Faux contact

wen

Contribution pour le dernier concours Etam. Le thème était : "Moi en mieux".

Voici ma contribution pour le dernier concours Etam dont les résultats ont été délivrés récemment. Non retenu, je vous le livre donc ici.

Tous vos commentaires seront les bienvenus.

Wen.


 

Encore quelques minutes et ce sera bon, se dit-elle pour trouver le courage nécessaire. Amélie terminait sa session de running hebdomadaire du mercredi matin. Il ne restait plus qu'un petit kilomètre. Sauf que c'était le plus dur. Elle avait mis beaucoup de temps pour trouver ce parcours, il lui avait fallu des dizaines d'essais avant de trouver cet endroit.

Il n'y avait qu'un seul inconvénient, le dernier kilomètre.

Cela faisait presque deux ans maintenant qu'Amélie s'était remise à courir régulièrement. Au début, elle avait eu beaucoup de mal à s'y mettre. Mais à présent, cela faisait plusieurs mois qu'elle n'avait pas manqué une seule semaine. Elle en était très fière.

Il lui restait un peu moins d'une demi-heure avant d'aller chercher les enfants à l'école. Beaucoup trop pour terminer sa séance mais pas assez pour faire l'aller-retour chez elle pour se doucher et se changer.

—    Bah ! se dit-elle en apercevant son point d'arrivée à une centaine de mètres devant elle. Ce n'est pas grave. De toute façon, je ne vais pas à une réception chez monsieur l'ambassadeur, je ne vais qu'à la sortie de l'école.

Une demi-heure après, Amélie se tenait à côté du portail de l'école pour y accueillir ses deux garçons.

Amélie s'était mariée avec Mathieu, il y a quelques années, juste après la naissance de leur premier fils. Leur deuxième enfant naquit peu de temps après. Compte-tenu de sa faible reconnaissance professionnelle, Amélie en profita pour prendre un congé parental de plusieurs années.

Lorsque celui-ci s'éteignit, la situation professionnelle de Mathieu s'étant notablement améliorée et le marché du travail dans sa branche étant ce qu'il était, l'arbitrage entre reprendre le travail ou s'occuper des enfants et de leur scolarité primaire fut assez simple à prendre.

Pour autant, il aurait été faux de la considérer comme une femme opprimée et ensevelie vivante sous le poids d'une vie domestique. Amélie s'était construite une vie qui lui convenait parfaitement. Ni femme désespérée à la maison, ni ébahie naïve face à son statut de femme au foyer, l'engagement et l'investissement dont elle faisait montre au quotidien lui attirait le respect attendri et sincère de Mathieu.

De surcroît, il était loin de délaisser son rôle de père et s'investissait autant que possible dans les tâches ménagères et la prise en charge des enfants, de leurs devoirs aux rendez-vous chez le médecin. Il mettait même un point d'honneur à les récupérer à la sortie de l'école au minimum une fois par semaine. Cela lui permettait de garder un contact avec ce qui comptait vraiment pour ses fils, à savoir leurs copains de l'école, leurs brouilles pour les derniers jeux à la mode pendant à la récréation, ou les récriminations de la maitresse à l'encontre de tel ou tel exercice ou leçon.

 

En définitive se dit-elle alors que la cloche sonnait libérant la troupe de lutins coureurs balançant amplement leurs cartables sur le dos, ils s'étaient construits tous les deux, puis tous les quatre, une belle et agréable vie.

 

Tout le monde se rapprochait à présent de la grille de l'école, cherchant à se faire voir des enfants pour qu'ils puissent sortir retrouver ceux qui venaient les chercher. Amélie en profita pour engager un tout début de conversation avec quelques autres mères présentes. Elle échangea quelques mots avec Esther et Anaïs, deux jeunes femmes pas encore quarantenaire comme elle. Les trois femmes se côtoyaient régulièrement. Sans être particulièrement intime, elles avaient déjà organisé quelques déjeuners ou dîners avec leurs maris respectifs. Elles s'entendaient bien toutes les trois et rigolaient de bon cœur. Anaïs lui demanda comment cela se passait pour Mathieu en ce moment au bureau, ayant appris que l'ambiance était tendue en ce moment pour lui. Ces quelques mondanités furent néanmoins rapidement abrégées par Amélie. D'une part, elle venait de récupérer ses deux fils et, d'autre part, dans la situation présente, elle se sentait particulièrement mal à l'aise.

