Et je sombre dans le Néant
mamzelle-plume
(Photographie: Elena Kalis. )
Dans mes cieux, le vent porte une saveur acide, il vous incendie les poumons. L'air y est venimeuse. Son odeur aigre flottant librement, m'entoure, m'asphyxie un peu plus chaque jour. Me détruisant à tour de flanc.
Dans mes cieux, les arbres ont la couleur des cendres et les fleurs s'y parfument à la lavande. La flore s'y enrhume, cramoisie par la nuit. Les feuilles jaunâtres s'y étiolent, valsant au son des crépitements.
Dans mes cieux, les bruits sont inexistants. Le silence y est permanent. Il vous prend à la gorge, il cherche à vous étrangler de sa présence insidieuse. Vous chantant sa litanie pour dernière berceuse. Il vous tord, vous contorsionne le corps. Se délectant de votre combustion, fumant au cigare le rythme de vos passions. Remplissant vos poumons, il y implose en milliers de cristaux.
Dans mes cieux, le noir est omniprésent. Je l'observe, d'un œil absent. Ce ciel transparent, se transformer. Lorsqu'au firmament ces ailes se déchirent, recouvrant mon monde d'un voile opaque. Le soleil disparate, n'existe pas. Seule règne, une nuit éternelle.
Oui,
Mon monde est terne.
Nulle lumière, nulle étoile scotchée dans un ciel de crépon. Nulles lampions printaniers, nulle flocons hivernaux, le temps y est paralysé. Les saisons y sont engluées, depuis longtemps égarées dans un sablier.
Mon ciel orageux s'amoncelle en nuages vaporeux. Son teint d'encre, engloutit chaque parcelle de mon être, tandis que seule, je dégringole dans un puits sans fond.
Pourtant,
J'aurais aimé pouvoir changer les choses. Ces choses fumantes qui me hantent. J'aurais aimé savoir parler, savoir m'exprimer. Marcher droit, la tête haute. Et non pas voutée, les épaules guidés vers le sol. J'aurais aimé être irascible et méchante, ne pas constamment penser au jugement des autres, ne pas vivre aux travers de leurs regards.
J'aurais aimé tant de choses. Je souhaite tellement de choses.
C'est cruel d'espérer, sans parvenir à oublier. A oublier cette fêlure, cette cassure qui me brise. Qui m'entaille la peau, qui me ronge les os.
J'aimerais oublier. Tout oublier.
Vos rires, vos sourires, Jusqu'aux moindres de vos soupirs.
Je voudrais oublier de respirer,
Me contenter de vivre en apnée,
M'éreinte.
Tout simplement, j'aimerais oublier de vivre.
Je crache sur ce ciel. Je me fous de votre monde. Il n'est pas le mien. Il ne le sera jamais.
Parce que, je n'y arriverais jamais.
Je ne parviendrais jamais à vous satisfaire. A me satisfaire. Je n'atteindrais jamais mes buts, je ne correspondrais jamais à vos demandes. Car mon âme est malade. Mon âme est fumante. Elle erre parmi votre atmosphère. Sans jamais parvenir à faire le nécessaire.
Car je vis dans la lucidité, car je respire l'air d'un passé dévasté.
Oui, jamais je n'abdiquerais. Je ne rentrerais jamais dans vos lignes de conduites, jamais je ne suivrais vos précieux principes à la lettre.
Oui, ce jeu m'épuise. La réalité m'afflige.
Alors cloitrée dans ces tréfonds sombres, mon ciel embrumé pour seul contact avec les cieux. Fait défiler devant mes yeux moirés, les particules boueuses, d'une vie en sablier.
Recluse, pommée dans ce puits sans fond. Les images me marquent, tatouage indélébile. Frémissante sous les coups d'aiguilles, plus rien n'importe.
L'espace infinie pour néant. Mon cauchemar se fait permanent.
Mon âme s'égare.
Et je sombre dans le noir.
Mais est ce que devenir amnésique effacerai le sombre, le noir ? Pas si sûr... autant vivre avec malheureusement...
