Paul et...

Yvette Dujardin

Il revient subitement à lui, desserre ses mains du cou de l’inconnue. Puis, prenant sa tête entre les mains, cherche à comprendre comment il n’avait pu se rendre compte de rien. Pourtant il ressentait toujours les mêmes choses que lui. Tout le monde les savait inséparable. Avait-il, Paul, le pouvoir de lui fermer ses pensées? Trahi, il se sent trahi.

Il est vrai que depuis quelque temps, Paul avait un regard parfois absent, Valéry mettait cela sur le compte de la fatigue, mais ce qu’il avait remarqué, c’est qu’il avait maigri.

Ses responsabilités au sein de l’entreprise, devait le peser, enfin c’est ce qu’il avait cru.

Quel imbécile je suis, se dit-il ! Moi qui lui préparait les plats qu’il affectionnait, pour le remettre en forme, quel que soit l’heure où il rentrait.

Il se souvient des séjours en séminaires, c'était donc des prétextes pour etre avec cette femme!

Il entendit bouger derrière lui, vit la jeune femme, appuyé à la fenêtre.

─ Je lui avais dit de t’en parler, dit-elle sans se retourner, mais il remettait toujours à plus tard, il ne voulait pas te faire de peine.

Elle osait le tutoyer, il avait une envie folle de la faire taire à tout jamais, mais non, se serait trop bête, il faut qu’il sache tout, tout ce qu’il y a savoir sur Paul et elle.

─ Quel est votre nom ? demande-t-il, à contre cœur, il aurait voulu continuer à l’appeler l’inconnue.

─ Virginie !

─ Et ?

─ C’est tout ce qu’il y a savoir !

─  Non, je veux savoir pourquoi Paul vous a sauté ?

Elle se retourne  suffoquée par l’indignation, ses yeux jettent des éclairs.

─ Sauté ? Vous n’êtes qu’un goujat, nous nous aimions vraiment!

─ C’est faux ! Jamais il ne m’aurait fait cela, surtout avec une femme.

─ Et pourquoi pas ?

─ Parce que c’était moi son amant !

─ Je sais Valery, il me l’a dit, mais voulait en finir avec cette situation hors norme! Il me disait qu’il avait compris que cela n’était pas normal votre amour.

─ Comment a-t-il pu se confier à vous, ce n’est pas possible, c’était notre secret !

─ Valéry, essayez de comprendre vous aussi, cela ne pouvait durer, un jour vous vous seriez trahi.

─ Vous l’avez tué, hurlât-il, à cause de vous il est mort, ce que vous appelez un amour hors norme, durait depuis notre adolescence, nous ne faisions qu’un, et vous l’avez fait douter, maintenant c’est trop tard, il est parti pour toujours.

Valéry se lève brusquement, un revolver dans la main, pointé sur elle, cette femme qui lui a pris son double, son âme sœur, et tire.

Virginie s’écroule, elle n’a pas bronché en voyant le révolver, un sourire triste sur les lèvres, comme si elle attendait sa réaction.

Quand elle est entrée dans ce pub, elle suivait Valéry, pendant des heures elle avait attendu, dehors, sa sortie, et quand il s’est approché d’elle, son cœur battait si fort, il ressemblait tellement à Paul, une dernière fois elle aurait voulu encore croire qu’il était encore à elle.

A l’enterrement elle était là, dans un coin, ses yeux ne quittant pas le cercueil et lui. Et tout s’est enchainé. En lui racontant tout, elle savait ce qui allait arriver. Jamais Valéry ne supporterait la vérité sur Paul et elle.

Valéry, la regarde allongée sur le sol, le sang s’écoule rapidement, il a tiré en plein cœur, pour le briser comme elle les avait brisé tous deux.

Paul, qu’a tu fais et pourquoi ? Nous nous entendions si bien,  ne pouvais tu me le dire, nous aurions discuté de cela, comme d’habitude quand quelque chose tourmentais l’un ou l’autre.
Mais, tu as tu te dire que je n’aurais pas compris. Et tu as préféré te pendre, tu n’as pu choisir.

En fait, aurais-je compris que tu pouvais aimer une femme, toi, mon frère, mon jumeau, mon amour.

Puis il retourne l’arme contre lui, en murmurant : j’arrive Paul ! Une détonation résonne dans la chambre.

Et c’est le noir.

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