Les deux femmes qu'elle avait en face d'elle étaient apprêtées et arboraient un look travaillé. Légèrement maquillées, visiblement coiffées et habillées avec soin, Amélie se sentit subitement très mal à l'aise avec son jogging, ses auréoles, ses baskets informes, et ses cheveux poisseux. Particulièrement face à Anaïs dont la tenue était parfaite.

—    Oui mais moi, au moins, je cours, pensa-t-elle autant pour se rassurer que pour ne plus y penser. Et toc !

Il était temps de rentrer et de mettre son costume de wonder woman pour toutes les activités sportives et musicales du mercredi après-midi. Amélie fut très occupée les heures suivantes et n'y pensa plus.

 

Mathieu rentra un peu plus tard que d'habitude ce soir-là. Cela faisait plusieurs jours qu'il rentrait un peu plus tard. Amélie repensa alors à la remarque d'Anaïs. Il faudrait en effet peut-être qu'elle s'inquiète un peu plus de ce qui se passait en ce moment dans la boite de Mathieu pensa-t-elle un instant juste avant d'éteindre la lumière dans la chambre des garçons et de les embrasser en leur souhaitant bonne nuit.

Elle le rejoignit dans le salon et commença à discuter un peu avec lui. Elle lui raconta les dernières informations relatives aux garçons, les derniers drames de la cour de récré puis ils partirent sur quelques considérations d'actualités. Mathieu lui expliqua également les différents éléments qui l'inquiétaient au bureau, lui parla de réunions interminables de recadrage des objectifs et des mesures à mettre en œuvre par le management pour les atteindre. Innocemment, il lui parla de certains de ses collègues dont Amélie avait déjà entendu parler. Toutefois, elle tiqua quand il aborda une certaine Rebecca. Ce n'était pas la première fois qu'il en parlait mais les étincelles dans ses yeux ne la trompaient pas. Les descriptions qu'il en avait faites ne lui avaient pas mis la puce à l'oreille mais la conjonction d'éléments assemblés les uns aux autres alluma plusieurs voyants au rouge vif dans son esprit. Certes Mathieu n'avait jamais été attiré par les physiques de cette fille. Brune, pas très grande et pulpeuse –comme il avait dit galamment–, elle ne rentrait pas dans ses critères. Néanmoins, cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas évoqué son physique. Elle s'en apercevait ce soir-là seulement. Régulièrement, il évoquait ses talons surdimensionnés mais élégants, ses tailleurs, jupes ou pantalons, bien coupés, ou encore sa manière de s'apprêter, toujours très professionnelle mais à chaque fois un tout petit cran au-dessus des autres.

 

Amélie fit le dos rond mais n'en perdit pas une miette. Sentant l'absence de méfiance en face de lui, Mathieu se perdit dans quelques remarques plus appuyées que d'ordinaire puis fit marche arrière imperceptiblement juste avant de changer de sujet maladroitement.

Amélie ne put s'empêcher de le traiter intérieurement de nigaud en souriant jaune. La soirée se termina naturellement, sans le moindre problème. Mathieu partit se coucher rapidement à cause d'un déplacement tôt le lendemain matin.

 

Amélie se retrouva seule aux alentours de minuit dans un des fauteuils du salon. L'appartement était silencieux. Pensive, elle regarda les lumières de la ville par la fenêtre. Son sweet-shirt hors d'âge lui tenait chaud.

 

Elle hésita. Longuement. Les événements et les réflexions de la journée s'entrechoquèrent dans sa tête.

