Les flammes et les barreaux
bis
« Souris » m’a-t-on prescrit. « Souris, j’ai envie de te voir heureuse ». Alors j’ai souri.
Muette puis tétraplégique. Suites d’un accident tragique… J’ai forcé après la conséquence sur mes membres inertes. J’ai crié dans un élan mutique : « je vous hais ! » tout en feignant un espoir vrai. « Souris, souris ». Alors j’ai souri. J’ai vomi mes sourires. Esclave de mes membres statiques puis de mes zygomatiques. J’ai souri à en crever d’amertume. J’ai souri à en crever de colère. J’ai souri contre vents et marées. J’ai souri d’une haine enfiévrée.
Pourtant avant. Même muette, je parlais avec les mains. Je parlais bien, je parlais même de sentiments. A présent, je souris et ploie sous ma haine latente. J’éclate en monceaux de mépris amers, j’explose sous les couches d’un dégout quasi-fou. Vu que je n’y parviens pas : à faire un sourire vrai. Même à grand coup de pied dans le cul, je ne pourrai plus.
Le pays des femmes qui rient n’est accessible qu’à celles qui s’expriment. Et moi je ne parle pas. Je ne bouge pas. Je hurle juste. Dans un silence figé.
Mes larmes synonymes de plaies, elles gémissent dans mon désamour croissant. Elles flétrissent lentement ma peau. Mes oripeaux, ma chanson de l’aversion sans bruit déferle et crame tout à coup de fouet : surtout leur indigence d’être ignorant. Mépris dans un écrin de silence, je déraisonne de haine quand sonnent les flammes atones. Je suis une putain vendue au chagrin d’un désespoir infini. Contrainte et forcée. Prisonnière sans futur. Ma cellule est sans serrure. Pourtant les gens continuent de me présenter leurs clés…
Et je vois les yeux pseudos-compatissants. Pardonnons-leur, ils sont malentendants à mes douleurs, à mon malheur. Je suis une âme et j’ai des geôlières. Une bouche, des jambes et tous mes membres. Je suis une femme et je ne dis rien. Je suis un cri qui souffre du rien. Du rien à faire, du rien à dire.
Puis de l’attente d’enfin mourir.
Très beau! Et j'adore le style, concis et claquant :)
· Il y a plus de 11 ans ·mark-olantern
Moi qui considérais que le sourire était tout, qu'il pouvait tout... j'en reste décontenancé.
· Il y a plus de 11 ans ·Je vais revoir ma copie ;-)
il n'en reste pas moins que ce texte est bien dans le ton du défi. la grande classe, quoi !
(Ex Ghost Of) Napoléon Zér0
Merci beaucoup à tous.
· Il y a plus de 11 ans ·Au plaisir de m'améliorer encore et encore sur vos compliments comme sur vos diatribes :)
bis
C'est juste magistral, ton texte. Waow. Vraiment.
· Il y a plus de 11 ans ·rafistoleuse
J'aime ce cri muet qui hurle son silence ! Bravo
· Il y a plus de 11 ans ·Stéphan Mary
C'est très fort, tes phrases courtes en disent long de silence ! Bravo !
· Il y a plus de 11 ans ·bleuterre
magnifique c'est le premier mot qui me vient la lecture de ton texte, il est fort, dur, il donne envie de crier pour elle, tres beau bravo cdc
· Il y a plus de 11 ans ·christinej
Il y a de la force, de la rage exprimées par les phrases courtes.
· Il y a plus de 11 ans ·Moi je retiens la fin :
"Je suis un cri qui souffre du rien. Du rien à faire, du rien à dire." Et j'aurais presque conclu comme ça.
Bravo.
Mathieu Jaegert
Ouahou ! C'est sublime ! Je pourrais tout te citer tellement j'ai trouvé chacune de tes phrases forte et magnifiquement écrite ! Bravo !
· Il y a plus de 11 ans ·octobell