Autant confier sa petite soeur au Marquis de Sade

Eric Varon

Exercice n°28 : Rencontre du troisième type

Crée par Sophie D.A. WeLoveWords

Vous êtes une bactérie ! Clandestine, vous voyagez beaucoup et vite pour que l'on ne vous arrête pas. Intelligente, vous avez aussi un sens de l'humour diabolique : non contente de tuer, vous vous moquez. Imaginez être au chaud, comme au bistrot, dans un corps humain et rencontrer un autre envahisseur, un ver solitaire, auquel vous racontez comment vous vous êtes joué de l'Europe entière avec un concombre...Écrivez le récit acide de la bactérie à la PREMIÈRE PERSONNE sur un TON GOGUENARD et au PASSÉ, suivi de la réplique, LARMOYANTE, elle, du ver solitaire.

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La bactérie tueuse n'est qu'une forme de déconstruction dégoûtante où les boyaux s’emmêlent à n’en plus finir  (Jack l'éventreur)

« T'as de beaux yeux, tu sais », dit la bactérie, sapée style lycéenne rebelle. s’adressant au vers solitaire,

« T’as pas une clope ? »

« Tu vas pas fumer ici ça va faire explosion avec le méthane ! »

« Non, ça va juste des brûlures d’intestin, te casses pas j’ai passé six ans à étudier les codes génétiques avant de me lancer, je descends de la bactérie de la fièvre jaune, c’est dire si je suis costaude. Les antibiotiques je les raffutais comme au rugby, les grands je les cassais et les petits je les tassais. La graine germée c’était mon truc, j’avais des cousines qui travaillaient dans la viande hachée, mais bon c’est dégoutant à force. Le concombre ça me donnais un joli teint mais c’est pas ça… suppose qu’ils enlèvent la peau, y’ a des vicelards qui le faisait bouillir. Mon truc c’était de devenir hétéro,  hétérogène j’veux dire, j’en ai bavé au début mais bon c’est la persévérance dans l’être comme dit BHL, faut réviser son code de base et muter, c’est ça la devise de la bactérie qui tue. Si tu veux échapper aux biologistes et autres gonzes de laboratoire, faut changer de code comme de chemise.

Moi je peux pas répondit le vers solitaire, ils tuent le vers tous les matins à onze heures en s’envoyant de la vodka  pure je suis dans les vapes j’ai plus toute ma tête….

Moi reprit la bactérie tueuse j'ai pensé très fort qu'il fallait« Changer la vie »  oui, mais dans quel sens ? dans le sens interdit ! J'attaquais l'Europe après ma campagne d'Egypte kif kif Napoléon sur les remparts, sous moi donc cette troupe s'avance, les graines germées de fenugrec remplaçaient les grognards, nous marchions sans boire depuis Zanzibar et le tee-shirt flashy  c'était quand même plus classe, moins barbare, que le chapeau à la con  de Napoléon comme aurait dit Zazie, oublie tout Jérusalem céleste, cité radieuse lendemain qui chantent, oublie tout Europe pour ne penser qu'à moi avec mes nerfs, mes dents mes griffes. Plus rien ne me faisait obstacle dans mon désir d'affronter la vie et la mort, j'avançais victorieuse combattante de l'absolue destruction Blitz krigueuse échevelée du Dasein, Je faisais l'amour avec l'impératif catégorique et on payait de sa vie cette intrusion dans mon jardin secret où poussaient les bâtons de dynamite. Je me suis séchée à l'air du crime, j'ai joué de bon tours à la folie...
-Euh c'est pas de toi ça, coupa le ténia, le gars chez qui j'habite à lu ça hier.
- Ouai là j'évoque, je cite. Tu comprends c'est en s'éloignant du modèle biologique qu'on peut faire l'apprentissage de la sur-bactéricité. Je suis à  au mal de bide ce que Nietszche était à la philosophie Mon petit nom c’est O104 : H4, si tu veux m’envoyer un SMS quand je serais remontée du côté des poumons ? Je suis une souche exceptionnellement rare, des comme moi y’en a pas deux… Remarque hier j’ai eue la peur de ma vie je suis tombé sur un système immunitaire très très antipathique J'avais été invitée par SMS et je m'attendais à trouver un petit groupe de créateur et d'initiés, prêt pour une soirée branchée. J’étais seule sur le dance-floor, quand une silouhette en imperméable noir avec une arme au canon remarquablement long entre,  m'aperçoit, braque  son arme vers mon corps frémissant, terriblement vivant, il va tirer... quand il tire, je me jette de côté, la balle passe frôlant mon corps, ma vie,  mais je n'entends pas le moindre bruit de détonation.

