une histoire a deux voix(version corrigee)
christinej
Deux êtres se croisent, dans le cours d’une vie.
Deux personnes différentes, aux antipodes l’une de l’autre.
Leur destin bascule, s’entrechoque. L’une chute, l’autre regarde.
Voilà le court instant de leur rencontre vu par chacun.
Elle: Je suis nerveuse, mes amies m’ont forcée la main pour sortir ce soir.
Elles m’ont habillée, coiffée, maquillée. Dans la glace je me vois mais cela ne me ressemble pas. La jupe est trop courte, il y a trop de couleur sur mes joues, sur mes lèvres.
Elles n’arrêtent pas de me répéter que cela me va bien, que cela me change de mon style "rat de bibliothèque-grand-mère". J’hésite je ne veux pas sortir comme ça je ressemble à une…. Je me tais, elles sont toutes accoutrées de la même façon. Je cède.
Lui: Putain de gueule, il faut vraiment que j’arrête de fumer. Et de boire aussi.
Putain j’ai fait quoi pour avoir la tête dans le cul ce soir?
Un coup d’œil sur ma piaule et je comprends vite. Les volets sont fermés depuis des semaines, un lit défait aux draps douteux trône au milieu de la chambre, j’ai des cafards pour colocs, merde ça craint, faut vraiment que je m’aère la tête.
Ok, let's go to the party.
Et merde j’ai plus un froc de propre! Je suis sûr qu’il en reste un pas trop mauvais dans le tas de linge sale…
Waouh, je ne sais pas ce que j’ai fait avec celui-là mais, putain, il pue la merde! je crois que je vais devoir le bruler. Celui-là fera l’affaire. Aspergé d'un peu de déo, ou de parfum.
Tu vas emballer sec ce soir mon gars!
"Coup du cow-boy", deux doigts pointés sur le miroir: Bang Bang! Fuck de putain de merde, je suis beau quand même!
Elle: Elles veulent qu’on aille danser. Mais je ne sais pas, je ne connais pas la musique moderne, je ne suis jamais allée en boite de nuit. Je sais c’est pathétique, mais je me concentre sur mes études, je veux être médecin, enfin mon père veut que je sois un doc, car lui il voulait en devenir un. Mais il est garagiste aujourd’hui, la vie ne l’a pas menée sur le bon chemin, c’est tout, et comme il répète toujours, il soigne les machines au lieu des hommes.
Oui, enfin! Je dois travailler dur pour être au niveau, en plus j’ai un travail pour payer une partie de mes frais, je n’ai pas le temps de m’amuser, pas le temps ni les moyens de faire du shopping, pas le temps de danser ni de faire des rencontres.
Alors je vais essayer de profiter de cette soirée, car ce sera la seule que je m’autoriserai.
Lui: Non pas de bars ce soir. On va la faire classe, une petite boite bien branchée avec des tas de salopes en chaleur. Et qui sera là pour les soulager? ME! Oh yeahh!
Putain je sens que je vais m’éclater. De toute façon j’ai rien d’autre à foutre.
Nous y voilà. Humm, ça sent la chaudasse jusqu'ici! ça m’ouvre l’appétit tous ces petits culs, allons danser.
Elle: C’est vraiment bruyant comme endroit et il y a trop de monde.
Je passe mon temps à m’excuser de me faire bousculer et à marcher sur des pieds.
À vrai dire, tout ça me fait un peu peur, les lumières trop brillantes, la musique chaotique, les odeurs qui me donnent la nausée, j’ai la tête qui tourne.
Pour me "sauver", elles m’ont emmenée dans un coin de la boite, là où il y a des sofas usés et tachés, mais combien accueillants pour une âme égarée comme moi.
Lui: Je suis au paradis des petits culs! Des petits culs, encore des petits culs, et des seins qui se balancent au rythme du DJ… ça me met au garde à vous. Allons à la pêche à la morue. Laquelle va mordre mon hameçon ce soir? Enfin, je veux bien d’une morue mais sans l’odeur. Avec la dernière j’ai eu l’impression de tringler une poubelle! Mais bon elle était bonne.
Elle: Me voilà seule, elles dansent toutes, un tas de garçons collés autour. Comment peuvent-elles respirer, ils sont tellement serrés?
En plus, j’ai l’impression que c’est la même musique qui passe depuis une heure, c’est vraiment trop bruyant, il faut que je sorte, j’étouffe. De toute façon elles ne verront même pas que je suis partie.
