et me mettre autoentrepreneur. Avec un ami néerlandais, nous avons l'idée de créer la première société d'intérim ouverte 24/24. Pour cela, nous comptons créer une vitrine où serait présentée une large gamme d'électriciens, de soudeurs et de grutiers. Pour être dans le vent, nous mettrons à disposition des salariés des vélos hollandais.

En conclusion, il n'y a pas de fatalité. Quand on veut, on peut. Alors, on arrête de se plaindre et on se remue. C'est promis. Demain, je me lèverai à 9 heures. Après ma partie de PS4 (c'est pour cela que je dors aussi en survêtement), je me métamorphoserai.

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