Mise au jour

Ce matin, je suis dans ma cuisine, plantée devant ma cafetière. Vite vite !  M'abreuver du nectar noir qui saura, je l'espère, me réveiller entièrement. J'ai mal dormi. Un rêve débile m'a épuisée : J'étais penchée à ma fenêtre du troisième sur rue et complètement nue, je clamais à tue-tête : « La base virale de mon programme a été mise à jour ».

Vivre dans ma bulle, comme je fais depuis longtemps, ça n'arrange pas mes neurones nocturnes. Quant à celles du jour, je les utilise fréquemment devant mon ordi, dans ma création de cellule d'écoute sur divers sites. Récemment, j'ai longuement échangé avec un homme. Au bout d'une semaine, il a insisté pour me rencontrer. Les lignes qu'il m'adressait me faisaient tellement rire que je me suis dit : « Pour une fois, okay, allons rire de vive voix ».

C'était hier. Et nous avons ri. Échanges incroyables autour d'une table, comme si on se connaissait depuis toujours. Puis, au moment de se quitter, j'ai senti mon cœur se serrer. Pour rentrer, j'ai dû marcher au ralenti. Chez moi, le symptôme du palpitant était toujours là. Au secours, voici que mes pensées tournicotent sans cesse vers cet homme, qu'il me manque déjà, que oui c'est vrai, je ne voulais pas le quitter, DÉJÀ, et que je me suis vue ensuite, tourner en rond avec en prime une tête qui m'donnait l'tournis. Vite, mon café. Mais qu'est qu'il me fait celui-là, à marcher au ralenti lui aussi ? En effet, ça s'complique pour l'appareil puisque j'ai oublié de le remplir d'eau. Ah oui de l'eau ! J'ai soif, très soif. Je pense toujours à cet homme. À fond. Si sa bouche touchait ma bouche, ne serait-ce juste ça… Vite, je me rue sur ma bouteille de flotte, la vide d'une traite. Il faudrait absolument que j'ose lui écrire ce qu'il m'arrive et surtout que je le rassure : « Ne t'inquiète pas, je n'ai aucune demande, aucune attente, je voulais juste que tu le saches, c'est tout. Pas grave, si tu n'es pas touché par ce virus. Je devrais plutôt dire, tant mieux, tu as une chance de ouf ».          

Soudain, je cours allumer mon ordi qui me prévient qu'il est en train de travailler sur toute une configuration de mise à jour. « Cet homme magnifique d'hier, va-t-il m'envoyer un message aujourd'hui ? » Voilà que je parle toute seule à ma fenêtre ouverte. Ma peau est bleue et le ciel est rose.