Une opération délicate...
Yvette Dujardin
Me revoici sur la scène du crime. Quatorze jours me furent nécessaires pour m’armer, afin d’affronter des lectures assassines. Quatre-vingt-une recommandations qui m’annihilent, altèrent mes envies de lire. J’attaque, un, deux textes, très bon d’ailleurs de mes auteurs préférés, mais j’ai l’impression d’avoir un révolver sur la tempe, et quelqu’un qui m’ordonne de lire, de commenter.
J’ai mal à la tête.
Est-ce encore les réminiscences de l’anesthésie. L’opération fut longue, le réveil douloureux, attachée par un cathéter d’où sortent des tuyaux reliés aux multiples perfusions. Une sonde urinaire, une mèche dans l’anus, et des femmes en blanc, qui me réveille jour et nuit, toutes les deux heures, pour prendre ma tension, vérifier mon taux d’oxygène, soulever le drap, pour entendre dire : non pas trop de sang !
J’ai mal.
Elles se décident à me mettre un calmant en perfusion. Je ne sais comment me mettre, je me tourne, la sonde me blesse.
Au secours, à l’assassin. Que voulez-vous de moi, qu’ai-je fais pour subir toutes ses tortures.
Je ne dors qu’en dent de scie, toute la nuit j’entends un bébé hurler sans arrêt, hoqueter, mais que lui font-il ? Quand j’y arrive, les sorcières me réveille et recommencent leur rituel, toujours la même question :
─ Vous avez fait des gaz ?
─Non, je n’en fais pas ! Pourquoi faire ???
J’en ai marre, je veux rentrer chez moi. La prochaine fois, je dirais oui, ainsi je pourrais partir.
Je demande pourquoi j’entends un bébé pleurer (hurler) toute la nuit, réponse :
─ La maternité est à l’étage au-dessus !
─ Bien sûr, pourquoi n’y ai-je pas pensé, je suis en gynéco…
Comme il fait chaud, les fenêtres sont ouvertes. Pauvre maman, je la plains, son bébé confond la nuit avec le jour, car il est vrai que je ne l’entends pas tellement la journée.
Ouf ! Moi je n’en ai plus, mais, si mes petits-enfants me demandent de garder leur bébé, je les enverrais à leur grand-mère, moi j’ai donné, enfants, petits-enfants, les arrières, qu’ils se les gardent, je vais doucement mais surement sur mes 70 ans, je veux profiter de la vie (Na !)
Enfin, une infirmière me dit que je peux rentrer chez moi, aucune fièvre à l’horizon. Elles vont retirer mes instruments de tortures. D’abord la sonde, cela pique un peu, puis la mèche, (Qu’ils m’ont mis dans le cul, les chirurgiens, opération pluridisciplinaire) alors là, je m’accroche aux draps, la douleur est vive. La meche n'en finit pas, combien de kliométres ont-ils mis? Puis les perfusions, avec le cathéter.
Je me lève, un peu tremblante, je marche enfin.
Ah, pas de sang ont-elles dit ? C’est le lit qui a tout reçu, elles avaient bien mis la protection, n’est-ce pas ?
Je me suis vite lavée, enfin un petit gaz, donc tout va bien, pas de fistule, puis le professeur qui m’a opéré, est passé, vite fait :
─ Madame, vous pouvez rentrer chez vous, mais surtout restez au repos, pas de ménage, jardinage, pas porter plus de deux kilos !
─ Puis-je, écrire Docteur ?
Non mais il croit quoi, lui ? J’ai déjà prévu une aide-ménagère, c’est la mutuelle qui paye, j’vais pas m’gêner. Pour une fois que j’aurais pas de ménage à faire.
Avec les tripes qu’ils m’ont découpé, recousu, j’irais pas loin de suite.
Téléphoner au mari…rassuré..je reviens à la maison… je vais pouvoir m’occuper de lui, et MOI !!!!
Et à ma fille pour venir me chercher.
Retour, enfin !
Mais il ne faut pas trop bouger, pas porter du lourd...
Quoi ???
Mais je ne sais pas rester assise, sans rien faire. Mari, qui à chaque fois que je me lève :
─ Attention, te fais pas mal !
…Mais bien sûr, je vais courir, tiens, tu crois que je peux, là ! Il est con ou quoi…
J’me traine, marche à petit pas, j’irais pas danser ce soir en compagnie de Michèle Torr et qui d’abord… Ouille…..
