Les vieux qui allument !

Michel Chansiaux

Une giclée de vie offerte par des musiciens jouant leurs dernières mesures et fumant leurs ultimes Havanes. Pour toutes oreilles !

Buena Vista Social Club. Combien de fois ce disque m'a t-il sauvé ? Je ne saurais le dire ! Cependant, c'est un adieu, un ultime cri de types en sursis, une énergie du dernier espoir. Abattu de fatigue, écœuré par la bassesse humaine, dégoûté par la fausse modestie et l'arrivisme des peoples, ou simplement las de tout et de rien, je n'ai que ce remède immédiatement efficace : Filer à la Havane, rejoindre les musiciens Ry Cooder et Juan de Marcos González et aller de quartier en quartier, en quête de nouveaux « campesinos ». Ces vieux coquins, musiciens accomplis, fumeurs de Havane, citoyens ordinaires, sapés comme des milliardaires, explosent de vie par tous les pores de leur peau ou chaque note de leur instrument. Le mix de leurs enregistrements de 1996 par Wordl Circuit avec des extraits des concerts donnés à Amsterdam et à New-York en 1998, constituent la trame musicale du célèbre film éponyme de Win Wenders. Aujourd'hui, le disque caracole toujours dans les « bacs » des bars, boîtes, bals et autres lieux de sensuelle perdition. « Me gusta seguir guarachando (me quemo aé). Je veux continuer à danser (je me brûle) Ay, Candela me quemo aé mama ! Ay Bougie, je me brûle maman » se languit le chanteur. Mais c'est aussi ce genre de musique qu'affectionnent les gamins dans une pyjama partie, les grand-mères en deuil, les camionneurs somnolents, les infirmières de nuit ou à diffuser dans l'espace pour d'autres civilisations montrant ainsi la face idéale que Dieu voulait nous donner.

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