Emmène-moi

Lâcher prise lâcher prise, lâcher prise de Quoi, de Qui, du comment du pourquoi, parce que, plus rien du tout elle ne retient désormais. Elle n'en peut plus d'écouter ça, à chaque coin, à chaque parcelle de son chemin. Elle comprend que dalle dans ces deux mots qui s'agitent comme un drapeau. Lâcher, lâcher et puis quelle prise ? Ça devient obsédant, ça devient vulgaire. Il y a longtemps que cette femme ne se cramponne plus. À sa tête, à ses draps, à ses envies, à ses désirs, à ses attentes. Il y a longtemps qu'elle s'est décrochée du rocher pour tomber dans la mer, que son corps, il flotte au gré du courant, du vent souvent oppressant qui la renvoie toujours à se buter au même rocher. Résignée, à demi morte avec toujours l'image de Lui qui la surprend. Ça devient obsédant, ça devient vulgaire. Putain, elle l'aime encore. C'est impossible. Merde, plutôt mourir que d'avoir à lui dire. Retourner le chercher, elle refuse ce laisser-aller. Ses pensées s'attachent seulement à remarquer ce décor qui lui confirme la preuve dans l'épreuve : reconnaître ce rocher à ses pieds. Désespérée, elle l'enserre à l'étouffer telle une bouée qui pourrait la sauver. « Emmène-moi, emmène-moi avec toi ! » hurle-t-elle dans un ultime élan de mélange à cette mer agitée. C'est alors que le bloc se met à trembler, à se soulever. Puis il se détache spontané en emportant de tout son poids la fine silhouette abandonnée. L'eau est si profonde, si sombre. Maintenant, tout devient clair, elle sait. Elle sait lâcher prise.