Elle ne dort jamais cette ville, les terrasses sont bondées jusqu'à pas d'heure. Hier soir je me suis baladé sur les quais avant de rejoindre ma chambre d'hôtel, pensant trouver un peu de calme. Même le bord de Garonne était animé et sur les 2 rives. Seul comme un con, voir des couples enlacés partout m'a filé le bourdon et des jeunes ont fait la fête dans le bar face à ma chambre jusqu'à minuit. Au lieu de regarder les redifs et les conneries à la télé, j'ai lu le bouquin que m'a offert mon assistante la semaine dernière. Putain, quand j'ai vu le titre... Dire que je l'avais envoyée bouler pour une broutille quelques jours avant... mais elle avait remarqué sans doute mon air de plus en plus abattu. Ça fait presque un an que ma femme m'a quitté mais je n'arrive pas à m'y faire. « L'homme qui voulait être heureux », j'étais si ému que j'en aurais chialé. Hier soir, n'arrivant pas à dormir je l'ai lu. J'ai dormi peut-être 3 heures et se soir, il est à peine 21h que j'ai déjà la tête dans le cul.

Installé à la terrasse d'une brasserie de la place du Cap', je viens seulement de commander mon plat que je me sens piquer du nez dans le verre de rosé qu'on vient de me servir.

— Mettez des glaçons dedans, ça va vous réveiller !

Oh pétard j'ai plus sommeil ! Depuis la table à côté, une sirène me tend un sceau à glaçons. Elle dîne seule aussi et après avoir bavardé un peu, le serveur rapproche nos tables et je peux sentir son parfum aux notes légères de monoï.

Les seins moulés dans le blanc satiné d'une robe légère décolletée dans le dos et assez courte pour révéler le galbe de ses jambes interminables, non seulement elle est magnifique mais elle est loin d'être sotte. Nous nous racontons un peu nos vies, enfin elle, parce que moi je n'ai dit que des conneries. C'est vrai quoi, je n'allais pas lui dire que nos cinq gosses élevés ma femme m'a planté et vit avec un mec de trente balais. Cette connasse n'a jamais bossé de sa vie et j'ai du lui donner une pension compensatoire en plus de la valeur de la moitié de la baraque pour qu'elle entretienne son jeun's. Je n'allais pas lui dire que je me branlais tous les soirs sur le web, ni que j'étais inscrit sur 3 sites de rencontres.

Nous attendions qu'on nous apporte des cafés, quand elle s'est levée pour aller sans doute aux toilettes. Je bandais comme un fou, elle ne marchait pas, elle ondulait gracieusement ses hanches larges et ses fesses rondes à souhait.

Oh punaise, j'ai pas de préservatifs ! En tous cas j'ai plus sommeil, mais je sens qu'elle ne va pas céder au premier soir celle-là. Elle doit déjà cogiter une baraque assortie à un gros 4X4, le cocker et le 6ème môme qui rendent parfait le décor de la banquette arrière. Mais je ne suis pas heureux, moi ! J'aurais voulu continuer à tromper tranquillement ma femme et m'occuper de mes étudiants. Je crois que si j'étais viré je continuerai à les soutenir gratos. Le bouquin d'hier soir sur le développement personnel, c'est pour les gens comme mon ex, ceux qui savent ce qu'ils veulent et sont doués pour le bonheur. Oui ça peut devenir réalité le bonheur si on y croit, je ne crois à rien moi. Mais j'imagine que si je donne mes coordonnées à la sirène, je vais me faire baiser une fois de plus.

Elle revient s'asseoir et m'assène dans un sourire désarmant :

— Il n'est pas loin ton hôtel ?