En fait de performance d'artiste, je danse sur la musique d'une arme automatique à silencieux qui m'oblige à fuir comme une follasse, « viens,ma petite bactérie  Escherichia col, dit-il en se marrant sadiquement, c'est un petit jeu  de création ludique entre amis vraiment hype, mon nom est Destructor l'idée est de détruire la bactérie au début, de "la frapper fort au premier jour de l'infection avec un antibiotique"...viens, je suis attirant comme les beaux criminels de Jean Genet...». Sa voix est froide, douce, triste, une voix lointaine. Une deuxième balle me frôle la nuque manquant d'emporter mon cerveau, panique, fureur, muscles tendus, assez de danse c'est la guerre, penchée au-dessus du vide, « enfant de salaud ... t'auras pas ma peau».

Les muscles tendus, retrouvant ma souplesse agressive animale, je me lançais dans transgression de l'ordre social et des conventions, « j'vais t'en donner du Genet », maintenant les dents serrées,  rapide comme  l'éclair telle une animale enragée je bondis pour dérouter  une deuxième balle vient me frôler la nuque comme je dévalais l'escalier de secours dans l'obscurité absolue seule une flèche verte avec le mot sortie indique la direction à suivre,  mes jambes me propulsent vers l'avant, je glissais et je tombais, un étage plus bas dans une benne de déchets mous, probablement du tissu adipeux.  Je me relevais d'un bond, gladiatrice couverte de trognons de choux, tandis qu'une nouvelle balle venait s'écraser sur le mur. « C'est juste une modification corporelle une petite balle dans la peau... ». Sans lui laisser le temps  d'ajuster son tir je fonce vers le rue jusqu'à la bouche du métro. « voluptas et cupido , tu l'as dans le dos, Quos vult perdere, Jupiter dementat. », avec mes fringues de night clubbeuse passée par les poubelles, j'ai l'air d'une ancienne riche récemment tombée dans la débine.  Je me pose la question, qui a voulu m'attirer dans cette soirée pourrie ? Il m'appelle par mon prénom «Escherichia coli, vas-tu te laisser tuer ? . ». Une monstrueuse araignée me poursuit, provoquant en moi une incroyable bouffée d'énergie. Son langage était trop cru et moi je n’étais pas encore cuite. Une rame de métro dans l’artère pulmonaire principale, je sautais dans le wagon, il était loin maintenant. Je me regardais dans le reflet des vitres, mes vêtements en loques me donnent un certain charme de dernière rescapée de la catastrophe. Odeur lourde et chaude de marécage et de plantes.  J'ai cherché le buzz, je l'ai trouvé, je m'attendris sur moi si jeune et si belle, mon pantalon est troué, mais heureusement on ne voit pas mes seufs.

-         Tu as du pot toi dit le vers solitaire, tu fais des trucs, t’es invitée à des soirées, même si c’est super dangereux, c’est l’aventure et l’amour

-         Oui répondit la bactérie tueuse en lui flanquant un bon coup de batte de base-ball derrière les oreilles, je suis une tueuse ne l’oublie. Elle disparait dans les zones sous-cutanées, laissant le triste ténia à son destin.

Moralité, faire confiance à la bactérie tuseuse,  autant confier sa petite soeur au Marquis de Sade


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