Bordel poétique. Contribution

laurencemarino

Trois textes, trois humeurs, trois, eux et moi

Les caravanes du Diable

 

Dans le creux de mes cernes mauves

Se nichent des ballots de rêves sales

Tout au fond derrière ma nuque

Plient des branches d'amertume

 

Elles sont passées les  caravanes du diable

Elles ont semé les pierres de soufre

 

Tu ne reviendras plus sur ma joue

Je ne me promènerais plus dans tes blessures

Les balades au clair d'étoiles ne sont plus

Les bêtes hurlent et se régalent

 

Les empreintes de mes larmes ont creusé

Des rivières noires

Le cœur au pied de la falaise, je saute

Ailes éparses, bec à l'abandon

 

Elles ne reviendront plus jamais

Ces cavalcades exquises

 


Mes insinueuses

 

Elles ont grimpé le long de ma colonne partant du ventre jusqu'à la tête. Les pestes sont venues se loger au fond à droite et ont grignoté petit à petit. Elles n'ont émis aucun bruit. Des respirations lentes au mieux. A leur passage, le vide se fait. Place nette au vertige

Les insinueuses sont parfois capricieuses.

Elles font de la balançoire et mettent des coups de pied là où ça fait mal. Quelques jours de calme pour les oublier. Elles reviennent comme une migraine sans nom. Chantent à tue tête des mélodies sans paroles.  Leurs langues râpent les contours de mes yeux. Quand je veux fermer les paupières, elles me forcent à regarder en face. Leurs griffes lacèrent mes joues. Je plie sous leur poids. Les nuits sont le terrain de jeu qu'elles apprécient. Elles forment des farandoles et remontent se cacher sous ma nuque. Si je ferme les yeux dans la journée, c'est qu'elles viennent également me chatouiller.

Mes insinueuses.

Ces douces terreurs avancent en meute, dévorant les proies des rêves. Epuisée, perdue dans cette parade de la mort. Ma chair en vrac, mon âme noire.

 


 

Voyage délicieux

 

Une escapade dans la tiédeur de la journée

Prendre la tangente sur le quotidien

Aller respirer la fleur de lotus, celle qui apaisera

Il n'a pas mangé mais s'est lavé les dents

C'est pathétique une chambre d'hôtel à 15 heures

Rideaux à peine propre, couvre lit fleuri

Ne pas poser ses fesses. Pas grave, il n'a pas l'intention d'y dormir

Voiture cachée derrière un camion, puce de portable enlevée

Fabuleux la géolocalisation mais chronique d'une crise annoncée

Les murs n‘ont pas d'antennes. Pour les oreilles il s'en fout.

Ils crieront s'ils en ont envie

Tsunami de ventres tordus, inondation sans rescapés

Ils vont se mouiller tous les deux

Et pourtant peur de ces corps qui se cherchent

Pas se dire « je t'aime ». Ils ne s'aiment pas. C'est comme un jeu

S'embrasser pour ne pas avoir à parler

On a éteint la lumière, tiré les rideaux sur la lumière du jour.

Demain il fera jour. Plus peur, juste envie et voilà.

Odeurs de parfums, celui oublié mais reniflé en cachette dans les parfumeries

Pas possible de se cacher. C'est l'heure de la mise à nu

Les seins se collent au torse. Les lèvres s'avalent

On a envie de parler, de chuchoter. Mais on ne dit rien.

Temps des corps. On pose les mots à côté.

Ils verront le jour plus tard. Laisser les mains se dire les absences

Penser à rien. Trou sidéral. Temps où les étoiles se chevauchent.

On se découvre. Les habits et les apparences tombent.

Enfin tu es là.

Les corps ont raté le train. Ils montent ensemble dans le sens de la marche.

Délicieux voyage

 

 

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