prison

Françoise Duterrage

Quinze ans. Quinze années d’angoisse, d’attente, de violence, de questions sans réponses. Tant de pages tournées, de mots griffonnés après avoir dévié dans une vie de galères. Les heures passent, minute après minute, seconde après seconde. Je me retrouve face à un univers d’incompréhension emprisonnée d’amertume. Sur les murs, des chiffres taillés dans la pierre  justifient l’attente, comme un sentier tracé. Au dehors,  aucun  bruit ne perturbe le silence de la nuit. Je voudrais que les aiguilles de ma montre s’affolent pour parcourir les trente jours restant. La sueur perle mon front. La peur s’empare de mes entrailles peu à peu. J’allais être transportée dans l’inconnu, l’ignorance, dans une ville non inexplorée auparavant. J’allais me retrouver libre, livré à moi-même. Soudain, les souvenirs effleurent ma mémoire, comme pour gangrener mon esprit. Les douleurs psychologiques vécues remontent à la surface. J’entends encore les cris des victimes. Je les regarde, impassible, les menottes aux poignets, avec une souffrance intérieure que nul ne pourrait décrire.  La chaleur inonde la pièce puis frôle mon visage. Je sens alors la main de ma mère sur mon front comme lorsque j’étais souffrant à l’âge de l’innocence. Des pas dans le couloir se rapprochent de plus en plus. La peur m’envahit. Je ne sens plus mes jambes. La liberté me terrifie. Les rencontres futures me hantent, un peu comme si j’étais condamné. Quelques minutes plus tard, les pas s’éloignent. Je m’assieds alors lâchant un soupir profond, comme par soulagement. Le soir commença à tomber, les lumières à s’éteindre, les voix à se taire. Tout devint paisible. Soudain, la lumière s’allume. Le petit déjeuner m’est servi par mon épouse. Le bonheur m’envahit alors, conscient  du rêve que je venais d’oublier.

DUTERRAGE Françoise

Signaler ce texte