N'y tenant plus, elle se leva d'un bond. Puis se reprenant, elle avança à pas de loup vers la desserte à l'entrée. Les scrupules l'assaillirent lorsqu'elle commença à fouiller dans le téléphone de Mathieu. Elle ne pouvait pas imaginer être capable de faire ça un jour. Pour autant, elle ne pouvait pas s'arrêter. Et effectivement, Amélie tomba sur quelques échanges de sms entre cette Rebecca et lui. Passée la colère de voir son prénom effectivement enregistré dans son téléphone, Amélie fut forcée d'admettre que les échanges étaient strictement professionnels et en rien tendancieux.

 

Prise de remords, elle allait éteindre le téléphone et se flageller d'avoir été aussi suspicieuse et indiscrète quand elle tomba sur une autre conversation par sms. Message après message, Mathieu avait tenu avec ce numéro de téléphone –non enregistré–, des conversations sans équivoque. Elles portaient sur des vêtements, des envies, des félicitations pour son apparence.

Amélie bouillait. Elle se sentait trahie. Trahie et profondément vexée.

Elle était à deux doigts de foncer dans la chambre, de le réveiller et lui demander des explications. Soudain, elle se ravisa. La colère s'était transformée en projet fourbe et vicieux. Il allait voir ce qu'il allait voir. Elle nota le numéro de téléphone dans son calepin soigneusement rangé dans son sac et fomenta son plan une bonne partie de la nuit.

 

Le lendemain, elle passa sa journée à faire du shopping. Elle renouvela toute sa garde-robe. Elle acquit des parures de lingeries qu'elle n'aurait jamais osé acheter. Elle alla chez le coiffeur et en profita pour se faire maquiller par une professionnelle. Tout cela couta une fortune à Mathieu.

 

Elle était superbe, absolument magnifique, sublimée par les sous-vêtements finement brodés portés sous son chemisier, sa jupe crayon et ses chaussures aussi vertigineuses que leur prix.

 

Une vingtaine de minute avant la sortie de l'école, légèrement à l'écart, elle sortit son téléphone portable pour composer le numéro de la jeune femme qui entretenait par sms une relation coquine avec son mari. Elle voulait lui parler directement pour la rencontrer et que cela cesse.

Elle s'expliquerait avec Mathieu plus tard, revêtue de sa nouvelle armure de séductrice, il ne pourrait rien lui refuser.

 

Elle composa le numéro et lança l'appel, juste avant de s'apercevoir qu'il était déjà enregistré dans ses contacts à elle.

 

Elle leva les yeux. Horrifiée.

 

Anaïs s'approchait d'elle avec un large sourire.

—    Mais Amélie, pourquoi tu m'appelles ? Tu n'as pas vu que j'arrivais vers toi ? Wouah, fit-elle admirative. Tu es absolument sublime. Tu avais un rendez-vous aujourd'hui ?

 

  • Texte bien écrit et très visuel. Ca appelle une suite...

    · Il y a plus de 9 ans ·
    Au rayon des livres

    chloe-n

    • Merci Chloé. J'ai bien pensé à la suite en effet mais je ne sais pas comment la tourner.
      Va-t-elle l'écharper directement à la sortie de l'école ?
      Faire comme si de rien n'était pour que la vengeance soit encore plus dure plus tard ?
      Ou bien, tout cela se terminera-t-il par une grande réconciliation autour d'un verre ou au bord d'un lit, tous les trois, ou toutes les deux... ?
      Mais promis, l'idée de la suite est là, rangée quelque part dans un coin de mon esprit et de mon disque dur...
      Merci de ta lecture en tout cas. Au plaisir.

      · Il y a plus de 9 ans ·
      Francois merlin   bob sinclar

      wen

  • Les SMS en coup de fouet pour peut-être, relancer un couple en manque d’excitation. Joli coup Wen. Le sujet est finement ciselé à ton habitude et les femmes y sont reines. Toujours désirables même en jogging.

