Le Commerce

Au Commerce quand arrive le mois de Juin, on se met à comparer les avantages et les inconvénients du camping et du mobilhome. Les vacances approchent, même pour ceux qui n'ont pas bossé. Ça sent la pétanque anisée sous le soleil, j'aime ça.

Les mamies promènent leurs cheveux rouges, s'aventurent en société bien plus tard que d'ordinaire. Le gros Raymond leur dit de se taire, et d'arrêter de jacter comme ça bordel, qu'on est pas au marché, on est au bistro et le bistro c'est une affaire de bonshommes alors fermez-là !

Les vieilles poules baissent d'un ton et recommandent une Suze en cachette. En cachette de Raymond. Pauv' vieux, condamné à six mois de Vittel, sous peine de retourner vite fait à la Salpêtrière, sans sursis cette fois.

_ Oh  Gillou ! Tu fais gaffe à pas les arroser de trop les morues, parce qu'après c'est moi qui trinque...

Dans la cinquième à Saint-Cloud y'a Soumillon à la monte. Sur 1600 mètres, corde à gauche et à 13 contre 1, qui c'est qui met dix balles avec moi ?

Le quinté d'aujourd'hui c'est du gâteau. Le 4, le 9, le 16, le 13, l'as et puis le 11. Mais gaffe au 7, au 8, au 2 et au 14, avec ces cons-là on sait jamais.

L'été arrive, et tout le monde a sa chance, tant que la course est pas terminée.

_ Hey l'artiste, t'arrête un peu avec tes bouquins oui !? Je vais t'dire un truc mon con, avec ce qui va nous tomber sur la gueule dans pas longtemps, t'as intérêt à ranger tes fesses, parce que là ça va chauffer crois-moi… 

Il a raison le Raymond, ça finira par péter tout ça. En attendant je vais reprendre la même chose, oui une côte. Là ! Pas plus haut que le bord !

Ça y est, y'a du soleil plein mon journal. Le seul journal qui vaille la peine,  le seul sans mauvaise nouvelle. Sans magouilles et sans faits divers, sans pourritures en première page, le seul canard qui restera - vous verrez, ça sera Paris-Turf.