Vers l'océan

inta

Si l’océan s’accroche aux souvenirs que j’ai

Je m’attacherai aux vagues en mur de cavalcade

Les goélands bruyants fuiront mes équipées

Incapables de suivre mes horizons nomades 

Sur la cime de l’eau, je touche à peine l’aube, j’effleure en escapade les ailes des corbeaux et j’attends en silence les bras qui me diront.

Je m’enfuis dans le temps des espérances humides et j’ignore en passant les sombres habitudes que je n’ai jamais su ajuster à mes lois.

Aurais-je encore l’espoir de découvrir le sable qui me pacifiera ? Je n’oublie que les secondes à mes peaux attachées, je laisse les aurores raconter leur noirceur et songe sans rien en dire aux heures que je me donne, seule à mes ondes offertes.

Sur l’océan s’accrochent les souvenirs des rimes à ma vie passagère, sans début, infinie dans les eaux, parfumée d’un amour en mur de cavalcade. L’albatros a suivi les sauvages envies que mes errances appellent, je dérive et me rive aux abords désolés des solitudes aimées, je ne saurais jamais ce que les raisons tièdes caressent sur les envies de mes autres pareils.

Je navigue des cimes aux autres cimes, celles mouillées de regards, des yeux gris qui me sondent, profondeur en partage sur le lit des abysses.

Si l’océan s’accroche aux souvenirs que j’ai

Je saurai l’éloigner de mes mots murmurés.

Je boirai sa moiteur et rejoindrai le gué

Sur les ailes d’un ange aux possibles accordés

L’ange a livré mes peaux sur les pentes abruptes des roches aux raideurs âpres, je ne vois que le bleu qui griffe en intervalles mes regards de silence en lumière blanche et folle.

L’Île a mangé mes ailes et je parcours encore les bordures inondées de mes désirs de sel.

Elle pense et me murmure les trésors recelés dans les sables sucrés et je creuse au-delà de mes terres enfouies, j’écoute encore les mots de mon île à nulle autre pareille.

J’irai un jour ou la nuit me laissera en paix retrouver les embruns qu’elle épanche pour moi, j’irai caresser sur les roses trémières la pervenche incrustée dans le bois des barrages. Je sourirai aux délicats amants qui se posent en suspens sur des bancs de rivages.

Et si le vent s'effraye des limites de l’eau

Il parcourt, provisoire, la route des voiliers

Embrasse en embuscade les ponts sourds des bateaux

Le tintement transi des cloches à naviguer.

A la terre amarrée, j’accepte les anneaux qui me tiennent en secret sur les repos d’envol. J’attendrai quelques temps que les soifs de mer redessinent mes tempes et je dirai à l’ange que seul il peut m’atteindre, et donner à mes jours les avenirs gracieux.

Je reprendrais mes cimes tout en haut, tout en bas, chevauchée sans ornières aux lisières des accords.

Et je verrai mon île, marque d’encre en poinçon me faire un dernier signe et délier les amarres.

Et l’île où tu étais cerné de barricade

en flottaison épaisse, l’horizon enfermé

Les yeux clos sur ta vie aux sons des mascarades.

Et tu viens me chercher, j’ouvre un peu les marées.

La barque est là, t’attend. Tu ne sais pas quoi faire. Tu voudrais la pousser dans les eaux délicieuses mais tes peurs ont noyé tes navires de voilures. Ta bouche est ensablée de silence en souffrance, tes rituels s’épanchent sur tes regrets de mer.

Et tu as embarqué pour lâcher sur la grève tes asphyxies bleutées aux élans de remords. Tu vogues, je tiens la rame qui te ramène à l’eau, aux cimes éternelles, aux rêves et à la vie.

La lumière te pénètre, entre dans tes entraves et le flux et reflux te renvoient aux noirceurs que tu n’avais pas vues.

Mais je suis là, toujours, Poséidon femelle, sirène, chasseur de mort, et nous allons ensemble sur des lames accortes nous baigner de nuages et nous saouler d’aurore.

Côte à côte, sur les flancs des vagues vastes et nobles, nous choisissons les creux et les sillons de flots que nous accosterons.

Les bancs qui nous reposent des tumultes à venir se parent des goémons pour nous ouvrir le ciel et je vais et tu vas, là bas, vers un ailleurs, que l’on ne connaît pas.

Signaler ce texte