triptyque météorologique

plic ploc

pluies d'hiver

cruelles les pires

elles auraient pu tomber en neige

pluies de printemps qui agacent

pas seulement les enfants impatients

ces pluies croquent tout leur soleil d'un coup

pluies d'été les plus belles

lourdes et chaudes nourrices

on les attend toujours on les regrette

pluies d'automne font pleurer

larmes d'encre violette

et tourner la page

respirations

chaque jour

les vents rident les étangs

poussent leur troupeau de nuages.

Ce qu'ils aiment le plus (même passé l'âge)

c'est faire tourner la tête de la moindre girouette bluette

éternels alizés sans frontières mécaniques de nulle part

zéphyr des poètes bise glacée haleine des loups garous

bourrasques tempêtes tornades cyclones

pour tous ces petits ou grands airs

quelle échelle ?

nuit et jour sans long repos

ils vont et viennent au gré de leurs humeurs

la pression atmosphérique n'a rien à voir avec cela

instables susceptibles capricieux ils détestent les devoirs de vacances

et refusent même parfois de souffler sur nos moulins des temps modernes

d'un village d'un pays d'un continent à l'autre

depuis toujours leur filiation est mystérieuse

ils changent de nom comme de chemise

se moquent des cartes d'identité

une rose des vents !

morsures ou brûlures ?

de la tiédeur du sein maternel aux cadavres glacés

froid et chaud se querellent toute la vie

aux champs en cuisine sur les plages

ne sont pourtant que petits écarts

on dit qu'au moyen âge et même du temps de Voltaire

les oiseaux tombaient des flèches des cathédrales

et l'hiver le vin gelait dans les tonneaux

villages villes et fidèles doutaient

citernes sources fontaines rivières gelées ponts éclatés

des orgueilleuses cités les remparts devenaient inutiles

épidémie sans microbe

sans visage

d'autres siècles incendiés

fournaise du jugement dernier

terre crevassée sources taries râles d'agonie

mains brûlées autrefois sur l'épée des chevaliers

maintenant sur la poignée des voitures