Me frayer un chemin dans ce tumulte de gens c’est un vrai chemin de croix. Oh non! Je viens d'entrer en collision. "Oh désolée, je suis navrée!"... Je ne sais pas d’où il sort celui-là mais il empeste l’eau de Cologne bon marché.
vite la sortie, je vais vomir.
Lui: Non pas celle-là on dirait un néon fluo qui gigote, ça donne la gerbe.
Eh oh! Faut faire gaffe! Elle m’est bien rentrée dedans cette pouffe, elle m’a même carrément collé, j’ai bien senti ses miches!" Parle plus fort, je t’entends pas! Eh, tu vas où?" Ça, si c’est pas une invitation à la suivre! Oh! Regardez-moi ce cul et cette croupe à monter sans hésitation!
Elle: Enfin de l’air.
J’ai encore les oreilles qui bourdonnent, j’ai l’impression d’avoir de boules Quiès. Je fais comment, pour rentrer, moi maintenant?
Il ne me reste plus qu’à appeler un taxi.
Lui: Je le savais, elle m’attend! Je ne m’étais pas trompé.
Même celles qui ont l’air coincées en veulent.
- Alors tu fais quoi?
- Pardon?
- Oui, on va où?
- Je……non…..
- Tu veux que je t’aide à te décider?
- S’il vous plait, je ne vous connais pas!
- Ah, tu veux jouer! Ok ça me va. Un petit coup vite fait. Tu es de ce genre hein?
- Non! Je rentre chez moi, laissez-moi.
- Allez, fait pas ta timide avec moi! Tu te rappelles pas comment tu m’as collé dans la boite? C’était chaud bouillant! Approche.
- Vous vous méprenez.
- Tu veux que je te prenne, là, comme ça? Je le savais! Viens, je sais ou on peut le faire vite fait.
- Non, non! Vous ne comprenez pas, vous faites erreur!
- Je ne fais jamais erreur, compris pétasse? Tu m’as allumé, maintenant tu dois me soulager.
Elle: J’ai peur, il me fait mal, il serre tellement mon bras qu’il va finir par le casser. Je n’arrive plus à parler, je voudrais appeler au secours, que quelqu’un me regarde, m’aide. Au secours s’il vous plait… Il m’emmène où?
Non, non! Crie! Je suis lâche, peureuse…non….
Lui: Je savais qu’elle serait d’accord, elle ne dit plus rien, elle me suit même docilement. Oh, je vois, elle doit aimer qu’on la bouscule un peu. Je vais prendre mon pied! Ah, nous y voilà. L’antre de la baise rapide.
Elle: On est où? C’est sale, ça pue, c’est quoi ça? Oh mon Dieu, il y a des rats et des matelas qui gisent sur le sol. Il va me violer, me tuer.
Je dois partir d’ici, maintenant.
Lui: Eh! Tu vas ou comme ça salope? Je vais te remettre les idées en place comme mon père le faisait avec moi, tu vas voir.
Il se met à la frapper au visage, dans l’estomac, des coups violents et secs.
Elle tombe à genoux, le souffle court, tétanisée, vaincue par la peur et la douleur.
Il semble satisfait, d’un coup pied la pousse à terre, pour mieux lui imposer le poids de son corps, son choix, sa force, son sexe.
Elle: J’ai mal, je suis donc encore en vie. Si je ne me défends pas, je survivrai peut être à ça. Non, je veux mourir. Il me salit, je suis sale. J'ai si mal…
Lui: Je savais que tu te laisserais faire! Elles disent toutes non mais, en fait, elles pensent oui. "Vassy défonces moi le cul! J’aime ça! Je veux ça!" …. Ne t’en fais pas, je vais te satisfaire. Oh oui, encore, putain! Que t'as le cul serré, salope! Ça vient… oui!
Elle: Je sais qu’il me parle, mais je ne comprends rien. Tout mon corps me brule, tout mon corps est à l’agonie. Ça dure tellement longtemps, c’est si violent, si atroce. Je serre tellement les dents qu’elles vont finir par se souder. Dans la gorge j’ai un hurlement qui tourne, qui veut s’extraire de moi, mais je le retiens. Comme mes larmes. Je suis morte. Un bout de chair c’est tout je suis. Et ce que je serai.
