Porte close

CLAC !  elle a fait en se refermant tellement violemment que les fondations ont tremblé.

Elle a essayé de la rouvrir, en s'arc-boutant, en poussant de toutes ses forces. Elle a mis le doigt dessus ses faiblesses, forcé le point mais elle est restée impassible, sans bouger, même si elle n'était pas de marbre. 

Elle a fini par s'effondrer en larmes, recroquevillée contre la porte devenue close. Elle avait bien vu les traces provoquées par ses efforts. Cela n'avait rien changé, elle n'était pas sortie de ses gonds. 

Même si elle se prenait à espérer encore et encore, elle savait bien que c'en était fini de cette voie-là. Elle ne pourrait plus prendre la tangente, voler un peu de poudre d'escampette en dépassant le seuil.

Fini ses escapades hors du temps, ce dernier se rappelait à elle en martelant la cadence infernale d'une vacuité à apprivoiser. Il lui fallait tourner le dos car, en continuant, elle allait droit dans le mur et ça en serait à se taper la tête contre lui. 

Il n'était point besoin qu'elle se rajoute quelques bleus supplémentaires. Aucune brèche, de toutes façons, ne lui permettrait de se faufiler de l'autre côté. Il lui restait à se résigner, admettre ce qui lui semblait insurmontable, se résoudre à ne plus y penser. Renoncer. La porte resterait close.

Combien de fois avait-elle vécu des moments similaires ? Elle ne savait plus. Peu à peu, tout s'était rétréci autour d'elle. Elle avait bien essayé de contourner, de détourner son chemin, de ruser mais elle s'attaquait à plus fort qu'elle. Ce que certains appellent destin peut être. 

Le monde rétrécissait autour d'elle, le chant des possibles devenait oraison.

Le monde réfléchissait un univers qui s'étriquait et qui, à force de l'enserrer, lui devenait oppressant. Bientôt il n'y aurait plus d'échappatoire, ne lui resterait que le dernier seuil à franchir. Le glas avait sonné l'aveu des illusions perdues.

La porte était close. Il n'en restait plus beaucoup.