Quelqu’un m’attendait quelque part
faustine
On s'est croisés dans l'ascenseur. Tu me faisais peur. Il émanait de toi une telle puissance. Virile. Animale. Peur de toi ou peur de moi ? On a commencé par être amis. Sans enjeux, sans faux-semblant, sans cinéma. J'attendais l'enfant d'un autre, tu commençais à peine une nouvelle vie. Solitaire. Mais avec nous, mon mari et moi, comme seuls amis. Hélas, mon histoire a fini. Heureusement, avant que toi tu en commences une autre. On s'est retrouvés, à deux heures du matin, debout devant l'évier. Là où toutes les choses vraies se passent. Et tu m'as embrassée pour la première fois. Enfin ! Ça faisait bien six mois que mes lèvres attendaient ça. Je buvais tes mots chaque fois que tu ouvrais la bouche. Personne à côté de toi ne soutenait la comparaison. Tu m'apportais tout. J'avais trouvé un diamant brut et, pendant un moment, je n'ai pas su comment j'allais faire pour me l'approprier. Ma seule crainte, mon unique hantise, était que quelqu'un d'autre s'en empare avant moi. Heureusement qu'aucune consœur n'a eu cette mauvaise idée. La face de ma lune en eût été bouleversée…
Devant l'évier où tout a commencé, tu m'as fait lire Stevenson. Robert Louis pour les intimes. C'est là que j'ai compris, en lisant Olalla, en m'y reconnaissant, que tu étais fait pour moi, et moi pour toi. Et puis, tu n'as pas pris la fuite quand il s'est agi de regarder la vérité en face. Tu as répondu franchement oui quand je t'ai demandé, si en d'autres circonstances (sans enfant, sans mari), tu aurais pu m'aimer… Tu es même allé faire réparer tes essuie-glaces, histoire d'être sûr de vraiment y voir clair. En plus d'être jeune, beau et criblé de dettes, tu avais aussi le sens de l'humour. Et moi… j'en avais tellement besoin. Et ma nouvelle-née avec moi. Un jour, enfin, quand tu as été bien sûr que je ne regretterais rien, tu m'as prise par la main pour monter l'escalier, jusque dans ton nid d'aigle, par toi aménagé.
En chemin, nous nous sommes déshabillés.
Non, nous nous sommes arraché nos vêtements. Et c'est torse nu que tu es arrivé au troisième, je n'oublierai jamais la douceur de ta peau, sous ma main, ce jour-là ! Hélas, tu aurais bien voulu… mais tu n'as pas pu. Tu étais trop honnête et moi juste encore trop mariée. Mais ce ne fut que partie remise. Parce que dès le lendemain ; après nos trois cafetières habituelles et nos quatre heures de philosophie appliquée matutinales, faisant enfin abstraction de tous tes inutiles cas de conscience, tu as repris le chemin de l'escalier… Et je ne sais plus, soudain, qui est monté le premier !
Ce dont je me souviens, par contre, c'est que tu m'as prise par la main, avant de prendre le reste… On s'accordait si bien, que la terre a tremblé, que le monde a cessé de tourner… Alors, nous sommes nés l'un à l'autre. Plus tard, comme je perdais toute retenue. Que je murmurais, émerveillée : « Oh, mon Dieu ! » Que je gémissais, impudique : « Oh, mon Dieu ! » Que je m'extasiais dans un hurlement : « Oh, mon Dieu ! » Tu t'es imposé, confiant :
« Non… moi, c'est Jean-Paul ! »
L'escalier convient aux histoires d'amour, bien mieux que l'ascenseur. Jeune, j'ai habité une p'tite chambre au 6e étage sans ascenseur. C'était l'escalier de service. Pour les amours prolétaires ! Mais, regret ! Je n'ai jamais essayé de déshabiller ma belle en grimpant les - étages. Quel bêta j'étais !
· Il y a plus de 2 ans ·astrov
Oh, c'était il y a huit jours et ne reçois l'avis que hier ? bizarre. Et désolée de n'avoir pas répondu avant, je suis sous l'eau en ce moment et peu de temps pour jouer sur les sites. Mais, non, vous n'étiez pas un bêta... on fait ce qu'on peut à l'âge que l'on a, selon l'urgence (souvent après une très longue attente) et selon la disposition et la nature de l'escalier... marbre, pierre, bois, tapis ou pas... pas toujours évident !
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Belle histoire et chute...
· Il y a plus de 2 ans ·vividecateri
merci Vivi, la chute dure encore trente ans plus tard...
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Jean Paul dieu ? Alors les papes s'y mettent aussi !
· Il y a plus de 2 ans ·yl5
Ben justement pas... faut pas mélanger l'ivraie et le bon grain !
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Torride, il doit assurer le Jean Paul!
· Il y a plus de 2 ans ·Christophe Hulé
no comment...
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Une histoire à vivre pleinement !!!
· Il y a plus de 2 ans ·Louve
mmmmmmm.....
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Merci pour le coup de coeur! Joyeux dimanche Louve!
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Je ne suis pas d'accord avec toi.
· Il y a plus de 2 ans ·Depuis que je fais la vaisselle debout devant l'évier, il ne m'est rien arrivé de vrai. :o))
Hervé Lénervé
Alors rachète un lave-vaisselle ;))))))
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Très beau texte. J'adore Peynet.
· Il y a plus de 2 ans ·Laurent Cacciatore
Merci, c'est tiré d'un fait on ne peut plus réel... je voulais terminer ma saga biographique ainsi, mais j'ai craint pour les enfants... en-dessous de trente ans ils sont un peu intolérants, surtout en ce qui concerne leur mère... (qui est une Sainte comme chacun sait).
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
oui je connais ça avec ma fille ;)
· Il y a plus de 2 ans ·Laurent Cacciatore
Belle histoire d'amour vrai...il faut savoir perdre la tête et le reste à un moment! La vie n'attend pas,elle passe...Vivons donc!
· Il y a plus de 2 ans ·myriam-m
Merci Myriam (un de mes prénoms préférés!) oui, perdre la tête... en fait, j'aurais dû en avoir plusieurs!
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Amants?
· Il y a plus de 2 ans ·Christophe Hulé
Têtes (amants aussi, mais ça, c'était avant et c'est pas "j'aurais")
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
Merci pour le coup de coeur !
· Il y a plus de 2 ans ·faustine
quelle belle philosophie
· Il y a plus de 2 ans ·Gabriel Meunier
Merci Gabriel, suis encore un peu sous l'eau là, mais je vais venir te lire aussi très bientôt...
· Il y a plus de 2 ans ·faustine