Lui: Putain! Tu étais une bonne, toi! Un peu passive, mais au moins tu sentais bon. Bon, je te laisse, tu vaux quand même pas plus qu’un coup de queue, faut pas que tu prennes la grosse tête, hein! Tu sais où me trouver si tu veux un deuxième round!
Elle: Je ne sais pas si il est parti, je n’ose pas bouger, ni ouvrir les yeux. J’ai l’impression d’avoir été l’acérée de l’intérieur. J’ai mal…
AHHHHHHH!!!!! Ce fut le dernier cri qu’elle poussa, si fort, si désespéré qu’elle s’en est déchiré les cordes vocales.
On la trouva recroquevillée sur un matelas moisi, dans une maison vide, à moitié nue, violée, battue, terrorisée, meurtrie.
Quand il fut arrêté, il ne cessait pas de dire que c’était ce qu’elle voulait, qu’elle était venue habillée comme une pute, qu‘elle lui avait fait des avances.
Au procès, on l’a regardé comme si c’était elle, la coupable. Elle, qui l’avait cherchée.
Elle n’a pas attendu le verdict.
Dans les toilettes du tribunal, elle s’est ouvert les veines. Pour enfin avoir la paix, pour arrêter la douleur, pour ne plus être sale.
Lui, a été condamné a trop peu d’années de prison, mais avec la "bonne conduite", il a fait à peine six mois.
Il est toujours convaincu que c’était ce qu’elle voulait.
merci dimir-na
· Il y a plus de 12 ans ·christinej
Le poète offre sa tendresse à tous les coeurs brisés, elle est la plus puissante des armes, face à ce genre de connard ayant une bite à la place du cerveau. Je t'envoie des pensées de roses, tendresse , Dimir-na
· Il y a plus de 12 ans ·dimir-na
merci rockin18
· Il y a presque 13 ans ·merci Mery
christinej
de rien! ce n'est pas moi qui l'ai écrit, c'est toi! je n'ai fait qu'y placer deux trois virgules!
· Il y a presque 13 ans ·je pense que tu as choqué dans le bon sens. on ne peut pas lire ton texte et "basta", on passe à autre chose! c'est normal que les lecteurs soient horrifiés, choqués! c'est extrêmement violent et c'est justement cette violence que tu dénonces!
c'est pour ça que ton texte m'a interpellée!
les femmes ne devraient pas subir ça. jamais. notre corps n'est pas une marchandise. et quand on dit non, ça ne veut pas dire autre chose que non.
bravo encore!
Karine Géhin
oui c'est dur c'est ce que je voulais faire ressentir, faire reagir. Mais je ne voulais pas choque si c'est la cas pardon.
· Il y a presque 13 ans ·Merci a tous de m'avoir lu
christinej
Je l'avais lu ce matin, il m'avait interpelle...sujet violent...voir les deux visions d'une histoire aussi terrible..c'est dur, ca bouscule et ca marque...
· Il y a presque 13 ans ·Sweety
merci pawel
· Il y a presque 13 ans ·merci wen
c'est un essai une tentative bien amelioree grace a Mysteria que je remercie encore.
christinej
Sujet difficile mais bien traité. Beaucoup de choses à dire mais je reste un peu le souffle coupé.
· Il y a presque 13 ans ·wen
c'est de la vérité qui finit chez les flics , entre quatre planches , en asile, et parfois en suicide... bien lucide la fin Bravo Le sage? Coyote...
· Il y a presque 13 ans ·Pawel Reklewski
franchement, il n'y a pas de quoi. ton texte gagne à être lu. il faut le lire. allez les amis wlw! il faut le lire. ne vous laissez pas arrêter par 7 petites pages. vous verrez, ça les vaut!
· Il y a presque 13 ans ·Karine Géhin
merci a toi Mysteria tu as donne du souffle a ce texte
· Il y a presque 13 ans ·merci pepitaa j'apprecie
christinej
Un texte qui fait peur.
· Il y a presque 13 ans ·Bien mené de bout en bout. Terrible.
Je vais vous mettre dans mes cdc. Et même le recommander.
Bravo d'avoir traité un sujet aussi difficile.
pepitaa
un sujet très dur et très bien traité.
· Il y a presque 13 ans ·il est intéressant de voir comment deux points de vue divergent.
il est très triste ce texte.
bravo Christine!
Karine Géhin