De quoi je suis faite (V2)
blonde-thinking-on-sundays
De la mer, des caprices d’un climat inconstant.
Des vagues fougueuses qui attaquent les falaises déchirées.
Du paysage insoupçonné caché par la roche et de cette nature qu’il faut mériter.
D’un port animé où rentrent les chalutiers escortés par les goélands bruyants.
D’étals de poissons brillants.
De pavés glissants sous la pluie et de chants de marins de passage, titubant dans la nuit.
De dimanche de grand vent.
De Cherbourg.
De doux souvenirs d’enfant privilégiée. De nos rires, nos jeux, nos courses folles.
De l’insouciance servie sur un plateau d’argent. De regroupement de famille autour des patriarches. De cueillettes de mûres, de chasse à l’escargot, de croustillons collants, de cabanes sur l’herbe, de châteaux de sable, de pêche à la crevette, de dînettes ragoutantes, de rosbif frites-maison…
Je suis faite aussi de colères jamais vraiment éteintes, de bouderies à répétition et de larmes exagérées. De ces compliments qui ne mettent en valeur qu’une apparence. Superficialité. D’un besoin de ne jamais s’arrêter, de tout essayer.
De ténacité.
De l’inédite amitié tombée par hasard du cartable. De cette envie alors de ne plus être que jolie. De toutes ces pages ensemble noircies. De mille mots vomis, de mots infatigables qui veillent de longues nuits, comme d'autant d'interlignes remplies, de vide comblé. De cette écriture qui guérit.
D’entêtements payants, de pulsions, de coups de tête, de coups de gueule, de grands sauts sans filets, d’indignation toujours et d’intolérance pour l’intolérance.
De déception de l’homme. Mais d’exceptions qui confirment la règle.
De ma main dans cette main qui me porte loin. De la force gagnée par un et un font un. De nos vies qui donnent la vie, qui s’en étonnent encore.
D’où cet attachement pour un bout de terre paumé et cette incapacité à larguer les amarres… D’où cette nécessité constante de revenir aux racines, celles qui jamais ne trahissent ou ne vous abandonnent. Cette nostalgie entêtante des temps anciens, de ce qui était mieux avant... Et cette volonté de poursuivre après les autres, de continuer à réunir, unir… D’où ce devoir d’offrir coûte que coûte la même vie à celle qui suit, comme une promesse secrète faite à ceux d’avant… D’où cette sensibilité étincelle qui enflamme parfois tout sur son passage pour ne laisser que des terres stériles. D’où ces bras dont je ne me passerais pour rien au monde et qui seuls me font lâcher prise, baisser les armes, hisser le drapeau blanc. D’où cet acharnement à avancer, pour elle, pour lui. Être fidèle à ce que je suis parce que ceux qui restent m’aiment ainsi. Imparfaite.
C'est vraiment chouette de te lire, de ce que j'ai lu tu as différentes tailles de plumes, j'ai vraiment encore des progrès à faire...
· Il y a presque 11 ans ·Christophe Paris
Dans un contexte de mondialisation, où les identités régionales se perdent et disparaissent peu à peu (nous dira-t-on), il reste quelque chose de valable et de moderne à l'identité régionale, quelque chose que cette identité peut apporter au monde centralisé autour de la banlieue, du travail au bureau, des open-spaces et des supermarchés (très bien décrits par toi il me semble dans un autre texte). L'idéntité régionale, c'est quoi? Je pense que c'est surtout une saveur, un langage, une littéralité qui donne de la texture au monde. Fier de mon identité (qui est éloigné dans l'espace de la tienne), je te tire mon chapeau bas, car ce texte j'aurais aimé l'écrire, l'adaptant au variante de ma région, mais en y gardant cette prose incontournable!
· Il y a environ 11 ans ·jasy-santo
Et bien que dire... Je suis très flattée de lire que tu aurais aimé écrire ce texte, je te remercie de tout coeur, cela me fait bcp de bien. Bon dimanche ;)
· Il y a environ 11 ans ·blonde-thinking-on-sundays
Très très beau en effet, comme le disent les autres commentaires.
· Il y a environ 11 ans ·Très subtil et très fin.
Mention spéciale à :
"...comme une promesse secrète faite à ceux d’avant."
Très émouvant.
(signé : un gars du Calvados aujourd’hui expatrié dans le 06 qui connaît bien Agon-Coutainville, Ste Mère Eglise, St-Lô, etc.)
wen
*dobeul rouge pivoine* MERCI toucher les autres avec ses mots : le plus beau cadeau. Bise
· Il y a environ 11 ans ·blonde-thinking-on-sundays
Superbe!
· Il y a environ 11 ans ·Et de plaintes, et de cris, et de douleurs sans doute.
Et de pudeur, sûrement. Et de beaucoup d'amour.
Frédéric Clément
Bam en plein coeur. Surtout de vous. Merci
· Il y a environ 11 ans ·blonde-thinking-on-sundays
Oh ben merci ! C'est trop gentil ! :-*
· Il y a environ 11 ans ·blonde-thinking-on-sundays
Coup de coeur, juste sublime, bravo !
· Il y a environ 11 ans ·droledeplume