Le grand saut

petisaintleu

J'arrête de me  mentir. Je me suis promis de tout me dire, de tout vous dire.  Le moment est venu. Jour après jour, par capillarité, je me livre, l'écriture me libère. Quand je regarde dans le rétroviseur, je constate que j'ai perdu du temps. J'aurais dû commencer le travail bien plus tôt. Mais comme me disait mon grand-père, si ma tante en avait, on l'appellerait mon oncle.

Je vous aime toutes. A l'opposé, je voudrais être l'unique. Nul n'est besoin de dépenser une fortune chez le psychanalyste pour analyser mon complexe d'Œdipe. Je me suis simplement fait Bucéphale. Je ne me cache plus derrière mon ombre et j'assume.

Ne prenez pas les choses au premier degré. Je ne suis pas un parnassien du sexe. Mon objectif n'est pas d'entreprendre au lit un travail d'abattage. Je ne me vante pas de mes exploits et des remerciements humides dont ont souvent fait preuve mes partenaires. Je ne compte pas être promu dans le Guiness book des records.

Quoi qu'il en soit, comme dirait l'autre, j'ai changé. Il y a une époque où je me fuyais inconsciemment. Mes partenaires, je les laissais sur le bord du chemin, sans autre forme de procès. J'étais incapable d'assumer l'amour qu'elles voulaient me donner. Il m'était inconcevable que l'on puisse développer des sentiments à mon égard. Je me sentais trop pétri de complexes et d'aprioris envers moi-même. Évidemment que je le regrette aujourd'hui. Faute avouée n'est-elle pas à moitié pardonnée ?

Désormais, je prends le temps. Non pas que je sois moins performant. À ce jour, je croise les doigts, mes 20 Chesterfield Blue quotidiennes n'ont pas encore faites de dégâts sur mon corps caverneux. Je me suis assagi, tout simplement. J'ai développé mon humanité et je l'entretiens. Je ne fuis plus les caresses, je les réclame. Une fois atteinte la phase du plateau, je n'ai même plus le dégoût de la chair. Nous restons souvent allongés, main dans la main à refaire le monde. Il est vrai que dans l'intimité, je laisse tomber le masque. Je dis tout ou presque, c'est au feeling, selon que je sens plus ou moins d'instinct maternel.

C'est sans doute la raison pour lesquelles je n'ai pas d'appétence pour la jeunesse. Ce n'est pas un corps de bimbo qui m'intéresse. Je préfère largement le corps fatigué d'une quinquagénaire qui, au-delà des heures de vol et qu'elle n'a pas froid aux yeux, aura du plomb dans la cervelle.

Allez, passons à la provocation pour ne pas décevoir mon public. Mais aussi pour masquer quelques points qui me dérangent encore à ce jour. Laissez-moi un peu de temps, ça viendra. À chaque texte envoyé sur Welovewords, j'ai l'impression d'être cette araignée, je ne me souviens plus de son nom, qui creuse une galerie dans l'attente de ses proies. Pour mes lecteurs gonflés à la testostérone, rassurez-vous. Je vous lis également et je suis très sensible à vos remarques qui me font progresser. Mais, désolé, vous ne faites pas partie de mes fantasmes. J'attends mes lectrices. Je les imagine dans l'attente de me lire, en manque quand je suis deux jours sans donner de mes nouvelles. Comment m'imaginent-elles ? Fantasment-elles sur l'auteur qui entretient le mystère ? Le paroxysme est atteint lors des commentaires. Viendra le jour où je pourrai faire partager le temps d'une nuit les talents de ma plume.

Je vous sidère ? Je vous fais rire ? Je vous énerve ? Peu m'importe. J'écris et jour après jours, je sors de l'ornière.

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