    · Il y a plus de 9 ans ·
    D9c7802e0eae80da795440eabd05ae17

    lyselotte

    • Je ne sais pas pourquoi mais je doute que ça relance quoi que ce soit dans leur couple cette affaire...
      Quoique ! Finalement, ça peut être aussi l'occasion d'imaginer une combinaison qui ne serait plus duale mais triple... Va savoir !

      Et pour finir, oui, même en jogging je trouve les femmes désirables (même si je préfère la jupe crayon et les talons mais un peu de diversité ou d'éclectisme est toujours positif !)

      · Il y a plus de 9 ans ·
      Francois merlin   bob sinclar

      wen

    • Qui sait? tu es le maître des mots !
      oui évidement, la jupe crayon et les hauts talons ! ; )

      · Il y a plus de 9 ans ·
      D9c7802e0eae80da795440eabd05ae17

      lyselotte

  • Tu m'étonnes qu'il était content d'aller chercher les enfants à la sortie de l'école! Pffff ces mecs!!!;)
    Pas mal comme idée néanmoins!!!la trahison est d'autant plus forte qu'elle est souvent faite par des proches !
    Et j'adore la photo elle est juste parfaite! :D

    · Il y a presque 10 ans ·
    Suicideblonde dita von teese l 1 195

    Sweety

    • Chère mademoiselle S., comme je le disais à Apolline, il faut être deux pour ce genre de forfait. Que l'homme soit coupable, c'est une chose (et encore ! ce ne sont que quelques textos me semble-t-il... mais là, on rentre dans un autre débat...) mais ne mettre la faute que sur lui, ce n'est pas fair play.
      Quant à la trahison, on ne peut évidemment être trahi que par des proches. Dans chaque ami il y a la moitié d'un traître (Rivarol).

      · Il y a presque 10 ans ·
      Francois merlin   bob sinclar

      wen

  • AAma et lustre âme et lie
    âme rustre des-lie
    A love try......

    · Il y a presque 10 ans ·
    Facebook

    flodeau

  • Je ne sais pas pk les hommes se font un malin plaisir de séduire les copines, comme s'il n'existait pas d'autres femmes ailleurs et surtout inconnues... Si tu pouvais m'expliquer ahah...
    Sinon, j'ai forcément bien aimé, et c'est bien écrit.
    Donc, Bien sur Bien et puis courage à toutes les Amélie :)

    · Il y a presque 10 ans ·
    Ange

    Apolline

    • Euh... sur ce coup là, je pense qu'ils sont coupables tous les deux de leur conduite...
      Mais tu as raison, c'est idiot d'aller chercher une copine de sa femme alors qu'il existe tant d'autres femmes ailleurs ! (je provoque bien sûr !)
      Merci beaucoup des compliments en tout cas, au plaisir de te relire.

      · Il y a presque 10 ans ·
      Francois merlin   bob sinclar

      wen

  • Comme quoi, on est souvent trahis par ses amis !!! ( amies !!! ) les plus proches :)

    · Il y a presque 10 ans ·
    W

    marielesmots

    • non on est trahie par ses tères-heures les plus moches!!!grrrr

      · Il y a presque 10 ans ·
      Facebook

      flodeau

    • taires-heures...plus appropriées!!!

      · Il y a presque 10 ans ·
      Facebook

      flodeau

    • Et oui Marie, sinon ce n'est pas une vraie trahison ! Merci de ton com' et de ta fidèle lecture.

      Quant à toi Flodeau, bienvenue ici, j'essaierai rapidement d'aller lire ce que tu fais, ça m'a l'air intéressant. Merci d'être passé dans le coin en tout cas.

      · Il y a presque 10 ans ·
      Francois merlin   bob sinclar

      wen

  • Jolie !

    · Il y a presque 10 ans ·
    Oko 1

    Chronos

    • Merci beaucoup. Tu parles de l'illustration bien sûr...
      :-)
      Merci de ta lecture.

      · Il y a presque 10 ans ·
      Francois merlin   bob sinclar

      wen

Signaler ce texte