Délirette

Voici monsieur Goutatou, expert en goûtages.

Feuilles en branche, miettes de thon, herbe verte et bigoudis.

Je ne vous cite là que du « très peu » car la liste est infinie de ce qui lui est passé par les papilles.

Monsieur Goutatou vit à la mer - ce qui n'entre pas du tout dans le cadre d'histoire que je me suis fixée en participant au concours mais je m'en fiche ! Je déteste les cadres avec leurs coins aigus dont on ne peut même pas faire de gelée.

Donc, monsieur Goutatou habite en bord de mer.

Il a mâchouillé des coquillages, des algues sèches et des mousses d'écume qu'il a longtemps pris pour de la chantilly.

Du sable aussi, dont les grains minuscules lui ont, un temps, fait penser au sel fin sauf qu'eux ne fondaient pas et, en plus, lui faisaient la bouche pâteuse et un poids sur l'estomac.

Le sable c'est très dur à digérer, croyez-en son expérience.

Monsieur Goutatou n'a pas d'amis, non –ce qui m élimine carrément et sans rémission du concours que j'aurais, comme tant d'autres, aimé gagner-

Il n'a pas d'amis car il les a mangés.

Tous ! TOUS vous dis-je !

Par petits bouts.

Il a mangé son poulpe fluo, celui-là même que le père Noël lui avait apporté…à Noël, bien sûr.

Il en a fait ses repas d'avant-nuit, effilochant une à une les tentacules de l'octopode et les réduisant en spaghettis avec une dextérité frôlant le professionnalisme.

Deux mois qu'il a mis pour l'ingurgiter, la bestiole tricotée avec amour –et des aiguilles- par madame Noël.

Ça l'a occupé jusqu'en février.

HHHHaaaa, février…

Février…

Après avoir guigné -pendant les deux mois au court desquels Octopuce est passé de vie à trépas- le cacao pelage du second cadeau de l'homme à la hotte, monsieur Goutatou l'a sournoisement entamé par le dessous.

Oui, le dessous de la papatte droite.

Il l'a grappillé, arrachant, l'auriculaire levé, les petites peluches pourtant serrées serrées dont il était tissé.

Il l'a dégusté pendant trois mois, le Teddy chocolat.

Au petit déjeuner.

Oui, vous aurez compris, j'espère, le second cadeau c'était un p'tit nounours.

Mai

Mai

Mai

En mai, il s'est mis à la diète.

Oui, trois mois de cabosses broyées lui avaient un peu détraqué le foie.

Monsieur Goutatou ne consomma, pendant ce laps de temps, que de la tisane.

De la tisane amie bien sûr puisqu'il n'ingère que ses amis (c'est précisé en début de texte -pour les éventuels étourdis qui auraient perdu le fil de mon histoire).

Août le trouva exsangue et amaigri, grigri.

Presque vidé de tout, toutou.

Ses amis partis en vacances –moi je les comprends vu le sort peu enviable qui les guettait- il dût se résoudre à gober des vers de terre.*

Certes, la forme lui rappela les spaghettis dont il s'était régalé pendant soixante et un jours mais la terre dont ils étaient assaisonnés lui resta sur l'estomac (et il faut laisser Thomas tranquille, des foies** !).

Alors, il se remit à la tisane, en buvant des litres et des litres jusqu'à retrouver sa ligne et ses copains revenus de villégiature (faut pas exagérer non plus, faut bien qu'il se nourrisse mon zéro).

Décembre arriva …

Etaient passés de vie à l'estomac ( laisse Thomas pour les pointilleux) :

« Un frigidaire

Un joli scooter

Un atomixaire

Et du Dunlopillo

Une cuisinière

Avec un four en verre

Des tas de couverts

Et des pelles à gâteaux

Une tourniquette

Pour faire la vinaigrette

Un bel aérateur

Pour bouffer les odeurs

Des draps qui chauffent

Un pistolet à gaufres

Un avion pour deux »***

Et un nain malchanceux. ****

*Et là, je retombe sur mes pieds car j'avais pris un ver de terre dans mon scénario. Bon, le lombric qu'il aspira n'était pas détective ! Une raison de plus pour que je ne sorte pas vainqueuse du concours Lunii, mais je m'en bats l'œil ! Je m'amuse.

**Pardon, j'peux pas m'empêcher.

***Boris Vian.

****Le nain !!! Du concours que je ne gagnerai pas.