Et toi, qu'as-tu fais de ton rêve?

li-ann

Et toi? Qu'as-tu fais de ton rêve?

Les histoires, c'est comme tout, ça finit par arriver.

Celle-ci en est une, je l'ai entendue, au coin de la rue, et elle m'a plut.

Il était une de ces fois, une femme qu'on appelait Julie Pomme. Elle habitait un petit village perdu, comme on en fait plus, entre la forêt et les vastes champs étendus, dont on ne voit pas le bout à perte de vue. Cet endroit paumé s'appelle Bled.

Elle vivait là, dans une maison de paille, avec sa grand-mère. Au milieu de la maison, il y avait une cour et au centre de la cour se dressait un cerisier, qui donnait les meilleures, celles qu'on appelle griottes.

Tous les jours, à midi Julie Pomme grimpait dans le cerisier pour décrocher les plus sucrées, celles qui ont chauffées au soleil, et elle s'asseyait au pied de l'arbre avec sa grand-mère et ensemble elles les savouraient, ravies par la nature elles la remerciaient, en chantant des airs de patois qui disaient: «  les histoires c'est comme tout ça finit par arriver. »

Et puis un jour, vient frapper à la porte du temps passant, une vieille vêtue de noire, qu'on nommait là-bas, la Muerte. Et bien la Muerte a emmené la grand-mère dans son grand manteau, et cela pour toujours et à jamais. Parce que ça arrive aussi dans les histoires.

Julie Pomme reste seule au Bled, à veiller aux affaires de sa grand-mère et en souvenir d'elle, tous les jours, à midi, elle monte dans le cerisier des griottes, celles qui rougissent à la chaleur, elle les déguste une à une, puis petit à petit plonge dans l'heure de la sieste. A cette instant elle s'endort, à l'aurore du sommeil, elle fait un rêve. Elle voit un beau jeune homme qui lui dit: « Julie Pomme ton âme est belle. Le monde est grand, vient à la Terre Nouvelle, à la Terre Nouvelle il y a un pont, sous le pont il y a la vigne, et au pied de la vigne dort un mendiant, et sous lui sommeille un trésor. Va Julie Pomme, ce trésor est pour toi. »

Dans un sursaut, elle se réveille, et le repos elle cherche. Mais cette histoire de trésor l'en empêche. Alors pour se changer l'esprit, elle se met à chanter: « Les histoires c'est comme tout, ça finit par arriver ».

Le lendemain à midi, elle grimpe dans le cerisier, et Julie Pomme cueille les plus jolies, les rouges exquises. Puis ferme ses yeux et là elle fait un rêve. Il y a un beau jeune homme qui lui dit: « Julie Pomme ton âme est belle. Le monde est grand, vient à la Terre Nouvelle, à la Terre Nouvelle il y a un pont, sous le pont il y a la vigne, et au pied de la vigne dort un mendiant, et sous lui sommeille un trésor. Va Julie Pomme, ce trésor est pour toi. »

Soudain, elle s'éveille d'un bond, elle ne veut pas de trésor, elle veut juste trouver la paix. Mais l'histoire l'en empêche. Alors pour l'oublier elle se met à faire un bouquet, et d'odeurs de roses en pétales de fleur, le rêve a disparu.

Mais le lendemain à midi, après avoir savourer ses cerises, Julie Pomme fait le même rêve, avec le même beau jeune homme qui lui dit exactement la même chose, et elle fait ce même rêve tous les jours pendant un mois. Et au bout d'un mois, elle se dit: « Et si ce bel homme avait raison, si à la Terre Nouvelle il y avait vraiment un trésor? »

Alors elle est partie. Elle a quitté le Bled, et la route sous ses pas elle a mis.

Et elle a marché ainsi pendant des jours et des nuits, des semaines et des mois, car la Terre Nouvelle était à plusieurs milliers de pas, de découragements et d'épreuves.

Quand elle y arrive enfin, elle est fatiguée, sale, elle a soif, elle a faim. Mais elle se met tout de suite en quête. Et dans cet ailleurs, elle aperçoit un pont. Elle se rapproche, il y a une vigne, elle y arrive. A son pied dort un mendiant. Julie Pomme se met à hurler:

« Debout mendiant il est l'heure de creuser! »

Le mendiant se demande s'il rêve encore: « Laisse moi espèce de jeune folle, je suis pauvre et cette vigne est ma seule richesse. Laisse moi dormir! »

Mais Julie Pomme alors lui raconte tout, car les histoires c'est comme tout ça finit par arriver.

Elle lui confia son rêve, le beau jeune homme, le pont, le trésor.

Alors le mendiant lui dit: « Tu es drôle avec tes yeux plein de jeunesse de croire en tes rêves! Figures toi que moi, quand j'avais ton âge, je m'endormais au pied de ma vigne, et bien moi aussi je faisais un rêve. Je rêvais d'une belle jeune femme, qui me disait, va au Bled, au Bled, il y a une maison de paille, au milieu de la maison il y a une cour, et au centre est un cerisier qui donne les meilleures cerises que la terre ai portée, et sous ce cerisier dort un trésor. Mais tu vois jolie fille, moi je ne suis pas assez fou pour ça! ».

-Tu as raison mendiant, a dit Julie Pomme, moi non plus je ne suis pas assez folle pour ça ».

Et Julie Pomme est rentrée au Bled, dans la maison de paille. Elle a vu la cour, elle a vu le cerisier. Elle est allée chercher une pelle, et elle a creusé, elle a creusé, elle a creusé...

Elle a voulu, elle a trouvé.

Elle a cru car les histoires c'est comme tout ça finit par arriver.

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