· Il y a plus de 9 ans ·Paloma Farmer
Certes.. Mais parfois quand la douleur est trop forte, à défaut de s'envoyer par la fenêtre, il vaut mieux espérer oublier.
· Il y a plus de 9 ans ·mamzelle-plume
Je ne peux que comprendre. Le mieux pour effacer tout est peut être d'y ajouter plus de lumière dans sa vie... la lumière d'une bougie... je te donne quelques allumettes aussi ;)
· Il y a plus de 9 ans ·Paloma Farmer
Je les accepte, si tu utilises les miennes.. ;) Mais oui, choisissons le jour. Pas la nuit. Bien que ce soit parfois inévitable..
· Il y a plus de 9 ans ·mamzelle-plume
Un cadeau d'une telle valeur à mes yeux ne peut se refuser ;)
· Il y a plus de 9 ans ·Paloma Farmer
Un sombre bien dépeint. Savoir toucher le néant le vide et puis revenir le sourire blanc rempli et croque ta vie.
· Il y a plus de 10 ans ·Apolline
Merci beaucoup, et je te remercie également pour ces encouragements.. Chuchotés en sourdine.
· Il y a plus de 10 ans ·Au plaisir de te lire !
mamzelle-plume
Très beau cauchemar.
· Il y a plus de 10 ans ·Mathilde En Soir
Merci beaucoup, au plaisir de vous lire !
· Il y a plus de 10 ans ·mamzelle-plume
Magnifiquement destructeur et immersif. CDC et 5 petits cœurs, loin je le sais, de soulager ta rancœur.
· Il y a plus de 10 ans ·mark-olantern
Merci beaucoup... Bien entendu, mais cela passe un peu de baume sur mon coeur abimé. Merci encore !
· Il y a plus de 10 ans ·mamzelle-plume
très très beau ce texte en prose , sublime
· Il y a plus de 10 ans ·Blanche
Merci beaucoup ! Cela me touche du fond du coeur :)
· Il y a plus de 10 ans ·mamzelle-plume
MamZ'Aile Plume, je ne sais si vous connaissez "Si..." de Rudyard Kipling, enfin "If..." en anglais, et je ne sais pas si la lecture de ce poème est de nature à vous aider mais quand il m'arrive d'avoir l'âme au noir c'est là que je vais et le lire te le relire me redonne la force nécessaire... Essayez :
· Il y a plus de 10 ans ·"SI...
Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te remettre à rebâtir,
Ou perdre d'un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;
Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre
Et, te sentant haï, sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;
Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d'entendre mentir sur toi leurs bouches folles
Sans mentir toi-même d'un seul mot ;
Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;
Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur;
Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;
Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,
Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire,
Tu seras un homme, mon fils !"
Rudyard Kipling
silas-chien-dutopie
Il est superbe ce poème
· Il y a plus de 10 ans ·mark-olantern
Magnifique poème, tout à fait bouleversant ! Merci pour votre commentaire, et votre temps. Au contraire, ce texte comme beaucoup d'autres et de nature à m'émouvoir et à me redonner en tant soit peu d'espoir. Merci encore pour vos encouragements... Je ne connaissais pas ce texte mais je vais l'ajouter à ma liste de favoris :)
· Il y a plus de 10 ans ·mamzelle-plume
Aladin? Mazelle-Plume te frotte!
· Il y a plus de 10 ans ·Philippe Larue
Un vœu serait suffisant, mais je ne suis pas contre trois... Merci de votre passage.
· Il y a plus de 10 ans ·mamzelle-plume
Va vis et deviens. Accroche toi à tout ce qui traîne. On a besoin de gens comme toi.
· Il y a plus de 10 ans ·dary-crawl
Merci... Tes mots me touchent. Je m'accroche toujours.
· Il y a plus de 10 ans ·mamzelle-plume
très belle écriture des tripes - j'ai connu à votre âge - tout en vous espérant moi désespérée ...
· Il y a plus de 10 ans ·scribleruss
Merci beaucoup, pour le compliment et pour vos encouragements. :)
· Il y a plus de 10 ans ·mamzelle-plume