La fille de la librairie

La pluie tombait. Elle léchait les vitres, les vitrines, les murs, avec grâce, pour s'écraser sur le sol et se perdre sur le trottoir. Mina marchait, vite, très vite. Elle pressait le pas, slalomant entre les gouttes. Ses chaussures raclaient bruyamment le sol tandis que sa misérable capuche essayait de protéger ses cheveux chocolats de la pluie.

Elle détestait le mauvais temps.

Mina tourna au coin de la rue et regarda les livres à travers la vitrine. Il y avait de tout : romans jeunesses, romans adultes, bandes dessinés, mangas... La jeune femme avait collé son nez sur le verre. Elle lorgnait sur un polar nouveau, qu'elle n'avait jamais vu. Mais les sous lui manquaient.

Elle vivait dans la cité, dans un immeuble miteux. Sale. Petit. Orpheline et recueillie par une africaine avec des tresses noires et une robe en tissus coloré. Mais Mina était triste. Elle refoulait son chagrin.

Elle était seule.

-Quelque chose te fait envie?

Mina releva sa tête et aperçut un vieil homme aux cheveux grisonnant et aux joues ridées et tombantes. Un homme âgé avec son pantalon en tissus marron. Il inspirait la confiance avec ses petites lunettes posées délicatement sur son nez.

-Je regarde c'est tout...

-Mais ça te donne envie, non?

-Je n'ai pas d'argent.

-Entre!

Il disparut dans la boutique. Mina hésita, se mordant la lèvre, mais le suivit. Les étagères grimpaient jusqu'au plafond, les livres prenaient toute la place, et des cartons de nouveautés s'empilaient derrière le bureau. Un paradis des livres. Le vieil homme revint, le livre qu'elle fixait à la main, et le lui tendit.

-Je viens de dire que...

-Pour les passionnés de lecture, c'est gratuit. Et puis, je ne peux pas te priver de livres sous prétexte que c'est trop cher. Prends!

Il lui sourit. Et Mina s'effondra en larmes, touchée par tant de gentillesse.