Kidnappée

valjean

Cela faisait déjà 3 ans que Jean-Lucien avait du quitter l’université : Pressions sur ses assistantes, harcèlement sur ses propres étudiantes qui refusaient d’assister à ses cours autrefois fréquentés.

Pourtant il ne désirait que peu de chose, leur voix tout simplement avec le timbre qui leur était propre, les intonations et l’accentuation, quand elles riaient, pleuraient, ou aimaient.

Il était donc parti, officiellement pour effectuer des travaux personnels de recherche, et depuis il ne sortait guère de son appartement, occupé qu’il était à poursuivre ses expériences.

Mais il se sentait frustré, le cri des animaux qu’il enregistrait était d’une gamme trop limitée, et la capture des voix des habitantes de l’immeuble, quand elles passaient devant sa porte était de mauvaise qualité.

D’ailleurs ces personnes qui perdaient systématiquement leur voix quand elles se trouvaient à son étage, allaient finir par trouver cela suspect.

Véronique rentrait une fois de plus très tard. Cela ne pouvait plus durer.

« Si j’étais mariée ou avais des enfants m’exploiteraient ils comme cela ? »Demain elle en parlerait au directeur de la rédaction.

Quand la main lui recouvrit le visage, alors qu’elle rentrait dans l’immeuble, elle ne comprit pas tout de suite ce qui se passait.

Etait-ce un habit tombé d’une fenêtre ou un drapeau, et cette odeur n’était elle pas celle d’un hôpital ?

Elle reprit conscience dans une pièce aux murs gris.

Elle était assise sur une chaise métallique fixée au sol, les mains étaient liées derrière elle.

Son regard fut attiré par le un micro posé sur la table argentée devant elle, et par le grand téléviseur et ses enceintes qui occupaient le mur.

Intriguée, elle nota aussi la présence sur les côtés de rayonnages, sur lesquels étaient posés des bocaux transparents et vides, tous étiquetés de prénoms féminins.

Sentant une présence, Véronique tourna péniblement la tête sur la droite.

Sur un siège se tenait une forme, immobile, revêtue d’un voile sombre. Véronique frissonna.

Elle sursauta, une main gantée et glacée venait de se poser sur son épaule gauche, elle hurla, mais n’entendit aucun son sortir de sa bouche.

« Ne te fatigue pas » répondit une voix métallique derrière elle. « J’ai pris ta voix, j’en ai besoin pendant quelques jours, si tu coopères bien tu pourras partir sinon.. »

Un spot étourdissant éclaira à cet instant la forme assise à sa droite, dont le voile fut ôté, dévoilant un squelette recouvert d’habits féminins. « Sinon tu finiras comme elle. Si tu es d’accord, hoche la tête  ».

Ce que fit Véronique, tétanisée.

Le spot s’éteignit.

L’homme, puisque la voix sous la chasuble épaisse trahissait un être de sexe masculin, se dirigea vers un rayonnage, prit un bocal étiqueté, dévissa le couvercle et un ensemble de sons s’en échappa, elle reconnut sa voix, comme épaissie.

Véronique, sentit des larmes couler qu’elle ne put réfréner, aussitôt des sanglots s’échappèrent du récipient.

L’inconnu la pinça fortement dans le pli du coude, un hurlement se fit entendre dans le bocal.

« Bien ta voix est parfaite, tu vois je la possède, mais toi seule peut l’actionner, tu restes maîtresse de tes émotions et ce sont tes émotions qui m’intéressent. »

Laisse-moi t’expliquer, je vis ici, reclus, relié au monde par la télévision, c’est comme cela que je t’ai découverte sur la chaîne info, ta voix est à la fois rauque et sensuelle et peut couvrir une importante gamme d’émotions. Elle peut être légère, mais parfois grave selon les sujets que tu couvres, tu peux tenir tous les rôles ou presque.

Cela tombe bien, je ne supporte pas la voix des actrices sur les films que je regarde : trop mou, trop mièvre, mal doublé.

Alors que toi … ?

Y as tu déjà songé ?

Véronique bougea les lèvres, abattue, laissant échapper un gémissement du verre.

La main gantée referma le couvercle.

« Tu pourras repartir avec  ta voix, dés que tu auras fini ce petit travail de collaboration ; c’est simple j’insère ta voix dans les dialogues, tu as juste à la moduler à l’aide du micro placé devant toi.

C’est facile, tu sais, j’ai fait de même avec des rôles masculins. »

Alors toujours d’accord ? Si oui, hoche la tête une nouvelle fois.

Véronique hocha la tête, avait elle vraiment le choix ?

Bien, réagit l’inconnu avec une voix enjouée, je vais préparer le repas, nous avons du travail qui nous attend et il faut que tu sois en pleine forme.

Quand il revint, un peu plus tard, portant un lourd plateau repas, elle tressaillit à la vue de la pile de CD à graver qui y était posée.

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