BANLIEUE IS BEAUTIFUL, Palais de Tokyo

Christophe Paris

Mais qu'est-ce que c'est qu’ce squat avec tout plein de vigiles dedans ?

Une expo immersive, surprenante de par sa taille et sa scénographie, où chacun peut devenir acteur d'une œuvre évoluant au gré de ses visiteurs et de leurs inspirations du moment.


Des pneus, encore des pneus, et toujours des pneus. Des milliers sans doute, empilés en murs de caoutchouc à la hauteur impressionnante, délimitant ainsi les différents espaces de visite.
Dès le début on pense à un immense squat dans un terrain vague, un look post apocalyptique. Des plans de MAD Max ou de Banlieue 13 pour les plus djeunes vous traversent l'esprit.
Y'a de tout dans ce grand bordel. Une librairie, un bar génial fait de bric et de brocs à un euro la canette (Parti pris du créateur, prix banlieue), un endroit où regarder des films avec un grand choix de DVD. Tout est emballé, scotché, fixé au ruban adhésif. Des minis coins avec des humains à l'intérieur qui y déclament au micro un flot de paroles et de pensées.
Il y a aussi ces ordinaux couplés à des imprimantes, permettant à chacun d'éditer mots et photos de son choix et les coller où bon leur semble On y trouve même du feu réel entouré de tôle façon bad série américaine. On se pose, on se vautre, on branche d'autres quidams, on y tchatche dans ces espaces, sur des canapés, des chaises emballés de ce scotch qu'on utilise pour le déménagement. C'est cool et relax, pas d'émeute en perspective. Tranquille quoi !
Tous sont bariolés de mots et de dessins. Faites quand même gaffe à vos fesses, de temps en temps le feutre s'en va et te nicke le futal.
L'immersion créative du visiteur ne s'arrête pas là. Des tas de blocs de polystyrène du plus petit au plus mastoc, sont présents çà et là vous invitant à les sculpter, les déchirer, les trasher de vos petits doigts zagiles.
Certaines de ces sculptures sont absolument renversantes accompagnées de tailles et de volumes parfois très impressionnants. D'énormes visages, une contrebasse, des masques, bref des tas de trucs. Vous vous prenez au jeu, hop une chaise, du scotch tendu dessus pour empêcher de s'asseoir, et vous marquez au feutre « Chaise à régime » puis « Bouge tes fesses au lieu d'poser ton Q ». Ça le fait, man ! Trop d'la balle.

Et puis il y a tous ces mots toutes ces phrases. Vous en trouverez de partout. Des p'tites, des grandes, des drôles, des nazes, des philosophiques, certaines à compléter dans sa tronche volontairement écrites sans leurs fins. Vous partez en mode réflexion, et dans cet immense joyeux boxon, vous éprouvez un étrange sentiment de liberté, de créativité, de dynamisme.

Oui la banlieue est rebelle au sens d'un système fait de standards  et de clichés à la dent dure et acérée. Mais curieusement on la sent novatrice, capable de poser des questions dont les réponses pourraient changer une société et les âmes qui sont à l'intérieur du dedans. Du subversif jouissif qui manque tant à un monde moderne en perte d'humanité.


CHRISTOPHE PARIS;


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