Sticky fingers

roigoon

1971 : Alors qu’ Apollo 14 s’envole à nouveau pour la lune, que la petite Charlotte Gainsbourg offre son premier sourire au génial Serge, Les Stones accouchent dans la douleur de l’album renaissance : « Sticky fingers ».

Une pochette signée Warhol, expose une braguette qui, une fois dézippée, s’ouvre sur un buisson de poils pubiens. Provocation ! L’Espagne l’interdira.

On croyait le groupe au fond du gouffre après la disparition tragique de Brian Jones et le meurtre d’une groupie au concert d’Altamont. Il n’en est rien. Une fois la galette posée délicatement côté face A, la pointe « ortofon » puise dans le microsillon les premières mesures de « Brown Sugar ». Premiers riffs de guitare crades et puissants ou Keith richards et Mick Taylor, nouvel arrivant dans le groupe, s’envolent. Charlie Watts jongle habilement sous les ors des cuivres directement empruntés à la Motown. Le discret Bill Wyman caresse sa basse comme s’il s’agissait des fesses d’une teenager.

Le ton est donné : sex drug and rock and roll. Mick Jagger annonce d’emblée la couleur. Voix ferme et sensuelle, énergie retrouvée, il joue avec vanité dans des propos pleins de sous entendus. Les ptits gars du swingin London  entament un nouveau départ.

« Sway » et « wild horses » sont des ballades où la drogue est omni présente. La voix lascive de Mike semble gorgée de sexe. Ses fidèles guitares, légères comme de la neige, divinement harmonieuses, avancent aussi surement qu’un fleuve s’écoule vers la mer.

« You gotta move » nous projette dans les champs de coton du Mississipi.  La lumière jaillit et on comprend la signification du titre de l’album. Ces « doigts gluants » symbolisent pleinement le plaisir onaniste à entendre glisser le bottleneck de Mick Taylor dans des slides ahurissants. La voix pleure, les cœurs saignent le long de notes dissonantes.

Sur la face B, les têtes repartent dans un mouvement perpétuel. Tout y est : percussions besogneuses, cuivres hargneux et profonds, guitares qui combattent sur le ring de la postérité. Keef the human riff  et Taylor s’empoignent pour le plus grand bonheur. Qui est le plus grand des deux ? Cette « bitch » nous entraine dans le train de l’extase.

Retour ensuite au Rythm and blues où les guitares ne nous lâchent plus. Magique cinq cordes Telecaster en open tuning, la prodigalité des deux virtuoses sert la voix de leur maitre. Ils ont quitté le statut d’humain pour celui de divinités. L’apport de pointures comme Nicky Hopkins, au piano, le cinquième Who, est la cerise sur le space cake.

L’absolument génialissime « sister morphine » flirte avec une délicieuse décadence. Les poils se dressent au plafond, l’orgasme est proche.

Petite respiration avec « Dead flowers » puis plongée dans un lancinant « moonlight mile », profond et dangereux, à la limite du monde réel.

Quelle claque ! Ressortir cet album donne autant de plaisir que d’enfiler le vieux cuir râpé de son père. Couleur actuelle, odeur chaude du passé et frissons garantis.

Roigoon

  • J'ai envoyé ce texte il y a longtemps. J'avais oublié de le noter. C'est tout. Pour le reste, je n'avais pas vu la limitation. Désolé que ça vous trouble. Le principal est que cela vous plaise. A bientôt de vous lire Marc.

    · Il y a presque 10 ans ·
    Dscn1602 orig

    roigoon

    • C'est simplement dommage ; on en dit plus en 3000 caractères qu'en 1500, surtout sur un album qui nous plaît. C'est un peu injuste pour ceux qui ont limité leurs idées afin de tenir dans l'équation. Cependant, vous n'avez aucune raison de vous excuser ; vous n'y êtes pour rien et avez su partager comme il se doit votre passion pour cet album ; vous méritez encore une fois mes félicitations.

      · Il y a presque 10 ans ·
      Avatar

      Marc E.

  • Félicitations pour votre victoire ; j'apprécie votre texte jouant sur les envies primaires des auditeurs, mais l'avez-vous proposé sous cette forme dès la clôture des inscriptions ?

    Parce que si c'est le cas, quelle injustice ! Il est deux fois plus long que ce qu'autorisaient les règles du concours.

    Je vous remercie pour vos précisions !

    · Il y a presque 10 ans ·
    Avatar

    Marc E.

  • Bonjour n'oubliez pas de noter l'album pour que votre chronique puisse être prise en compte par le jury ! merci d'avance !
    Selekter

    · Il y a presque 10 ans ·
    Selekter pref musicales

    selekter

Signaler ce texte