Cuvée anisée de saison

Pour les « iceux et les icelles » qui prendraient le train de mes cuvées anisées en marche, laissez-moi vous décrire succinctement le principe. Il s’agit pour moi, alsacien expatrié dans le Sud-Anis de faire toute la lumière sur les us et coutumes locales, tout particulièrement en termes de réappropriation de la langue française, d’utilisation abondante d’images et du jargon savoureux pimenté par l’accent chantant et ensoleillé. Mes collègues représentent ma cible préférée. Heureusement ils ne sont pas dépourvus d’humour. La plupart du temps en tout cas.

Pour ceux qui attendaient un nouvel épisode, merci de bien vouloir prendre en compte la justification qui suit. Je préfère adopter un rythme plan-plan, non pas que mes collègues ne m’abreuvent plus d’anecdotes, mais il est important de se conformer à la cadence locale. Même si le soleil et le piaillement des cigales ne nous assomment plus, passage au temps d’hiver oblige, le déclenchement intempestif du chauffage dans les bureaux à des températures abusives abrutit jusqu’à ma plume.

Il faut aussi reconnaître que la fréquence de publication inaugurale m’a épuisé, je suis cané.

Pour mes collègues qui liraient ces lignes introductives, vous ne pourrez qu’apprécier la suite, moins policée que la précédente cuvée.

En parlant de saison, ici, l’automne a été très vite écarté, blackboulé par l’hiver. Les épisodes cévenols, habituellement confinés à septembre ou octobre nous ont simplement fait croire à leur incursion brutale par le biais de bulletins météo hasardeux. Ils ont vite perdu leur caractère cévenol, dépouillés promptement par les prévisionnistes induits en erreur. Peut-être reviendront-ils en décembre, alimentant quelques conversations sur le changement climatique entre pastis et pastis.

L’automne venu, la campagne gardoise, celle que je fréquente en tout cas, regorge de fruits. Les arbres sont clafis de figues, ou de pommes. Il y a des poires et des coings dans tous les coins et recoins, quelques grenades également. Il y en a tellement que les autochtones font semblant de ne plus les voir. Ils s’en désintéressent complètement. En réalité, ils ont la flemme de les ramasser, ils ont la cagne. Ils les laissent donc tomber au sens propre, et au sens figuré.

Bon, je sens que je vais mettre le ouaille, le boxon avec ces quelques lignes. Mes collègues vont s’engatser, s’enfader, s’énerver dès la pause-café. Peu importe, j’en ai bu d’autres des cafés sous le feu de la mitraille anisée. Croyez-moi, j’en ai avalé de toutes les couleuvres, moi le daltonien ophidiophobique.

De tous ces fruits il faut en profiter. Ce serait couillon de ne pas le faire ! Il suffit de se munir d’un sac plastique, d’une poche ou d’un pochon, appelez-le comme vous voulez. Les spécimens de figues ou de pommes sont quichés, les arbres, eux, quillés, cougnés dans le moindre espace disponible. Ils s’offrent aux amateurs de confiture ou de chutney.

Mais les gardois pendant ce temps-là, sont déjà en train d’allumer chaudières et cheminées, préoccupés par la descente ô combien vertigineuse des températures en dessous de vingt degrés…

Ah si, ils n’ont pas oublié une chose, la récolte des raisins. En revanche, sur ce coup, je les comprends ! L’essentiel est préservé.