A chaque mouvement, une douleur insidieuse, me tord les tripes.
Je le savais moi, je ne voulais pas me faire opérer. J’ai fait la même en 1999, et dans une polyclinique à la con, où ils me laissaient, sans soin intime, j’ai baigné dans mon sang.
Trois jours de souffrance, pas de morphine, je souffrais le martyre. Un changement de personnel, une infirmière de nuit, qui, pouvant comprendre ma douleur, m’a fait une piqure !
Enfin !
Cette année-là (j’étais jeune…13 ans de moins quand même!) quand je suis rentrée, j’ai repris la voiture aussitôt, pour des courses. J’avais mal aux fesses, à chaque arrêt, je me soulevais du siège. J’aurais presque, si j’avais pu, conduire debout, en fin presque…
A peine revenue, je suis allée à la salle de bain, pour examiner mes fesses, car je ne comprenais pas pourquoi j’avais si mal. Après quelques contorsions, avec une glace, j’ai pu les apercevoir. Bleues, elles étaient bleues, un hématome géant.
Qu’avait’ il fait à mes fesses pour qu’elles soient dans cet état ?
Pas possible, me suis-je dis! Je savais que c'était une intervention sous coelioscopie, l’on gonfle le ventre par de l’air…quel air, pas dit, ne sais pas, peut-être qu’ils ont mis une musique assez entrainante, qu’ils ont dansé, avec leurs instruments, je l’ai eu dans le c.. en tout cas.
Tango…vous danser m’amzelle l’infirmière, a dû dire le chirurgien, et cela devant moi, dans une position, devinez …mes amis ! Ou imaginez plutôt !
J’ai honte ! Oh comme j’ai honte, j’en suis toute rouge, heu !!! NON BLEUE
A moins qu’il ait profité pour me sodomiser ?
- le cerveau: Mais ENFIN, Yvette, ça va pas ? Qu'est ce que tu raconte ? T'est pas remise de l’anesthésie, tu es encore sous les effets de la morphine, ou t'as bu ?
Bon, là, c’était en 1999 ! Maintenant tu es en 2012 ! D’ACCORD !!! Et puis ce n’était pas un professeur comme maintenant, D’ACCORD !!!
OUIIIII…. J’ai compris ! Ah ce cerveau, qu'est ce qui m'emmerde, toujours à raisonner, est ce que je raisonne moi?
Bon je reprends ! Je suis rentrée, pas bleue cette fois, sauf des fils qui me sortent des fesses.
Et oui !! Vont se résorber m’a dit chirurgien.
Bon, je ne souffre pas comme en 99, le professeur qui m’a opéré, m ‘avait tout expliqué avant.
J’avais rien compris. Il m’a parlé de découpe, d’attache à l’utérus, sauf que si je faisais pas attention, en rentrant (deux mois, il m’a dit) réopération, ablation de l’utérus, bof, pour ce qu’il me sert maintenant, à 66 ans je n’allais pas faire d’enfant. Pas folle, j’ai des petits enfants, suis pas pour me faire faire une insémination artificielle et enfanter, j’ai donné.
Donc, je ne fais rien, je regarde mon aide-ménagère nettoyer ma maison. Ma fille m’emmène faire les courses, porte tout, à la maison repos, je crois que je m’y habiterais bien, de cet état-là, RIEN FAIRE. WOUUUUH …Je souffle un peu !
Mais cela ne fait que quatorze jours, et encore six semaines à glander. Enfin, je bouge un peu quand même, suis pas du genre à exagérer….
Tu disais quoi…
Ah, oui, mais quand mes deux mois seront terminés, c’est Francis qui va se faire opérer, et là je reprends mon rôle de femme d’invalide.
Donc, Yvette, profites, ta famille te dorlote, car tu sais qu'après cela, la galère avec ton mari. Il se fait enlever les os carpien de la main droite, quel sera son moral après, déjà, qu’il ne va pas bien.
Bon, jouis du temps présent, tu verras plus tard.
Fait le 03/09/2012.
Là on sent combien la personne est plus importante que le patient... alors que lorsqu'on met les pieds dans une clinique on devient un malade, un assisté, le patient de la chambre tant ! Si on accepte ce statut on perd le courage de se battre. Bravo Yvette !
· Il y a presque 12 ans ·carmen-p
Yvette, quelle Force de vie en Toi ! Quelle spontanéité ! Merci de nous transmettre tes grandes qualités à travers ta plume qui te va si bien !
