L'hirondelle

Edwige Devillebichot

Pour mon amie...

Dans la longue traîne du chagrin, dans le sillage des regrets, rient les mouettes cruelles, souffre l'âme hirondelle, frêle,  fragile, légère. Le temps se couvre, l'air se fait opaque, lourdeur et vents contraires, pression, puis dépression.
L'épuisement au bord des ailes, long et périlleux est le chemin de l'oiseau migrateur. Il détourne son vol, trouve la branche solide, et fait halte sur l'île.
Il se love dans un nid douillet, gémit, rêve. Las, il se repose, d'avoir pris chimères pour boussoles, d'avoir saisi des mains qui se tendaient, avides, écrasantes du fardeau de la sollicitude. De grande mains écumantes de mousses abondantes, bavant conseils et incompréhensions, entourant comme pieuvre, de mille bras collants la confidence.
L'envie qui vampirise, inconsciente et funeste, les lueurs du désir, l'éclat de l'espérance, empierre de conformité,  piège et puis met en cage.
Aride de consolation est l'ignorance du labour qui prépare la moisson, la quête, la terre que l'on soulève, que l'on fend de prières, le voyage...
L'écho glacial des lourdes portes blindées d'orgueil, et froides indifférences, auxquelles on frappe en vain, résonnent à en mourir et font saigner les poings, désespérer demain.
Le fiel semblant sirop est long à digérer, puis s'effacent les sortilèges.
Dans un nouveau matin, redéployant ses ailes, l'oiseau tremblant encore dans le vent qui allonge l'ivraie,  les herbes folles, reprend son ciel, dans un chant qui relève.
L'épreuve a placé dans son oeil la claire vision des mains de l'oiseleur.
Du puits jaillit l'eau claire des profondeurs, l'enfant et le sage un seau en main
rient en buvant sur la margelle, montrant du doigt dans le ciel pur le vol de l'hirondelle.

 

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