LE TROUPEAU DE MOTS

A la sortie de l’école des auteurs, le frais diplômé gagne le mont Délettres pour emmener paître le troupeau de mots qu’un éditeur lui a confié.

En prenant de la hauteur et en goûtant l’herbe grasse, il voit des articles devenir luxueux voir même de Paris, des conjonctions se joindre, des adjectifs s’enrichir, des interjections s’interroger, des noms communs l’être moins, des phrases s’éclaircir, des pronoms redevenir amateurs, des verbes muer, des expressions se décontracter, des termes se réchauffer, des dictons s’édicter, des traits s’affiner, des saillies se multiplier, des aphorismes se fortifier, des locutions s’électrifier, des tournures s’arrondir, des adages rajeunir, des maximes se restaurer, des devises s’apprécier, des proverbes se conjuguer, des tirades grandir, des sentences retrouver le moral, des couplets s’accoupler, puis des paragraphes s’agrafer. Ensuite dans l’étable l’heure arrive, celle du berger, alors il les trait pour en faire des tomes.