· Il y a presque 12 ans ·Apolline
Merci à vous, Colette, franek, Marina,NILO et Phine qui viens de nous rejoindre, grâce à Nicole. En effet, les moments difficiles (et il y en aura encore) il vaut mieux en faire avec un peu d'humour sinon cela devient de plus en plus difficile d'avancer. Nous avons tous dans un recoin de l’âme, des blessures. Bises à vous.
· Il y a presque 12 ans ·Yvette Dujardin
Arrivée depuis peu dans ce monde des mots et des images, je vous découvre dans ce passé pas très folichon mais si bien narré, avec tant d'émotions et de ressenti!Mais je crois aussi comprendre que quelles que soient les circonstances, c'est l'humour et le dynamisme qui vous sauvent dans la vie de tous les jours. Bravo et merci .
· Il y a presque 12 ans ·phine
Bravo pour ton humour Yvette... Heureusement ce mauvais moment est derrière toi !
· Il y a presque 12 ans ·nilo
de la douleur avec de l'humour, un texte sincère sur les aléas de la vie bien narré et criant de réalité, bravo!!
· Il y a presque 12 ans ·franek
Eh bien Yvette! C'est pas drôle ce que tu racontes-là!!!!Vaut mieux pas passer par la case bistouri!!!
· Il y a presque 12 ans ·Colette Bonnet Seigue
· Il y a presque 12 ans ·Tahar, merci de ton passage, tu es mon ami de toujours. Amicalement.
Yvette Dujardin
cascar72, merci, il faut bien rire pour ne pas pleurer. Les fautes, désolée, ce n'est pas moi, c'est le clavier, je ne sais pourquoi, il m'en veut; Rires.. je les connais ces fautes, les volontaires ou non, mais parfois, je crois que ne pas en faire, c'est etre trop parfait ou avoir un "nègre". J'ai toute ma vie corrigé ceux des autres, donc maintenant, je me lâche.
· Il y a presque 12 ans ·Yvette Dujardin
On surnomme les chirurgien "les bouchers"...Nous comprenons la souffrance (morale et physique) que tu as endurées.Heureusement que le calvaire est fini.
· Il y a presque 12 ans ·Bonne soirée,Yvette !
Tahar Yettou
On pourrait m'en vouloir de dire que j'ai ris, ou de dire que c'est génial, parce que ce genre d'expérience on pourrait s'en passer dans une vie: les opérations sont souvent des moments difficiles... En tout cas merci et continuez!
· Il y a presque 12 ans ·PS: si j'étais prof de français les (quelques) fautes d'orthographe me feraient refaire la déco avec mon stylo rouge, mais je ne suis qu'élève et je fais des fautes d'orthographe aussi alors...
cascar72
Bonsoir, choupette, merci de venir faire un coucou. C'est un site où l'on se fait des amis virtuels, et certains sont fidèles. Lire, écrire, commenter, voilà la raison de WLW.
· Il y a presque 12 ans ·Pour l'optimiste, c'est un jour ou plusieurs bien, d'autres chagrin. Mais l'écriture vaut tous les remèdes. Amitié.
Yvette Dujardin
Bonsoir, je ne vous connais pas, récemment arrivée ici...mais j'ai aimé votre récit. Du genre optimiste non? En tous cas...avec même un tout petit peu d'humour .
· Il y a presque 12 ans ·Choupette
Je viens de relire, je crois qu'il faut cliquer sur lire, car sinon il manque du texte. Merci
· Il y a presque 12 ans ·Yvette Dujardin
Ce texte a été écrit ,14 jours après mon opération, je l’avais oublié dans mes documents, puisque mon dernier texte posté c’était le 12/08/2012, reprise du 10/11/2012 au 24/11 ; La période a été difficile, car mon mari a été opéré le 19 Octobre 2012, et pour lui, qui a souffert, car les suites de l’opération se sont compliquées et cela n’est pas terminé.
· Il y a presque 12 ans ·De plus le 14 Décembre, mon fils cela a fait 12 ans qu’il nous a quitté. Je n’avais plus envie d’ouvrir mon PC.
Je suis revenue le 07/02/2013. Je vais bien. La vie continue. Et j'ai retrouvé mes amis(ies)
Merci à celles et ceux qui m'ont soutenu pendant cette période, et m'ont écrit. Je les embrasse très très fort.
Yvette Dujardin